Le fournisseur n?ayant pas informé l?entrepreneur de l?inadéquation du matériel vendu par rapport à l?usage qu?il voulait en faire, doit le garantir des dommages ainsi causés.
Les époux J. avaient confié à Monsieur L. la mise en œuvre d'un enrochement pour soutenir le talus séparant leurs parcelles de la propriété voisine située en contrebas. Monsieur L. s’était alors adressé à la société Colas Sud-Ouest-centre Socaro (Colas), qui lui avait fourni 160 tonnes de blocs calcaires.
Une fois l’enrochement mis en œuvre, les époux J. ont constaté une désagrégation de l'ouvrage. Ils se sont alors adressés au juge des référés qui a désigné un expert.
Ce dernier a constaté que la quasi-totalité des blocs de pierre était affectée d'un phénomène de délitage engendré par les effets du gel et du dégel. Les roches éclataient, ce qui provoquait la chute de pierres au pied du talus.
Un vice de blocs constaté
L’expert en conclut que les désordres sont la conséquence d'un vice des blocs mis en œuvre et constitués de calcaire gélif. En effet, ce matériau calcaire ne convient pas à un enrochement ayant une fonction de soutènement.
Il termine en relevant le danger que représente la chute des éclats de roche ainsi que le caractère évolutif des désordres qui entraînera, à terme, la ruine de l'ouvrage.
À la lecture du rapport, les époux J. portent l’affaire en justice, et le Tribunal de Grande Instance de Rodez condamne solidairement Monsieur L. et la société Colas à indemniser les époux J.. Il ajoute que la société Colas devra garantir Monsieur L. de toutes condamnations mises à sa charge envers les époux J.
Appel de la décision par la société Colas
Cela signifie que les époux J. pourront réclamer la totalité du montant de l’indemnisation à Monsieur L. ou à la société Colas, mais que si Monsieur L. vient à leur payer tout ou partie de la condamnation, la société Colas devra lui rembourser les sommes. La société Colas fait alors appel de cette décision.
Mais la Cour d’Appel de Montpellier dans son arrêt du 27 avril 2017 confirme la portée de cette décision. Pour se faire, la Cour considère que la société Colas avait envers Monsieur L. une obligation d'information et de conseil, même si Monsieur L. est un professionnel.
En effet, la compétence de ce dernier ne lui donnait pas les moyens d'apprécier la portée exacte des caractéristiques techniques des biens acquis.
S'informer sur la destination des blocs de pierre
Par conséquent, la société Colas devait attirer son attention sur les qualités du matériau choisi compte tenu de l'usage auquel il était destiné et, pour cela, s'informer de ses besoins afin de lui vendre un matériau apte à atteindre le but recherché.
Sans s'informer sur la destination des blocs de pierre vendus à Monsieur L., la société Colas, en sa qualité de producteur de la matière première, a vendu des matériaux gélifs alors qu'ils devaient être mis en œuvre pour réaliser un enrochement dans une région où les températures hivernales sont très basses.
La société Colas devra donc bien garantir Monsieur L. des sommes qui pourraient lui être réclamées par les époux J.
Source : Cour d’Appel de Montpellier, 1ère chambre A, 27 avril 2017.
Source : batirama.com / Damien Aymard