Isolants biosourcés : Des performances en hausse…

Les isolants biosourcés, comme tous les autres isolants, doivent être considérés à travers au moins quatre prismes différents?

leur résistance thermique, leur empreinte environnementale, leur tenue au feu, les différentes méthodes de mise en œuvre.

 

Qu’est-ce qu’un isolant biosourcé ? La définition assez précise d’un matériau de construction biosourcé se trouve dans l’arrêté du 19/12/2012 (Nor : ETLL1239803A) relatif au contenu et aux conditions d’attribution du label “bâtiment biosourcé”.

 

L’arrêté précise :

 

L’article 6 de l’arrêté ajoute 3 conditions supplémentaires :

 

Selon cette définition, la perlite expansée, une sorte d’argile parfaitement naturelle, n’est pas considérée comme isolant biosourcé.

 

Quelles sont les matières disponibles ?

 

Selon l’association C&B (http://www.constructions-bioressources.org/), créée pour encourager et structurer le ­développement des biomatériaux dans la construction, les isolants biosourcés sont les produits issus de la transformation du bois, sous forme de laine ou de fibres, la ouate de cellulose issue de la transformation du papier, la laine de chanvre et de lin, seules ou mélangées l’une avec l’autre, la laine de coton, la laine de mouton, le liège, la paille et le textile recyclé.

 

 

©Isocell SAS

 

Les premières productions de panneaux ou de plaques de liège, ainsi que de laine de bois en rouleaux datent des années 60. Les fibres de bois sont apparues dans les années 70 et sont fabriquées en France dans au moins quatre usines. Les premières laines de chanvre et de lin datent de 1998. Depuis 2009, Cavac Biomatériaux en produit en France. Il n’existe plus de fabricant français d’isolant en plumes de canard.

 

Filières structurées

 

Des filières structurées se mettent en place pour la ouate de cellulose, la paille et les produits dérivés du bois. La ouate de textile recyclée est fortement liée au développement de l’économie sociale et solidaire et fonctionne grâce à la collecte de vêtements. La laine de mouton demeure anecdotique pour l’instant. En termes de produits d’isolation commercialisés, si l’on se fie à ­l’Acermi, il existe des solutions à base de coton en vrac, de fibres de bois en vrac, de fibre de bois, de laine de bois, de laine de bois composite, de liège expansé, de ouate de cellulose en vrac, ainsi que des “produits à base de matériaux d’origine animale ou végétale”.

 

Question 1 : Choisir un isolant biosourcé en fonction de son λ

 

 

©Saint-Gobain Isover

 

En utilisant la certification de l’Acermi comme juge de paix, si l’on compare les λ des différents produits biosourcés certifiés, la conductivité thermique (le λ en W/(m.K)) de ces derniers comble peu à peu son retard sur celle des matériaux isolants classiques.


Pour fixer les idées, il suffit de comparer les épaisseurs d’isolants nécessaires pour atteindre une résistance thermique de 8 m².K/W qui devient courante en toitures neuves et rénovées. Pour chaque classe ­d’isolant, nous avons retenu la valeur de λ la plus faible, donc la meilleure, parmi les produits certifiés.

 

Un seul isolant, le polyuréthane (λ= 0,022) permet d’atteindre R=8 avec moins de 200 mm d’épaisseur. Cinq matièrespolystyrène expansé (PSE), laine de verre, polystyrène extrudé (XPS), laine de roche et un composé à base de 70% de plumes de canard – se situent en dessous de 30 cm pour R = 8.

 

Huit isolants biosourcés se placent légèrement au-dessus de 30 cm d’épaisseurentre 30,04 et 32 cm – pour atteindre R=8. La laine de bois, en raison de son λ = 0 ,080, requiert 64 cm d’épaisseur.

 

Finalement, pour atteindre R=8, il ne se trouve que 112 mm de différence entre le polyuréthane et le combiné laine de bois + laine de verre ou laine de chanvre + laine de bois, les deux matériaux biosourcés les plus récents et dont le λ atteint 0,036 W/(m.K).

 

Question 2 : Quel comportement au feu ?

 

 

©Steico

 

Tous les isolants biosourcés sont combustibles. Si l’on se cantonne aux isolants biosourcés certifiés, leurs certificats Acermi indiquent en principe toujours la réaction au feu : Euroclasse E pour le liège expansé, Classe B-s2, d0 pour la ouate de cellulose en vrac…


Un certain nombre des certificats disponibles sur le site de l’Acermi ne comportent cependant aucune indication sur la réaction au feu, comme le certificat délivré pour Jetfib’Ouate, de la ouate de cellulose à projeter ou à souffler fabriquée par Cavac Biomatériaux, celui délivré à Univercell SAS pour la ouate Univercell, tout comme la Thermeo ouate de cellulose, Thermacell ou Sopracell de Soprema, etc.

 

Il faut donc se tourner vers leurs Avis techniques (Atec) ou Documents Techniques d’Application (DTA), s’ils en ont. D’une manière générale, il faut éviter le contact entre ces isolants combustibles et une source chaude –?notamment les spots d’éclairage encastrés dans le plafond?– ou une source d’étincelles.

 

Les canalisations électriques à proximité immédiate des isolants, doivent être des conduits non-propagateurs de flamme. Ce qui écarte les conduits ICT et ICD oranges. Tous les appareils et ouvrages électriques doivent être protégés (capots, etc.), installés et utilisés (sans surcharge électrique) dans les règles de l’Art, de manière à éviter tout court-circuit avec création d’un arc électrique apparent.

 

Dans le cas particulier des ERP (Etablissements Recevant du Public), la majorité des Atec renvoient vers le “Guide d’Emploi des Isolants Combustibles dans les ERP” (http://www.sitesecurite.com/ERP/AM08Guide.htm).

 

Question 3 : Quel impact environnemental ?

 

 

©Isocell

 

La promesse principale des isolants biosourcés est leur “vertitude”, autrement dit leur faible impact environnemental. Il existe deux sources d’information, mais rien n’est possible sans l’emploi de logiciels spécialisés.


La principale source d’information est la base Inies (http://www.base-inies.fr/) qui regroupe l’ensemble des FDES disponibles pour tous les produits de la construction. Rappelons qu’un produit biosourcé doit être accompagné d’une FDES pour être pris en compte dans le label “Bâtiment Biosourcé”.


Inies rassemble 674 FDES sur des produits d’isolation thermique ou acoustique, mais seulement 36 portent sur des produits biosourcés : 5 sur la ouate de cellulose en vrac, 1 sur la laine de chanvre en ITI dans les combles, 1 sur la paille en isolation répartie non-porteuse, en ce qui concerne l’ITI des cloisons verticales, 27 FDES portent sur des solutions en laine ou fibre de bois pour l’isolation intérieure des parois verticales, ainsi que, pour le même usage, 1 laine de chanvre et 1 fibre de coton.

 

A quoi sert une FDES ?

 

Une FDES n’est pas faite pour être lue, mais plutôt pour être exploitée par des logiciels spécialisés dans l’évaluation de l’empreinte environnementale des bâtiments, comme Elodie du Cstb. Ces logiciels permettent de comparer différents isolants pour un même service – l’ITI des parois verticales pendant 70 ans, par exemple – et pour un projet de bâtiment précis, du point de vue de leur impact environnemental durant l’ensemble de leur cycle de vie.

 

Elodie utilise les FDES, donc des produits commerciaux clairement identifiés. La seconde source permettant d’évaluer l’impact environnemental est le site autrichien BAUbook (http://www.baubook.at/) qui n’existe qu’en allemand.

 

Certains BE avaient pris l’habitude de l’utiliser avant le développement de la base Inies et, continuent de le faire. Il faut garder à l’esprit, cependant, que les produits figurant sur le site BAUbook ne correspondent jamais exactement aux produits commercialisés en France, parfois sous la même appellation, et que la méthode employée n’est pas le même que celle des FDES. Les données de l’un ne sont donc pas comparables aux données de l’autre.

 

Un meilleur bilan carbone pour les biosourcés

 

Ceci posé, BAUbook montre que l’analyse du cycle de vie de 1 m² ­d’isolation d’une épaisseur correspondant à R = 5, aboutit à un bilan carbone largement positif pour les produits considérés comme séquestrant le CO2 : liège expansé, bottes de paille densifiée, panneaux de fibres de bois denses et ouate de cellulose. Ce bilan oscille autour de zéro pour la laine de bois, la laine de chanvre ou de lin, la laine de mouton et la laine de coton recyclé.

 

Il devient négatif pour les isolants traditionnels. Par exemple, la fabrication de la ouate de cellulose “générique”, sans prendre l’exemple d’un produit précis, requiert 98 kWhEP/m3, contre plus de 250 kWhEP/m3 pour les laines de roche ou de verre et plus de 850?kWhEP/m3 pour le polystyrène expansé.

 

 

INFOS PRATIQUES

 

Les isolants biosourcés en construction neuve


La RT2012 ménage une place particulière aux isolants biosourcés. L’arrêté du 26 octobre 2010 qui institue la RT2012, fournit dans son annexe IX des valeurs de λ par défaut pour les isolants biosourcés : de 0,010 à 0,049 W/(m.K) pour le liège, de 0,20 à 0,07 pour les panneaux de fi­bres de bois conformes à la norme NF EN 316, de 0,10 à 0,08 pour les panneaux de laine de bois, 0,049 pour la ouate de cellulose, de 0,056 à 0,048 pour les fibres de chanvre ou de lin, de 0,080 à 0,052 pour la paille comprimée, de 0,065 ou de 0,060 pour toutes les autres fibres végétales, de 0,046 pour la laine de mouton, de 0,065 à 0,050 pour les isolants à base d’autres fibres animales.

 

Attention, il faut consulter non l’arrêté initial qui comportait des erreurs précisément sur ces valeurs, mais l’arrêté rectificatif ou bien le texte consolidé à début janvier 2015. Les valeurs forfaitaires pour les isolants biosourcés sont relativement favorables, mais demeurent inférieures aux valeurs réelles obtenues par une certification Acermi.

 

Rappelons que cette certification est très significative en RT2012. Dans un calcul RT2012, en effet, si la performance du produit est certifiée, on retient la valeur certifiée. Si la performance est simplement attestée par un laboratoire tiers, on prend cette valeur attestée pénalisée de 10%.

 

Si la valeur n’est attestée par aucune donnée, on retient la valeur par défaut. Le décret n° 2012-518 du 19 avril 2012, puis l’arrêté du 19 décembre 2012 ont créé le “label bâtiments biosourcés” qui, tout naturellement, devrait favoriser l’emploi des isolants biosourcés.

 

Ce label est certifié par Certivea, Cerqual et Cequami. Il ne semble malheureusement pas avoir rencontré un grand succès. Seul Cerqual annonce avoir 9 opérations de logements collectifs en cours de certification pour un total de 319 logements.

 

 

Source : batirama.com / Pascal Poggi

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