Des travailleurs roumains détachés sur le chantier du terminal méthanier de Dunkerque pourraient être illégalement sous-payés, selon une enquête de l'inspection du Travail.
"D'après les premiers éléments, on trouve des suspicions importantes sur des travailleurs détachés", a confirmé une source proche de l'enquête, à la suite d'informations parues dimanche dans La Voix du Nord. Les soupçons concerneraient les salaires de travailleurs roumains employés par une entreprise sous-traitante italienne.
"On a des fiches de paie de quelques centaines d'euros pour pas mal d'heures passées sur le chantier", apprend-on. Alors que le salaire initial paraît normal, le différentiel pourrait s'expliquer par plusieurs retenues.
"Ce sont des retenues inexplicables et monstrueuses! A quoi sont conditionnées ces retenues? On cherche à le savoir..." continue cette même source. Au final, certains salaires avoisineraient les 300 euros. S'y ajouteraient des heures de travail bien supérieures au cadre légal, pouvant parfois approcher les 60 heures par semaine.
Ces travailleurs seraient bien déclarés mais "il existerait une distorsion entre les heures de travail déclarées et celles qu'ils font en vrai". "L'enquête vient à peine de commencer et ne sera certainement pas terminée avant le mois d'octobre", mais ces infractions "constituent bien un secret de polichinelle", avance-t-elle. "Je ne suis pas étonnée", affirme Fabienne Deroy, déléguée CFE-CGC au terminal. "On le savait depuis un an et demi et le problème a été régulièrement soulevé auprès de la direction, qui n'a jamais réagi".
En décembre 2013, des syndicalistes de la CGT et de la CFE-CGC d'entreprises dunkerquoises, écartées du marché, accusaient déjà la direction du chantier d'employer une forte proportion de travailleurs étrangers à moindre coût.
La direction assumera ses responsabilités
La direction de Dunkerque LNG préfère ne pas s'avancer avant de connaître les conclusions de l'enquête. "A ce stade, nous ne constatons pas d'écart (de salaires, ndlr) et mettons tout à disposition pour faciliter l'enquête", selon une porte-parole. Si des malversations étaient découvertes, la direction s'engage néanmoins "à prendre des mesures", sans en dévoiler leur contenu.
"C'est notre chantier, on ne peut pas rester les bras croisés face à des infractions du droit du travail, si elles étaient avérées", poursuit la direction, qui n'entend pas "se dégager de ses responsabilités".
En septembre, le parquet de Dunkerque avait classé sans suite une précédente enquête sur des sociétés soupçonnées de ne pas respecter la réglementation européenne en matière d'embauche de salariés étrangers. Les syndicats les soupçonnaient notamment de ne pas avoir déclaré leurs salariés dits détachés et de les faire travailler beaucoup plus que ne le prévoit la réglementation européenne.
Le chantier du terminal méthanier de Dunkerque, deuxième plus gros projet industriel de France après le réacteur EPR de Flamanville (Manche) selon EDF, qui a débuté en octobre 2012, sera achevé en novembre et accueillera le premier méthanier pour des tests cet été. Près de 1 700 salariés y sont employés chaque jour, dont 33% de Français.
Source : batirama.com / AFP