Le Label RSE Scop BTP a été lancé cet été par la Fédération des Scop du BTP et Afnor Certification.
Ce référentiel ouvre des pistes d’amélioration précieuses pour les Scop. C’est aussi une aubaine pour tous les acteurs du secteur, qui peuvent s’en inspirer. Fruit d’un partenariat engagé en 2012 entre la Fédération des Scop du BTP et Afnor Certification, le label RSE Scop BTP est un signe de reconnaissance de la maturité RSE d’un organisme.
Il s’appuie sur le modèle d’évaluation Afaq 26.000, qui traduit la norme volontaire internationale de la responsabilité sociétale Iso 26.000. L’objectif est ambitieux : 50 coopératives labellisées en juin 2016. Mais il est réaliste au regard des demandes de labellisation qui affluent déjà. Précisions avec Olivier Diard, délégué général de la Fédération des Scop du BTP.
| Olivier Diard, Délégué général de la Fédération des Scop du BTP, a signé avec Franck Lebeugle, Directeur général d’Afnor Certification, la convention de déploiement du dispositif sur les territoires le 11 juin 2015. |
Batirama : Qu’est-ce qui a motivé votre engagement dans la RSE ?
Olivier Diard : Les Scop du Bâtiment sont porteuses d’une éthique économique et sociale forte qui les rend particulièrement sensibles au développement durable par les valeurs de partage, de respect, d’entraide et de solidarité qu’elles mettent en avant.
Ces valeurs fondent leurs principes de responsabilité collective pour répondre aux enjeux majeurs et aux principaux défis du XXIe siècle pour les générations futures. La filière de la construction est très concernée par les questions environnementales et sociétales.
En quoi le Bâtiment est-il particulièrement concerné ?
Notre secteur est le plus gros consommateur d’énergie et produit beaucoup de déchets. Les entreprises doivent mieux prendre en compte le contexte réglementaire, particulièrement sur l’efficacité énergétique et la lutte contre le bruit.
La RSE répond à notre démarche, en promouvant des solutions permettant de produire des bâtiments sobres en consommation d’énergie et privilégiant le recyclage en fin de vie. Le risque associé à nos métiers requiert aussi une prise en compte particulière des conditions de travail et de sécurité.
De bonnes pratiques peuvent être mises en place pour préserver l’environnement de travail des salariés tout en améliorant la performance sociale. Enfin, l’entreprise du Bâtiment joue un rôle déterminant dans l’économie locale. Mettre en place une démarche RSE lui permet de répondre aux interrogations de ses différents partenaires.Qu’apporte le label à une entreprise du BTP ?
Il permet d’anticiper la règlementation, en ayant une longueur d’avance sur la législation environnementale ou sociale. D’accéder à de nouveaux marchés orientés vers le développement durable car les donneurs d’ordre intègrent de plus en plus des critères RSE dans leurs appels d’offres ou dans leurs contrats.
Notre fédération milite pour une inscription dans le Code des marchés publics des labels qui seront reconnus par l’Etat. Le label permet aussi d’accéder plus facilement à des financements car les financeurs accordent de plus en plus leur confiance aux entreprises “vertueuses”.
Les Scop de Bâtiment “responsables” affichent une meilleure implication des équipes, une baisse du turn-over et de l’absentéisme mais aussi une réduction des accidents de travail.
Cette démarche ne représente-t-elle pas un investissement trop lourd ?
Les coûts de mise en place de la démarche RSE sont rentabilisés par les bénéfices obtenus en matière d’amélioration de la productivité, d’une plus grande efficacité liée à l’utilisation des ressources, d’une moindre consommation d’énergie et d’eau, et d’une meilleure gestion des déchets.
La RSE doit être pensée comme un investissement durable ! L’image de l’entreprise est aussi dynamisée car elle donne des preuves crédibles de son engagement à ses clients, fournisseurs et partenaires. Les risques environnementaux, juridiques, financiers, sociaux ou d’image sont mieux maîtrisés car la Scop identifie et prévient les impacts de ses activités.
TEMOIGNAGE
| Félicie Domène est gérante de Regabat, une Scop au statut de Coopérative d’Activité et d’Emploi. Cette coopérative du Tarn emploie 10 personnes pour accompagner une centaine d’entrepreneurs du Bâtiment dans l’exercice de 50 métiers différents. |
« La démarche RSE a changé notre regard sur notre entreprise »
« Regabat est une des premières structures à avoir expérimenté le dispositif d’évaluation Afaq 26.000, testé en Midi-Pyrénées depuis 2011. Nous avons passé l’évaluation en 2012 et reçu un Trophée RSE de la Fédération en 2013.
En nous lançant dans la démarche, nous voulions évaluer notre entreprise sur tous les champs de la RSE. Le plan d’actions mis en place sur 3 ans a fait évoluer nos pratiques, avec notamment un travail sur la santé et la sécurité au travail.
Nous avons à présent un document unique d’évaluation des risques spécifiques à chaque métier. Autre exemple : nous avons travaillé sur la gestion des déchets de chantier.
Un projet porté par le dirigeant d’entreprise
Je trouve la démarche RSE très pertinente. Cependant, elle ne doit pas être entreprise sans une implication très forte du dirigeant d’entreprise, qui porte littéralement le projet. Elle nous a donné des points de repère et a beaucoup revalorisé l’image de l’entreprise en interne, montrant à chacun qu’il faisait partie d’un tout cohérent.
Autre point très positif : l’organisme évaluateur a mis en relation les entreprises du territoire qui ont initié la démarche. Le partage d’expériences a été très enrichissant.
« Une période douloureuse »
Cependant, plus de la moitié des membres de la coopérative a été renouvelée à la suite de la démarche, car beaucoup n’y ont pas réellement adhéré, bien qu’ils l’aient validée au départ. Ils nous ont quittés car ils n’ont pas compris ou accepté les changements intervenus au sein de la coopérative.
Cela a donc aussi été une période douloureuse… Je pense qu’il faudrait un accompagnement au changement de “l’après RSE”. Début 2016, nous renouvellerons l’évaluation Afaq 26.000, avec l’obtention du label à la clé. Cette fois, je tiens à ce que tous les collaborateurs participent. Car même si cela prend plus de temps, la valeur pédagogique de la démarche est très importante pour nous. »
Obtenir le label RSE Scop du BTP
Adaptée à toutes les tailles d’entreprise et à tous les métiers, la démarche vers la labellisation se déroule en 4 étapes.
- Information et découverte de la RSE
La Fédération des Scop du BTP et Afnor Certification organisent des sessions de formation pour découvrir le concept de la RSE, les enjeux et les bénéfices de la démarche.
- Préparation de l’évaluation
Un guide décrypte le modèle et les critères de l’évaluation Afaq 26.000 appliquée au BTP et le traduit en actions concrètes. Les Scop peuvent évaluer leur niveau de maturité RSE sur www.scopbtp.org. Des évaluateurs Afnor délivrent une note et indiquent les points forts et les pistes de progrès.
- L’évaluation
Le modèle d’évaluation Afaq 26 000, le plus abouti du marché, note sur 1.000 points. Il donne un niveau de maturité dans la démarche RSE : Initial (jusqu’à 300 points), Progression (301 à 500 points), Confirmé (501 à 700 points), Exemplaire (>701 points). L’évaluation Afaq 26.000 est valable 3 ans. Un rapport d’évaluation, outil de pilotage stratégique et opérationnel est remis à la Scop. Les conseils et pistes d’amélioration sont concrètement déclinables en plan d’actions.
- La labellisation
Les résultats de cette évaluation servent de base au dossier de candidature à la labellisation RSE Scop BTP, soumis à un Comité de labellisation composé d’acteurs institutionnels et associatifs représentatifs.
Les Scop du BTP
La Fédération des Scop du BTP, créée en 1946, en regroupe 600 (soit 98% des Scop du BTP), qui totalisent 20.000 salariés, dans tous les métiers du BTP, et “pèsent” 8 milliards de CA. 40% ont moins de 10 salariés.
Le nombre de Scop du BTP progresse de 3% par an depuis 10 ans. Juridiquement, une Société Coopérative et Participative est de forme SA, Sarl ou SAS. Les salariés sont associés majoritaires (au moins 51% du capital social et 65% des droits de vote) et élisent leur dirigeant.
La prise de décision est basée sur le principe “d’une personne = une voix”. Le profit est réparti en une part pour tous les salariés, sous forme de participation et d’intéressement ; une part pour les salariés associés, sous forme de dividendes ; une part pour les réserves, impartageables, qui servent à consolider les fonds propres et à assurer la pérennité de l’entreprise.
Les co-entrepreneurs sont rémunérés de leur travail et de leur apport en capital, mais à leur départ, celui-ci leur est remboursé sans plus-value.
Source : batirama.com / Emmanuelle Jeanson