Le congrès annuel de la filière française de la construction bois s?annonce comme un moment de rassemblement d?une filière bois tourmentée qui s?interroge sur son avenir.
Photo : Le grand site industriel de Swiss Krono à Sully-sur-Loire valorise désormais pour la production de panneaux OSB les feuillus locaux issus de coupes d’éclaircie. (Session inaugurale) ©JT
Attendu avec Julien Denormandie sur le salon à Dijon, Nicolas Hulot, l’actuel ministre d’Etat, est considéré comme le parrain, sinon le père du Grenelle de l’environnement, en 2007. Mais dix ans plus tard, cet événement et ses conséquences fondent-ils toujours la feuille de route de la construction bois en France ?
A l’époque, l’architecture bois était portée par une forte dynamique. La perspective d’une inévitable évolution vers l’efficience énergétique des constructions, voire de la prise en compte de l’énergie grise consommée par les matériaux de construction avant leur mise en œuvre, semblait promettre au bois un avenir glorieux.
Depuis, on continue certes de chanter les louanges du bois qui stocke du carbone, de l’incomparable efficacité énergétique de l’ossature bois à épaisseur égale, de l’intérêt qu’il y a à exploiter pour la construction le vaste massif français sous-exploité, et créant des emplois non délocalisables.
Mais sur le terrain, la réalité a repris le dessus. Et si le Forum Bois Construction parvient à s’épanouir d’année en année, ce petit monde reste très loin des objectifs de part de marché imaginés il y a dix ans, et qui semblaient d’ailleurs jouables au vu des évolutions constatées dans les pays voisins.
Construction de la nouvelle halle bois à l’Ensam de Cluny (Atelier C2 ) ©Ensam Cluny
La construction bois face au choc de l’offre
Avec le nouveau gouvernement, il a été question jusqu’ici de choc de l’offre, de gel réglementaire. Bâtir massivement pour faire baisser les prix de l’immobilier, et faire baisser les coûts de construction en simplifiant la réglementation.
On en oubliait presque l’échéance européenne de 2020 qui doit standardiser la construction Bepos en neuf, comme cela a été répété inlassablement pendant dix ans. Un objectif finalement reconnu du bout des lèvres, tout en faisant peser un doute sur l’opportunité d’un label E+C- « qui va plus loin que l’Europe ».
Le Plan Rénovation, qui devrait paraître incessamment, va-t-il permettre au bois de faire valoir ses atouts ? Le plan quinquennal de 80 000 logements étudiants, dont 20 000 pour de jeunes travailleurs, va-t-il se faire et offrir des opportunités à la construction bois en 2D ou 3D ?
L’intégration des principaux objectifs du plan PIA III de soutien à la filière, dans le cadre du projet de loi Elan, ne présente-t-il pas un risque face à la contestation que ce projet de loi suscite en général ?
Enfin, la reconduite du CSF Bois parmi les dix branches industrielles d’avenir et l’ambition de construire des filières compétitives, notamment à l’export, s’accorde-t-elle avec l’objectif de reconstruire une filière française de transformation du bois qui s’étende de l’arbre à la maison et au meuble, par une patiente approche de R&D qui valorise notamment les essences feuillues délaissées ?
Escalier en LVL de hêtre BauBuche pour le Centre Pompidou du Paris (Session inaugurale I) ©DR
Du Douglas pour les JO !
Face à une filière bois qui peine à retrouver sa dynamique d’antan, Nicolas Hulot, Ministre de la Transition écologique et solidaire, et Julien Denormandie, Secrétaire d'État auprès du Ministre de la Cohésion des territoires, auront l’occasion à Dijon de redéfinir une feuille de route ambitieuse et réaliste.
Leurs interventions en plénière d’ouverture s’intègrent dans une matinée dédiée aux politiques d’urbanisme favorables au bois en Europe. Ainsi, en Suède, en Finlande, en Autriche, en Allemagne, mais aussi en France, des villes prennent des initiatives concrètes et efficaces pour promouvoir le recours au bois, ce matériau emblématique de la ville durable du 21e siècle.
Architecture bois en feuillus avec du chêne thermo-chauffé (Session inaugurale I) © Michael Bizouard Architecte
Une étude inédite sur la ressource en chêne de qualité bois d'oeuvre
C’est en Bourgogne-Franche-Comté, à l’occasion du Forum, que sera signée la première déclinaison régionale de l’Alliance Bois Construction Rénovation Environnement qui a été scellée il y a un an au niveau national.
La région dispose avec Sylvain Mathieu d’un vice-président du Conseil régional, en charge de la filière bois. Ce dernier a relevé lors du congrès Aprovalbois de Dijon, en novembre dernier, la succession en 2018 d’événements comme le Forum Bois Construction en avril puis le salon Euroforest de l’équipement forestier en juin, décrétant l’année 2018 comme « année du bois ».
C’est l’année où sera publiée avec l’IGN une nouvelle étude inédite et d’abord régionale, portant sur la ressource en chêne de qualité bois d’œuvre. Les scieurs de feuillus de la région, qui manquent actuellement de grumes de chêne, ont fait pression pour disposer d’évaluations statistiques plus proches de la réalité.
Cap sur les systèmes constructifs en résineux
Malgré les tensions actuelles sur la ressource, la région est en première ligne des initiatives pour la valorisation des feuillus dans la construction, comme l’illustrera la troisième édition successive d’un colloque dédié précisément à ce sujet essentiel de la construction bois française.
Par contre, l’essentiel des projets réalisés qui seront présentés dans le cadre du programme de conférence se rapporteront à des systèmes constructifs en résineux, sans oublier que la région est l’un des principaux gisements de douglas, avec des peuplements qui arrivent à maturité juste pour les JO de 2024 à Paris.
De quoi inviter les organisateurs de ces jeux « bas carbone » à en faire largement usage dans leurs équipements, comme veut le suggérer un atelier thématique de clôture intitulé « C24, GL24, JO 24 », par référence aux classes de résistance mécaniques du bois d’œuvre et du bois lamellé-collé.
Consulter le programme détaillé du Forum International Bois Construction
Source : batirama.com / Jonas Tophoven