Le marché des isolants biosourcés arrive à maturité. Les produits certifiés, avec un bilan carbone sans pareil et une filière qui se structure, ont un avenir radieux devant eux.
En France, le marché de l’isolation est dominé par les isolants minéraux (laine de verre, laine de roche) et synthétiques (PSE, polyuréthane…). Trois raisons à cela : des industriels bien implantés, des produits qui répondent à la demande et des prix compétitifs.
Pourtant, depuis une dizaine d’années, des challengers leur grignotent des parts de marché : les isolants biosourcés.
Trois raisons à cela : des produits de qualité qui répondent à toutes les contraintes et dont les propriétés intrinsèques apportent davantage que la simple isolation (inertie, perspirance, hygrorégulation…), des systèmes fabriqués à l’aide de matières premières naturelles dotées d’un écobilan sans comparaison, une compatibilité avec tous les modes constructifs.
Fort potentiel
Autre raison de leur essor, l’intérêt grandissant des maîtres d’ouvrage et d’œuvre pour la construction bois et, plus généralement, pour des constructions réalisées avec des produits d’un impact moindre sur l’environnement.
Sans oublier l’action des pouvoirs publics. Ces derniers ont mis en place des outils pour promouvoir cette filière constituée de PMI et PME qui produisent localement et valorisent des produits ou sous-produits agricoles.
Ainsi, en mars 2010, la filière des matériaux biosourcés a été identifiée par le Commissariat général au développement durable (CGDD), comme l’une des 18 filières vertes ayant un potentiel de développement économique élevé pour l’avenir, notamment en raison de son rôle pour diminuer notre consommation de matières premières d’origine fossile, limiter les émissions de gaz à effet de serre et créer de nouvelles filières économiques.
Croissance verte
Plus récemment, la loi du 17 août 2015, relative à la transition énergétique pour la croissance verte, a confirmé l’intérêt de l’usage de ces matériaux pour des applications dans le secteur du bâtiment, en précisant dans son article 5 que « l’utilisation des matériaux biosourcés concourt significativement au stockage de carbone atmosphérique et à la préservation des ressources naturelles » et qu’« elle est encouragée par les pouvoirs publics lors de la construction ou de la rénovation des bâtiments ».
Comment convaincre vos clients
Pourquoi choisir cette solution
• Les isolants biosourcés, comme les autres, répondent aux exigences du cadre réglementaire et normatif français et européen et sont, comme les autres, éligibles aux aides de l’état (CITE et Eco Ptz).
• Suivant les produits, leurs performances sont quasi équivalentes avec, en plus, des propriétés qui leur sont propres, telles l’inertie ou des propriétés d’hydrorégulation.
• En recourant aux produits biosourcés issus de matières premières renouvelables, vous apportez votre pierre à la lutte contre le réchauffement climatique (stockage du CO2) et contribuez au développement, à l’échelle locale, d’une économie s’appuyant sur un triptyque agriculture-industrie-bâtiment.
Quel budget prévoir ?
A ce jour, la botte de paille et, dans une moindre mesure, la ouate de cellulose insufflée ou soufflée sont les seuls isolants biosourcés à pouvoir rivaliser, à l’achat, avec les isolants type laines minérales d’entrée de gamme. Pour les autres produits, panneau de fibre de bois flexible, fibre de lin, laine de bois ou de chanvre, les coûts à l’achat sont semblables voire un peu plus élevés que ceux des isolants “traditionnels” haut de gamme. Les panneaux fibres de bois sont en haut de l’échelle, mais ils apportent bien plus qu’une simple isolation.
Le coût de la pose ne change pas en revanche, ces produits ayant des mises en œuvre semblables à celles des isolants non biosourcés.
L’avis d’un représentant d’industriel
Yves Hustache, animateur de l’Association syndicale des industries de l’isolation végétale (Asiv)
« Notre objectif dans les cinq ans : doubler nos parts de marché »
Batirama : Où en est le marchédes isolants biosourcés ? Avez-vous une bonne connaissance des différents marchés en fonction des produits et des applications intérieures ou extérieures ?
Yves Hustache : « Je dirais qu’aujourd’hui le marché des isolants biosourcés représente 5 à 8% du marché total de l’isolation. Avec leur constante augmentation, nous sommes sortis d’un marché de niche. Notre objectif, dans les cinq ans, est de doubler les parts de marché.
Malheureusement, pour le moment, nous disposons de peu de chiffres, à la fois sur la répartition entre les différents types de produits –lin, chanvre, fibre de bois ou encore ouate de cellulose– et sur la répartition entre isolation par l’intérieur et par l’extérieur.
Je dirais que nous sommes sans doute à plus de 70%, voire 80%, à l’intérieur. L’isolation par l’extérieur avec des biosourcés se développe, mais il y a encore quelques questions à régler sur le plan réglementaire, notamment avec l’IT 249* en façade. »
Batirama : Pourquoi, et que mettez-vous en place pour régler ce problème ?
« Le syndicat pense que les isolants vrac, rouleau ou panneau, ont un avenir en façade. Mais certaines interprétations de l’IT 249 constituent encore un frein à leur utilisation. C’est pourquoi nous avons initié, avec le ministère de l’Environnement, des travaux dans le cadre du Plan bois.
Cela passe par un état des lieux et une campagne d’essais complémentaires. Il s’agit d’étudier une conception adaptée de la paroi, notamment en façade ventilée, qui intègre la problématique incendie et qui nous permettra de caractériser les produits et mieux faire comprendre ces solutions par rapport au feu. »
Batirama : Avez-vous d’autres chantiers ?
« Oui, nous travaillons sur les règles professionnelles de façon à créer un cadre qui puisse rassurer. Plus globalement, nous nous attachons à faire reconnaître les qualités et propriétés des produits biosourcés, qui ne se limitent pas à la conductivité thermique.
Par exemple, nous nous efforçons de faire intégrer les problématiques de transfert de la vapeur d’eau à la réglementation.
Ce qu’en dit la réglementation
© Isocell
Les isolants biosourcés sont, pour la plupart, certifiés Acermi. Cette certification est le résultat d’un double engagement entre le fabricant –mise en place d’un système qualité et des moyens pour la contrôler– et le certificateur qui garantit la véracité des caractéristiques et les réévalue. Ce certificat a une durée de validité de 2 ans. Cette certification n’est pas la seule, notamment pour que les clients puissent bénéficier des dispositifs d’aide.Les fabricants se tournent de plus en plus vers la certification européenne Keymark, appelée également marque européenne CEN/Cenelec. Marque de certification volontaire, par tierce partie, elle donne l’assurance qu’un produit répond aux exigences spécifiées dans les normes européennes du CEN et du Cenelec qui le concernent.
Le Grenelle 1 prévoyait de favoriser l’utilisation de matériaux biosourcés. C’est chose faite avec l’instauration du label “bâtiment biosourcé”, qui est destiné aux bâtiments neufs intégrant un taux minimal de matériaux biosourcés. Il définit trois niveaux d’exigence en fonction d’un taux minimal d’incorporation de matière biosourcée exprimée en kg/m2 de surface de plancher et selon le type d’usage du bâtiment (individuel, industrie ou autre type). Le premier niveau exige l’utilisation d’au moins deux matériaux biosourcés, remplissant des fonctions différentes. Les deux autres niveaux exigent la mise en œuvre d’au moins deux familles de produits pour les menuiseries, le gros œuvre ou encore les aménagements intérieurs.
BBCA. Présenté comme une première mondiale par l’Association éponyme, le Cstb et Certivéa, et délivré à partir de mars 2016, le premier label Bâtiment bas carbone (BBCA) complète les dispositifs d’évaluation de la performance environnementale déjà existants. Basé sur l’analyse du cycle de vie, il s’appuie sur les travaux collectifs de la filière et de l’Etat, en particulier la démarche HQE Performance. Les objectifs de l’association BBCA sont ambitieux : division par deux de l’empreinte carbone des constructions et mise en lumière des innovations qui permettent de réduire les émissions du bâtiment. Inutile de dire que les isolants biosourcés sont en première ligne.
Source : batirama.com / Stéphane Miget / ©photo d'ouverture : Isonat