L?union Européenne demande des bâtiments à énergie quasi-nulle en construction neuve à partir du 1er janvier 2021, sans définir l?énergie quasi-nulle. Chaque pays propose sa propre définition.
La Directive sur l’Efficacité Energétique des Bâtiments (refonte) 2010/31/UE du 19 Mai 2010, demande que la construction neuve soit « à énergie quasi-nulle », après le 31 décembre 2018 pour les bâtiments publics neufs, après le 31 décembre 2020 pour tous les bâtiments neufs.
L’article 9 de la Directive demande aux Etats membres, premièrement, d’adopter une définition du bâtiment à énergie quasi-nulle et, deuxièmement, de développer une stratégie pour promouvoir ce type de bâtiments. Deux moyens doivent être principalement mis en oeuvre : réduire les besoins d’énergie des bâtiments et produire de l’énergie renouvelable sur site, tout cela en optimisant les coûts (art. 5 et 2.14, Annexe 1).
La France, de manière audacieuse ou irréfléchie, c’est selon, a traduit « énergie quais-nulle » par Bepos ou Bâtiment à Energie Positive. Ce qui paraît encore plus stricte.
Les besoins de chauffage d’Heliotrop atteignent 21 kWh/m².an pour la partie tournante et 47 kWh/m².an pour le sous-sol en béton. © Rolf Disch
Les travaux des pionniers du Bepos
L’effet de la Directive revient à une massification sans précédent du Bepos. L’idée existe au moins depuis une vingtaine d’année. Mais, jusqu’à présent, tous les bâtiments à énergie quasi-nulle ou Bepos construits dans le monde étaient des prototypes.
Leur site était soigneusement choisi. L’orientation mûrement calculée. L’isolation pouvait exagérer – 60 cm d’épaisseur dans les murs, par exemple – sans que le Maître d’Ouvrage ne s’évanouisse. La maison Heliotrop construite en 1994 à Fribourg en Breisgau illustre parfaitement les travaux des pionniers du Bepos.
Sur une parcelle de terrain de 512 m², Hiliotrop est une maison Bepos et à très faible empreinte environnementale. Elle est construite en deux parties distinctes : un socle fixe en béton en sous-sol, une maison tournante de 180m² en structure bois bâtie au-dessus. Cette partie rotative tourne autour d’une colonne centrale de 14 m de haut et 2,9 m de diamètre. Elle tourne de 15° par heure pour optimiser son orientation par rapport au soleil, toute la journée.
L’énergie est produite sur site, tout d’abord, par 54 m² de panneaux photovoltaïques monocristallins, montés sur des trackeurs 2 axes - ce qui augmente leur production annuelle de 30 à 40% par rapport à des panneaux fixes. Ils fournissent 9000 kWh d’électricité. Ensuite, 31,5 m² de panneaux solaires tubulaires sous vide produisent de la chaleur pour le chauffage – plancher chauffant à chaque niveau et ventilation double-flux avec récupération de chaleur et batterie eau/air alimentée par les capteurs solaires. Heliotrop produit 20% de plus d’énergie qu’elle n’en consomme dans l’année.
L’école primaire de Hohen Neuendorf est un prototype de bâtiment à énergie quasi-nulle. Mise en service en 2011 et instrumentée depuis, elle affiche selon les années un bilan énergétique quasi-nul ou légèrement positif. ©BINE
Les définitions du Bepos ou de l’énergie quasi-nulle en Europe
La Directive européenne affiche une tout autre ambition : toute (toute ? toute !) la construction neuve devra être à énergie quasi-nulle à compter du 1er janvier 2021. En France, le Bepos est défini par la méthode de calcul du « E » (énergie) dans le label ou expérimentation E+C-. Notre pays a non-seulement choisi le Bepos plutôt que l’énergie quasi-nulle, mais a ajouté un volet carbone qui ne figure pas dans la Directive.
Nous dissèquerons la méthode de calcul E+C- et le résultat d’un an d’expérimentation à l’automne prochain. Remarquons juste en passant qu’un seul bâtiment tertiaire atteint le niveau E4 du label E+C-, celui qui correspond à un franc Bepos où un bâtiment produit plus d’énergie qu’il n’en consomme, toutes consommations confondues.
Il s'agit du bâtiment LowCal, construit par et pour le Bureau d’Etudes Thermique et Environnemental Enertech à Pont-de-Barret dans l’Aude. Les tours et les grands bâtiments tertiaires ne semblent pas en mesure d’y parvenir. En attendant, regardons comment nos voisins européens définissent l’énergie quasi-nulle.
Equipé de pompes à chaleur géothermiques Stiebel-Eltron et de 70 kWc de capteurs PV, ce bâtiment de 38 logements collectifs atteint tout juste l’énergie quasi-nulle. ©Stiebel-Eltron
De 0 à 270 kWh/m².an
Un petit nombre de pays proposent pour l’instant une définition de l’énergie quasi-nulle. Au Danemark à partir de 2021, la consommation maximale sera 20 kWh/m².an pour le résidentiel et de 25 kWh/m².an pour le non-résidentiel. La République Slovaque a retenu 54 kWh/m².an après le 31 décembre 2020. En Belgique, chaque région développe sa propre stratégie.
Depuis 2015, la Région de Bruxelles a adopté le standard Passivhaus pour toute la construction neuve et considère que cela correspond à l’exigence d’énergie quasi-nulle. L’Autriche prévoit 160 kWh/m².an en résidentiel, 170 kWh/m².an pour le non-résidentiel à partir du 1er janvier 2021.
Le Royaume-Uni a développé une méthode de calcul conventionnelle dont la complexité n’a rien à envier à la nôtre. Selon cette méthode, le résidentiel neuf devra atteindre -44 kWh/m².an au 1er janvier 2021. Aucune valeur n’est prévue pour le non-résidentiel.
L'Allemagne s'en tient à son standard Passivhaus amélioré
L’Allemagne, enfin, pourtant considérée comme pionnière des économies d’énergies, n’a rien proposé du tout pour l’instant. L’Institut Passivhaus soutient que son standard, complété par une production photovoltaïque sur site conviendrait parfaitement. Les Pouvoirs Publics traînent les pieds.
Face à cette diversité, la Commission Européenne s’est livrée à un exercice de comparaison des projets de règlementation énergie quasi-nulle dans les 28 pays membres pour les bâtiments non-résidentiels neufs. Résultat, selon la Commission, les valeurs varient de proposées varient de 0 à 270 kWhEP/m².an. L’harmonisation européenne a encore du chemin à faire.
En 2012, ABG a lancé à Francfort la construction de Aktiv-Stadthaus, son premier bâtiment à énergie positive. Le bâtiment porte 1000 modules PV en toiture, 330 en façade et abrite un stockage d’électricité de 160 kWh (Lithium-Fer-Phosphate) pour maximiser l’auto-consommation. © ABG Frankfurt Holding
Source : batirama.com / Pascal Poggi