Cette question s?est posée dans une affaire concernant des particuliers qui ont décidé de faire construire une maison, en gérant directement les différents corps de métiers sur le chantier.
Les époux C. ont entrepris de faire monter sur un terrain leur appartenant, une maison acquise sous forme de kit en bois. La société G. en a réalisé le montage que Monsieur G. P. en réalisait l'isolation.
Les travaux sont réceptionnés sans réserve, seulement voilà, quelques années plus tard, les époux C. déplorent des défauts d'isolation. Une expertise judiciaire est alors diligentée et, au vu du rapport d’expertise, les époux C. décident de porter l’affaire en justice.
Les juges de première instance leur font droit et condamnent les entreprises prestataires à hauteur de 60% du dommage pour la société G., et 40% pour Monsieur G.P. Mais l’affaire va en appel.
Le maître d’ouvrage coordonnant les travaux devient-il maître d’œuvre ?
En effet, la société G. remet en cause le partage de responsabilité retenu par les premiers juges au motif que les époux C. ont agi en maître d'œuvre en se dispensant des services d'un professionnel, en dirigeant eux-mêmes les six corps de métiers intervenus sur le chantier et en coordonnant les travaux. Or, les époux C. sont respectivement vétérinaire et institutrice et n’ont donc aucune compétence en matière de construction !
Ils indiquent d’ailleurs que, tant la société G. que Monsieur G.P., qui avaient l'habitude de travailler ensemble, ont accepté d'intervenir sans jamais réclamer l'intervention d'un maître d'œuvre et ont coordonné ensemble leurs interventions respectives. Au demeurant, la société G. aurait pu réclamer l’intervention d’un maître d’œuvre et y subordonner sa prestation, si elle l'estimait indispensable, ce qu’elle n’a jamais fait.
L’absence de maître d’œuvre ne rend pas le maître d’ouvrage responsable
Au vu de tous ces éléments, la Cour d’appel a jugé que l'absence de recours aux services d'un architecte ou d’un maître d'œuvre, tout comme le fait de recruter différents corps de métier ne font effectivement pas du maître de l'ouvrage un maître d'œuvre.
Dans le cas précis qui nous occupe, la Cour constate en outre que les désordres rendant l'immeuble impropre à sa destination sont imputables à des malfaçons et insuffisances de pose, et ne sont donc pas liés à un problème de conception des ouvrages ou de coordination entre les corps de métier, de sorte qu'ils sont sans rapport avec une absence de maîtrise d'œuvre.
Sur le partage des responsabilités, l’expert affirme prépondérantes les fautes de la société G. en ce qu'elle n'a pas exécuté les travaux conformément aux règles de l'art et recommandations du fabricant, et retient dans une moindre mesure celles de Monsieur G. P. qui a accepté des supports inadéquats.
La Cour confirme donc que la société G. et Monsieur G.P. sont seuls responsables du dommage, à l’exclusion du maître d’ouvrage, et que le montant du dommage se répartit entre eux à raison de 60% pour l'entreprise et 40% pour l'artisan.
Cour d'appel d'Amiens, 30 janvier 2018
Source : batirama.com / Damien Aymard