Congrès Passivhaus 2015 : peut-on construire des tours Bepos ?

Peut-on vraiment construire des tours Bepos ? Le Mouvement Passivhaus participe à de nombreux programmes expérimentaux en Europe pour construire de tels bâtiments.

 

  1. Le bâtiment “Skyline am Leopoldstädter”, livré à Vienne en 2013, est la première et, pour l'instant, l'unique tour de bureaux certifiée Passivhaus. D'autres projets sont en cours de développement à Bruxelles.
    Doc. Raiffeisen-Holding NÖ-Wien

 

La Directive Européenne sur l'Efficacité Energétique des Bâtiments (neufs) prévoit que les bâtiments publics neufs – c'est-à-dire propriétés d'une collectivité territoriale ou d'un organisme public – devront être Bepos ou Bâtiments à Energie Positive dès le 1er janvier 2019, suivis le 1er janvier 2020 de tous les bâtiments neufs. Il demeure pour l'instant un grand flou européen quand à savoir ce qu'est précisément un bâtiment Bepos.

 

On se rend bien compte, par exemple, qu'en l'état actuel des technologies, une tour de bureaux ne peut être à énergie positive. Même si elle consomme peu, et c'est très relatif, on ne sait pas pour l'instant produire suffisamment d'électricité photovoltaïque ou éolien sur site pour la rendre Bepos.

 

La méthode de “l’écart autorisé”

 

Il faut donc mettre au point une méthode qui sache prendre en compte tous les cas particuliers et ils seront nombreux. En France, Effinergie a eu l'idée de « l'écart autorisé » qui figure dans la définition du label Bepos Effinergie.

 

Cela consiste en gros, selon le type de bâtiment, à ne pas compter une partie de la consommation de manière à ce que le solde puisse être compensé et le bâtiment atteindre ainsi l'état ineffable du Bepos. Cet écart autorisé est par exemple nul dans le cas d'une maison individuelle, mais important dans le cas d'une tour de bureaux.

 

A l'inverse, Effinergie s'écarte de la règle des 5 usages consacrée par les RT françaises successives et tente de comptabiliser toutes les consommations d'énergie. On sent que les membres du Cstb qui ont imaginé l'approche Bepos Effinergie ont été éduqués chez les jésuites : rigueur, mais pragmatisme et souplesse quand même.

 

 

  1. La tour “Skyline am Leopoldstädter” atteint le standard Passivhaus grâce à une façade très performante, faisant largement appel à de la ventilation naturelle et au free-cooling, grâce à des ventelles motorisées et pilotées par la GTB.
    Doc. Raiffeisen-Holding NÖ-Wien

 

 

  1. La tour « Skyline am Leopoldstädter » affiche des besoins de chauffage prévisionnels de 14 kWhEP/m².an et une consommation d'énergie tous usages calculée de seulement 117 kWhEP/m².an.
    Doc. Raiffeisen-Holding NÖ-Wien

 

 

  1. Comme beaucoup de bâtiments, la tour de bureaux Exzenterhaus à Bochum vise le niveau passivhaus, mais sans être certifiée. On ne sait donc pas vraiment si les buts poursuivis sont atteints. La tour est équipée d'une façade très performante avec ventilation naturelle et vitrages Interpane à très fort contrôle solaire.
    Doc. Interpane



PassReg, un programme européen




Sans doute plus luthérien, le Passivhaus Institut a adopté une autre démarche. Et réitère sa profession de foi : un bâti aussi faiblement consommateur que possible, bien étanche à l'air, équipé de systèmes techniques à très haute efficacité, de solutions à faible consommation (ventilation naturelle, puits canadien, climatisation solaire à absorption, etc.) et pourvu d'une production photovoltaïque massive doit logiquement aboutir au Bepos, en comptant au passage toutes les consommations d'énergie.

 

Toutes ? Toutes !  L'idée de l'écart autorisé semble hérétique dans ce cadre. Le Passivhaus compte tout. D'où sa prescription d'électroménager classe A++ en logement et sa promotion d'équipements informatique certifiés “Energy Star” en tertiaire. Pour l'instant, ce n'est qu'un vœux pieu.

 

Il n'existe pas encore de tour de bureaux Bepos au sens du Passivhaus Institut, ni même de tour nZEB ou “Near-Zero Energy Building” (bâtiment à énergie quasi nulle) selon le vocabulaire de la Directive sur l'Efficacité Energétique dans Bâtiments et pas davantage de tour Bepos au sens d'Effinergie.

 

Elithis se lance toutefois dans la construction à Strasbourg d'une tour de logements dont il promet qu'elle sera Bepos et livrée début 2016. Le Passivhaus Institut, pour sa part, pilote le programme européen PassReg (Passivhaus + énergie renouvelable, passreg.eu) pour justement parvenir à une définition et à de vraies réalisations de bâtiments nZEB.

 

Deux opérations suivies en France

 

PassReg est destiné à mettre en avant des réalisations passives accompagnées d'ENR (énergies renouvelables) à travers toute l'Europe et à inciter les collectivités territoriales à embrasser ce standard.

 

Deux opérations sont suivies pour la France au titre de ce programme : un immeuble de bureaux de 7 niveaux à Bordeaux Euratlantique, près de la gare, conçu par le cabinet d'architecture Nicolas Laisné Associés et réalisé par le groupe de promotion immobilière Pichet, une maison individuelle passive conçue par le BE Carbone 64 de Saint-Jean de Luz et construite à Arcangues (64).

 

Le bâtiment de bureaux de Bordeaux offre 4500 m² de surface habitable. Il est équipé de pompes à chaleur géothermiques et profite du géo-cooling en été : les pac son arrêtées et by-passées, un échangeur à plaques récupère le froid des capteurs enterrés chargés en eau glycolée et le distribue dans le bâtiment.

 

Les besoins de chauffage annuels sont évalués à 20,2 kWhEP/m².an. Les besoins totaux en énergie primaire ne devraient pas dépasser 51 kWhEP/m².an. La maison individuelle, quant à elle, dispose d'un blog qui lui est consacré. Construite en 2012, occupée en 2013, cette maison fait l'objet d'un monitoring qui devrait faire connaître sous peu son bilan énergétique des années 2013 et 2014.

 

 

  1. La tour Elithis Danube à Strasbourg devrait atteindre le niveau Bepos au coût de la RT2012.
    Doc. Elithis

 

 

  1. Avec 50 m de haut, 66 logements, 4500 m² de surface habitable, 600 m² de commerces en RDC, la tour Elithis Danube est décrite comme extrêmement performante, mais sans que l'on sache exactement quelles sont les solutions mises en œuvre.
    Doc. Elithis

 

 

  1. Avant la  tour “Skyline am Leopoldstädter” à Vienne, le plus haut bâtiment de bureaux certifié Passivhaus était la tour LCT One (LifeCycle Tower) à Dornbirn dans le Foralberg en Autriche. Le bâtiment R+7 est construit entièrement en bois à l'aide de panneaux préfabriqués et d'une ossature en poteaux lamellés collés.
    Doc. CREE GmbH

 

 

  1. La tour LCT One (LifeCycle Tower) affiche un besoin de chauffage de 15  kWhEP/m².an et des consommations totales prévisionnelles de 117  kWhEP/m².an.
    Doc. CREE GmbH

 

Sinfonia, les villes bas carbone

 

Le Passivhaus Institut participe également au projet européen Sinfonia “Low Carbon Cities for Better Living” (http://www.sinfonia-smartcities.eu/en/project). Ce projet a pour but de développer des solutions aisément reproductibles pour réduire la consommation énergétique des villes, tout en accroissant la part des ENR dans leur bilan annuel.

 

Sinfonia est né de la collaboration entre Innsbrück (Autriche) et Bolzano (Italie). Ces deux villes ont depuis été rejointes par Pafos (Chypre), Rosenheim (Allemagne), Séville (Espagne), Borås (Suède) et La Rochelle (France). Toutes ces villes veulent développer leurs réseaux de chaleur et de froid urbains, les alimenter autant que possible par des ENR, tout en rénovant les bâtiments de plusieurs quartiers pilotes.

 

Séville est par exemple pionnière dans l'alimentation des réseaux urbains chaud et froid simultanément grâce à d'énormes pompes à chaleur à absorption fabriquées par Panasonic (ex-Sanyo) et distribuées en Europe par Carrier. La Rochelle dispose d'un réseau de chauffage urbain, partiellement alimenté par des ENR (bois et solaire thermique).

 

Le rôle moteur du Passivhaus Institut dans Sinfonia réside dans son expertise de la rénovation performante, d'une part, dans le fait que le second établissement de l'institut se trouve à l'Université d'Innsbrück, d'autre part.

 

Le Passivhaus Institut participe à d'autres programmes européens : EuroPhit pour la rénovation au standard Passivhaus, le programme PEP pour la promotion des constructions passives européennes, le projet Passive-On pour développer des bâtiments à très faibles consommations d'énergie dans le sud de l'Europe et 3encult pour la meilleure rénovation énergétique possible des bâtiments historiques classés. Tout cela vise à promouvoir le standard Passivhaus dans la perspective des bâtiment nZeb ou Bepos de 2018-2020.

 

 

  1. A travers le progrtamme européen Sinfonia, la ville d'Innsbrück tente de réduire les consommations d'énergie de ce quartier pris dans la boucle du fleuve de 20,%, grâce à la rénovation de nombreux bâtiments au standard Passivhaus, tout en portant la part des énergies renouvelables dans son mix énergétique à 30%.
    Doc. The Urban Institute




Source : batirama.com / Pascal Poggi

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