L?architecte ayant donné de mauvaises recommandations et la commune les ayant suivies, ils ont été jugés coresponsables des dommages constatés lors de la réception des travaux.
Dans cette affaire, cinq entités étaient impliquées : la commune de Menton qui avait commandé la construction du musée Jean Cocteau ; la société M.G. architecte, son maître d’œuvre ; la société James Ebénisterie, chargée de la partie « aménagement et mobilier muséographique » ; la société RPM Bailly, chargée de la partie « revêtements muraux, peintures et sols souples » ; et enfin la société de nettoyage Egnis, en contrat avec la commune.
À la fin des travaux, ceux-ci sont réceptionnés avec réserves, et moins d’un an plus tard, la commune de Menton fait dresser deux procès-verbaux, constatant une détérioration significative du sol en PVC.
Afin d’obtenir réparation de son préjudice, la commune de Menton assigne en justice les quatre sociétés. Or, le Tribunal administratif de Nice condamne exclusivement la société James Ebénisterie à la réparation intégrale du préjudice, à savoir, une somme de 92 094,44 euros.
Appel de la société James Ebenisterie comme la ville de Menton
La société James Ebénisterie fait alors appel de cette décision et la Cour d’Appel, dans son arrêt du 12 décembre 2016, juge que les cinq entités, y compris la commune de Menton, ont une responsabilité dans l’avènement du dommage, et qu’elles en sont donc chacune responsable à hauteur de 20%.
Chaque partie est donc condamnée à payer à la commune de Menton la somme de 18 418,89 euros, pour une indemnisation totale de 73 675,20, soit 20% de moins qu’en première instance, correspondant aux 20% de responsabilité incombant à la commune.
Pour arriver à ce résultat, la Cour d’Appel s’appuie tant sur les procès-verbaux de la réception des travaux, que sur le rapport d’expertise établit par l’assureur de la commune de Menton.
Une réception des travaux avec réserves
Dans son arrêt, la Cour cite le procès-verbal de réception de la prestation de la société James Ebénisterie, lequel mentionne la réserve suivante : " taches jaunes sur le sol ". Or, l’instruction a révélé que ces taches avaient bien été causées par la société James Ebénisterie. La Cour en conclut donc que cette société n’a pas rempli la totalité de ses obligations contractuelles envers la commune.
La Cour examine ensuite la prestation de la société RPM Bailly et indique qu'il ressort du procès-verbal de réception que le sol posé comportait des différences de couleur dans les lés, qu'un joint de sol était mal fait, et que des poinçonnements avaient été relevés.
La Cour en déduit donc que la société RPM Bailly n’a pas non plus rempli la totalité des obligations découlant de son contrat avec la commune.
Le rapport d’expertise de l’assureur de la commune
La Cour reprend ensuite le rapport d’expertise de l’assureur de la commune. Celui-ci met en lumière deux causes supplémentaires à l'origine de la dégradation du revêtement de sol.
Premièrement, le choix du revêtement de sol en lui-même. Ce dernier était inadapté pour un musée. Or, il appartenait à la société M.G. Architecte d’attirer l'attention de la commune sur les conséquences prévisibles de ce choix.La Cour estime donc là encore que la société M.G. Architecte n’a pas rempli la totalité de ses obligations contractuelles, et que sa responsabilité est engagée.
Deuxième cause révélée par le rapport d’expertise : le mauvais emploi de disques de monobrosse par la société Egnis, chargée du nettoyage. La Cour considère qu'il lui appartenait, comme entreprise de nettoyage, de prendre toutes dispositions pour assurer un entretien des sols dans les règles de l'art. La Cour en conclut donc que la société Egnis est également responsable.
La commune coresponsable de son propre préjudice
La Cour estime enfin que la responsabilité de la commune de Menton est également engagée pour les motifs suivants : avoir accepté les choix de revêtement et de mobilier ; et ne pas avoir fourni à la société de nettoyage les notices d'entretien des sols.
Cette partie de décision semble contestable. En effet, lorsqu’un dommage survient à l’occasion d’une prestation passée entre deux professionnels d’un domaine, le partage de responsabilité, fréquent, semble équitable. L’obligation de conseil du prestataire se trouvant allégée par le niveau de connaissance du client.
Mais il ne saurait en être de même de toute prestation passée entre une commune et un prestataire de service, sauf à considérer que la commune est un professionnel de tous les domaines concernés, ce qui ne saurait être le cas.
Source: Cour administrative d'appel, Marseille, 6ème chambre, 12 Décembre 2016, n° 15MA02783
Source : batirama.com / Damien Aymard