Les réductions d'impôt consenties aux ménages qui achètent un logement en s'engageant à le louer à un loyer plafonds, sont peu efficaces et coûteuses pour les finances publiques, selon la Cour des comptes.
Après avoir enquêté sur les dépenses fiscales consenties de 2009 à 2016, en faveur de l'investissement locatif des ménages, la Cour appelle à "sortir progressivement et de manière sécurisée de ces dispositifs récemment reconduits" par le gouvernement, dans un référé adressé le 17 janvier au Premier ministre.
Elle préconise en revanche de "renforcer la place des investisseurs institutionnels dans la construction et la location de logements privés".Ces réductions d'impôt sur le revenu consenties aux bailleurs individuels ont un montant annuel inflationniste - passé de 606 millions d'euros en 2009 à 1,7 milliard en 2015 - et leurs bénéficiaires sont des ménages "dont les revenus sont relativement élevés, et même parfois importants", pointe la Cour.
Près de la moitié (45%) se situaient en 2013 dans la tranche d'imposition comprise entre 27.000 euros et 71.000 euros, et près du quart appartenaient aux 2,3% des foyers imposés disposant de 71.000 à 151.000 euros annuels.
Seulement 10 % de la production totale de logements pour la Cour
La Cour s'est penchée sur l'efficacité de ces dépenses fiscales, au regard des principaux objectifs qui leur ont été assignés: soutenir l'activité du secteur du bâtiment, et améliorer l'offre de logements locatifs. Selon les Sages, elles ont à la fois un "impact économique limité" et une "efficacité faible" pour accroître le nombre de logements locatifs accessibles: l'offre ainsi créée ne représente que 10%, soit une "faible part" de la production totale de logements.
Quant à "l'effet modérateur" que ces aides sont censées avoir sur les loyers du privé - car le bailleur a obligation de louer pendant plusieurs années à des prix inférieurs au marché - il n'a pas non plus été mesuré.En comparaison, d'autres dépenses publiques "permettent, à volume égal, d'augmenter plus durablement le parc de logement locatifs", pointe la Cour.
Selon ses calculs, le coût annuel pour les finances publiques d'un logement de 190.000 euros bénéficiant du "Pinel" est deux à trois fois plus élevé que celui d'un logement social comparable, "alors même que la durée des locations est, dans ces derniers cas, bien supérieure: 40 ans".
Ces dispositifs sont le "Périssol" (1996-1999), le "Besson", neuf et ancien, (1999-2002), le "Robien" et le "Robien" recentré (2003-2008), le "Borloo", neuf et ancien, (2006-2008), le "Scellier" et le "Scellier" intermédiaire (2009-2012), le "Duflot" (2012) et enfin le "Pinel" (2014).
La Fédération des promoteurs immobiliers réagit
De son côté la Fédération des promoteurs de l'immobilier a réagi à la publication du rapport. Elle dit partager les constats qui portent sur la faiblesse du pilotage, du suivi et du contrôle de ces dispositifs, qui trouve son origine dans l’insuffisance des données produites par les services fiscaux. Elle milite pour une plus grande transparence en la matière.
En revanche, elle ne partage pas les chiffres avancés par la Cour des comptes (les coûts budgétaires bruts annoncés ne tiennent pas compte des recettes fiscales dégagées par le Pinel (TVA et IS en particulier).
Enfin, elle note que "si des dispositifs fiscaux de soutien à l’investissement locatif des particuliers existent depuis 1984, c’est parce qu’ils répondent aux dysfonctionnements du marché locatif : désaffection durable des investisseurs institutionnels, faible rentabilité liée aux prix trop élevés et à une fiscalité excessive etc.
Dès lors, il ne sera possible, comme le recommande la Cour, de « mettre en œuvre des dispositions transitoires permettant une sortie progressive et sécurisée » de ces dispositifs, que si l’Etat agit au préalable pour permettre la baisse des coûts de production dans les zones tendues et pour refonder la fiscalité des bailleurs.
Source : batirama.com