Thread et Zigbee standardisent l?emploi de Dotdot, tandis que Somfy adopte Zigbee 3.0
Le CES de Las Vegas a ouvert mardi 8 janvier. C’est un salon immense, brouillon, réparti entre plusieurs lieux différents, distants les uns des autres à travers la ville. C’est aussi et avant tout un salon grand public.
Parmi les offres des 4 500 exposants, les 180 000 visiteurs attendus trouveront des tondeuses à gazon connectées, des réfrigérateurs qui parlent, des machines à laver économes, etc. Un relativement petit nombre d’exposants, environ 500, proposent aussi des solutions qui intéressent le monde du bâtiment.
Parmi leurs offres, on compte encore 91 nouvelles propositions de thermostats connectés, qui ne semblent pas faire mieux que les deux ou trois cents déjà disponibles sur le marché mondial. D’autres annonces semblent plus importantes pour l’avenir : DotDot est standardisé sur Thread et sur Zigbee, Somfy adopte Zigbee 3.0. Voici quelques explications pour y voir plus clair.
Thread développe une transmission données, sans fil et en structure maillée, mais pas de couche applicative. ©Thread Group
Thread, Zigbee et Dotdot
Dotdot a déjà été évoqué sur ce site d'information mais un petit récapitulatif n’est sans doute pas inutile. Un protocole de communication, quel qu’il soit, est construit en 7 couches superposées, que l’on peut regrouper en deux parties distinctes. Les couches 1 à 6 gèrent le transfert des données et leur protection.
Le protocole sans fil Thread, développé par le Thread Group, dont Delta Dore, Danfoss, Hager, Amazon, Legrand, Bosch, Somfy, Schneider Electric, Viessmann, Atlantic, Belimo, LG, Nest, Osram, Tado, Johnson Controls et Velux, notamment, sont membres, ne s’intéresse qu’à cette première partie : le transport des données en toute sécurité. De plus, la couche n°3 dans Thread est IPv6 : ce qui garantit la possibilité de créer 3,4 x 1038 adresses différentes.
Une septième couche universelle
Thread a soigneusement évité de développer la seconde partie nécessaire à un protocole de communication : la 7e couche qui constitue à proprement parler le langage utilisé. Pour éclaircir le débat, prenons une comparaison simple. Thread est comme un livre aux pages blanches. Le Thread Group a développé le support physique « livre », précisé qu’il a deux couvertures, des pages, qu’il faut tourner les pages pour lire les informations, que l’information sur chaque page peut être lue de bas en haut, de droite à gauche, de gauche à droite, qu’il est possible d’incorporer des images, des tableaux, …
Mais, il s’est bien gardé d’inventer la langue utilisée pour écrire le livre, se disant qu’un grand nombre existait déjà – le français, l’anglais, l’allemand, l’arabe, … - et que son but était que n’importe quelle langue puisse être utilisée pour écrire dans le livre Thread. Ça semble horriblement banal, mais c’est une révolution, comme dirait Steven Jobs.
De son côté, Zigbee a décidé depuis plus de 10 ans de développer Dotdot, la meilleure langue universelle possible, selon la Zigbee Alliance. Dotdot forme la 7e couche d’un protocole de communication, mais elle est parfaitement distincte des 6 couches précédentes qui constituent le support physique et de sécurité de la communication. Dotdot, selon ses promoteurs, constitue en domotique et aussi en tertiaire, la meilleure couche applicative possible au dessus de n'importe quel protocole de transport de données. Ça aussi, c’est une révolution.
Dotdot over Thread
Les deux organisations – Thread Group et Zigbee Alliance – se sont rapprochées et ont accompli ensemble un pas de géant vers le nirvana de la domotique : l’interopérabilité. A la faveur du CES de Las Vegas, elles ont annoncé, premièrement, la publication des spécifications de Dotdot 1.0, aussi appelée Universal Language for Smart Devices ; deuxièmement, la standardisation des procédures de test et de certifications de Dotdot over Thread ou Dotdot sur Thread.
Un fabricant qui utilise Dotdot en guise de couche applicative (7e couche) pourra donc désormais employer indifféremment des puces Zigbee ou des puces Thread. DSR, MMB Networks, NXP, Silicon Labs et Ubilogix exposent les premières solutions « Dotdot over Thread » au CES 2019. Plusieurs fondeurs, dont Qualcomm, Silicon Labs et NXP proposent déjà des processeurs prenant en charge plusieurs protocoles de communication simultanément.
Les processeurs QCA4020 et QCA4024 de Qualcomm prennent en charge Bluetooth 5.0, Bluetooth Low Energy (BLE), Bluetooth Mesh, Zigbee, Thread. Le QCA4020 ajoute le Wifi et l’USB 2.0.
Somfy choisit Zigbee 3.0
Somfy, quant à lui, avait un problème. Les possibilités de pilotage de l’éclairage avec une box Somfy TaHoma étaient limitées au contrôle des lampes Philips Hue. C’est bien, mais un peu court. Il fallait ouvrir d’autres possibilités, parce que le pilotage de l’éclairage, après celui du chauffage et des volets roulants, figure parmi les applications les plus demandées par les consommateurs en domotique. En plus, Legrand et Delta Dore, les deux rivaux principaux de Somfy sur le marché français, faisaient déjà mieux dans ce registre.
Au CES 2019, Somfy s’illumine et annonce, premièrement, le lancement de micromodules radio utilisant le protocole io-homecontrol pour piloter les éclairages existants ; deuxièmement, l’incorporation du protocole sans fil Zigbee 3.0 pour piloter l’éclairage et les appareils électriques de la plupart des grandes marques présentes sur le marché européen : Legrand, Philips, Signify (ex-Philips Lighting), Ikea, Leedarson, Schneider Electric, …
Techniquement, cela signifie que la box TaHoma contiendra par défaut ces deux nouveaux protocoles io-homecontrol et Zigbee 3.0 et que l’application TaHoma sur smartphone pilotera tous les appareils compatibles de manière transparente pour l’utilisateur.
Zigbee 3.0 est construit sur Zigbee Pro
Développé par la Zigbee Alliance, le protocole de communication sans fil Zigbee se compose aujourd’hui de deux éléments distincts : le transfert des données sur un réseau sans fil à structure maillée – Zigbee Pro – et la couche applicative Zigbee 3.0. Zigbee 3.0., en tant que couche applicative, vise aussi l’universalité, mais elle est limitée en réalité par le souci de demeurer compatible avec les précédentes couches applicatives développées par la Zigbee Alliance : éclairage, comptage, smarthome, etc.
Dotdot s’affranchit de cette rétrocompatibilité avec les versions antérieures à Zigbee 3.0 et devient du coup plus universel. C’est un peu comme lorsque Microsoft a décidé d’abandonner la rétrocompatibilité entre les anciennes versions de Windows et la nouvelle Windows 7, ou lorsque Apple a décidé que son nouvel OS ne serait pas compatible avec son ancien MacOS.
Donc, lorsque Somfy annonce avoir adopté Zigbee 3.0, l’entreprise veut dire en réalité qu’elle rend sa box ToHoma compatible, sur les marchés américains et asiatiques pour l’instant, avec le couple Zigbee Pro en tant que protocole de transport de données + Zigbee 3.0 comme couche applicative.
Cette box ToHoma destinée à être montée sur le rail DIN d'un tableau électrique, sera disponible en Europe avec Zigbee 3.0 dès le second semestre 2019. ©Somfy
L’attrait des marchés asiatiques
Somfy annonce par ailleurs le lancement de la première gamme de motorisations connectées nativement zigbee 3.0 pour les stores intérieurs et les rideaux, pilotables depuis une app TaHoma spécifique, en Asie et en Amérique du Nord, dès le second trimestre 2019.
En Asie, Somfy annonce aussi le lancement de TaHoma Bee au second trimestre 2019, une solution Smarthome complète basée également sur Zigbee 3.0 et dédiée aux projets immobiliers collectifs neufs. Elle saura contrôler tous les moteurs Somfy RTS et tous les autres produits – y compris ceux d’autres marques - intégrant les compatibilités Zigbee 3.0.
TaHoma Bee offrira également une gamme complète de contrôle de l'éclairage, avec des interrupteurs connectés et des micromodules pour connecter tous les interrupteurs existants. Pour l’Europe, Somfy introduira pour l’immobilier neuf, un module Zigbee pour la box TaHoma Din Rail, ainsi qu’une compatibilité Zigbee dans la version de l’application Tahoma qui sera lancée au second semestre 2019.
Source : batirama.com / Pascal Poggi