L'échéance BEPOS ou Bâtiment à énergie positive arrive bientôt, ce qui suppose de poser du photovoltaïque en façade. Voici un outil et quelques solutions techniques pour y parvenir.
Nous profitons de trois salons récents – Glasstec à Dusseldorf du 23 au 26 octobre dernier, Bau à Munich du 14 au 19 janvier 2019 et BePositive à Lyon du 13 au 15 février dernier – pour faire le point sur les développements du photovoltaïque en façade.
L’échéance du Bepos (Bâtiment à Energie Positive) en construction neuve se profile pour la fin de l’année 2020. Il est certain, au moins pour les bâtiments tertiaires et collectifs neufs, que l’installation de panneaux photovoltaïques en toiture ne produira pas assez d’énergie pour compenser les consommations et atteindre le Bepos. Il faudra en plus investir les façades, correctement orientées à l’Ouest, au Sud et, parfois, même à l’Est.
BIMsolar, développé par EnerBim, est un logiciel de simulation de la production photovoltaïque sur un bâtiment, à partir d’une maquette numérique du bâtiment. ©EnerBim
Evaluer le gisement du photovoltaïque
La première tâche des concepteurs de bâtiments neufs Bepos sera d’évaluer la production d’électricité photovoltaïque possible sur leurs projets. Il existe depuis longtemps des programmes et des outils en ligne pour évaluer la production photovoltaïque à partir du toit d’une maison individuelle.
Il n’y avait rien pour le collectif et le tertiaire, jusqu’à la création d’EnerBim par quatre anciens d’ArchiWizard : Philippe Alamy, Manuel Barral, Sébastien Bermes et Régis Lecussan. EnerBim a développé BIMsolar, un logiciel de simulation 3D, dédié à l’énergie solaire intégrée dans la conception architecturale, l’ingénierie et la construction. C’est aussi une plateforme web communautaire où les participants échangent, posent des questions et répondent sur l’intégration du photovoltaïque sur les bâtiments.
BIMsolar importe des fichiers 3D SketchUp, IFC 2x3 et bientôt 2x4, gbXML, EnergyPlus. Il sera disponible à l’automne sous forme d’un plugin Revit. Le serveur dispose des données météorologiques d’une centaine de stations, mais les utilisateurs peuvent importer leurs propres données météo au format csv, tm2 ou epw. BIMsolar simule ensuite l’irradiance directe et diffuse grâce à son moteur de lancer de rayon, modélise apports et pertes d’énergie solaire en tous points de la maquette 3D.
BIMsolar peut importer des panneaux existants depuis la base de données Photon. Mais il permet aussi de confectionner ses propres modules à partir de cellules PV réelles. Le logiciel restitue la production selon le pas de temps choisi par l’utilisateur et met en relief les pertes par ombrage. ©EnerBim
BIMsolar : le croisement du BIM et de la simulation
Pour évaluer plus précisément la production photovoltaïque et comparer des solutions techniques, l’utilisateur de BIMsolar a accès à une base de modules PV et d’onduleurs. C’est celle créée et maintenue à jour par le magazine allemand Photon, spécialisé en solaire.
L’utilisateur choisit le câblage de l’installation ou laisse le logiciel l’effectuer automatiquement à partir du choix des onduleurs. Le logiciel fournit des résultats par mois, par jour ou heure par heure et met en relief les pertes par ombrage, par surchauffage des panneaux, … Enfin, BIMsolar simule le retour sur investissement avec revente totale de l’électricité produite, autoconsommation totale ou autoconsommation partielle avec revente du surplus.
Dès le second semestre, BIMSolar saura aussi simuler une production solaire thermique. En attendant, BIMsolar exporte ses fichiers vers EnergyPlus pour une simulation dynamique très fine.
Philippe Alamy, l’un des fondateurs d’EnerBim, participe à toutes sortes de programmes de recherche européens et anime plusieurs forums consacrés au BIPV. ©PP
Toute une communauté autour du BIPV et du BIPVT
Les représentants de EnerBim, rencontrés au salon BePositive, ont évoqué l'existence d'une communauté mondiale autour du BIPV. Elle se rassemble dans des organisations internationales et des forums dédiés, dont celui créé autour de BIMsolar. Le groupe BIPVboost rassemble une vingtaine de partenaires issus de 7 pays, dont le CSTB et Onyx Solar, couvrant toute la chaîne du BIPV (Building Integrated PV ou PV intégré aux bâtiments), dans le but de réduire les coûts des installations et d’accélérer leur développement.
BIPVboost prépare un catalogue des solutions qui seront développées, ainsi qu’un guide de choix et de mise en œuvre. En attendant, le site BIPVboost recense des réalisations de divers types dans plusieurs pays d’Europe, faisant appel à plusieurs technologies PV différentes : c-Si, modules verre-verre bifaciaux, etc. PVsites, un autre projet soutenu par des fonds européens, rassemble 15 partenaires, dont le CEA, le transformateur verrier Cricursa et Nobatek INEF4. Il a pour but d’accélérer le développement du marché du BIPV en Europe, notamment dans la perspective du BEPOS.
L’association américaine ASA (Architectural Solar Association) est également un très actif foyer d’échanges sur le BIPV. De manière un peu différente, le projet européen SunHorizon associe les français DualSun et Bootsheat, les allemands Fahrenheit et Ratiotherm, l’européen BDR Thermea et le suisse TVP Solar dans le développement de l’association de pompes à chaleur – à compression, à adsorption, … - et de panneaux mixtes photovoltaïques et thermiques.
SunHorizon veut aller jusqu’au TRL 7 (Technology Readiness Level ou niveau de maturité technologique), c’est-à-dire des field test d’installations réelles et opérationnelles. EnerBIM travaille avec DualSun au développement d’un module BIPVT ou BIPV/T, comme on l’écrit parfois aussi, dans le logiciel BIMsolar.
L’allemand Heliatek propose des panneaux souples et ultra-légers que l’on peut soit incorporer à des systèmes, soit coller directement sur des façades existantes. ©PP, Heliatek
Panneaux PV : les solutions souples
Lors du salon BAU à Munich, plusieurs fabricants de panneaux PV souples, enfin plus ou moins souples, ont exposé leurs solutions. Le premier est l’allemand Heliatek, dans lequel Engie a pris une participation depuis 2016. Heliatek développe des films PV à base organique.
L’entreprise détient le record de rendement pour cette technologie. Ses cellules atteignent 13,2% de rendement nominal. En réalité, une cellule Heliatek est composée de deux cellules superposées. Le film organique PV – pesant moins de 1 kg/m², flexible avec un rayon de courbure de 10 cm, translucide, atteignant des longueurs de 0,3 à 6 m, disponible en plusieurs couleurs et très peu sensible à l’élévation de température - est incorporé dans deux produits différents : HeliaFilm et HeliaSol.
HeliaFilm est une couche active qui peut être incorporée à un produit de construction : du verre bombé, par exemple, ou un bardage. Tandis qu’HeliaSol est un film avec une face pré-encollée, destiné à être collé sur les parois extérieures de bâtiments existants. Début octobre 2018, 185 m² d’HeliaSol ont été collés sur la façade d’un entrepôt sur le port de Duisbourg, soit 195 panneaux HeliaSol de 3 m de longueur.
Le second produit souple est la membrane Evalon Solar cSi fabriqué par Alwitra. Elle combine le revêtement d’étanchéité Evalon avec des cellules en silicium cristallin encapsulées. Evalon Solar cSi mesure 1,55 x 3,49 m, pèse 3,3 kg/m². Il faut moins de 10 m² de surface pour atteindre 1 kWc, chaque membrane affiche une puissance nominale de 450 Wc. Evalon Solar cSi est commercialisée en France par Alwitra. La membrane se pose à la fois en toiture et sur parois verticales.
Les cellules PV organiques d’Heliatek peuvent être translucides. Ce qui intéresse particulièrement AGC qui participe au capital d’Heliatek. ©Heliatek
Les solutions photovoltaïques rigides
L’un des grands spécialistes européens du BIPV, le suisse Ertex Solar a été acheté par ActivSkeen, une filiale de Vinci Construction, spécialisée dans les façades actives produisant de l’électricité. Du coup, toutes les solutions développées par Ertex depuis 20 ans sont disponibles sur le marché français.
ActivSkeen propose des solutions sur mesures (couleurs, dimensions, formes, emplois) opaques, des solutions en « demi-mesure » (dimensions standards et couleurs au choix) et des solutions semi-transparentes. Ertex est spécialisé dans le silicium cristallin, mais ActivSkeen développe également des solutions à base de CIGS.
L’entreprise commercialise notamment les modules sans cadre PowerMax Skala (17 kg, 1587 x 664 mm pour 38 mm d’épaisseur) de l’allemand Avancis. Conçus pour une pose en bardage de façades ventilées, ils sont disponibles en 7 couleurs différentes et affichent une puissance nominale de 145 Wc avec un rendement de 13,8%. Avancis était présent au salon Glasstec et son offre n’a pas changé depuis deux ans. D’autres acteurs préparent des solutions BIPV en façade et les exposeront au prochain salon Intersolar à Munich du 15 au 17 mai.
Evalon Solar cSi, commercialisé par Alwitra en France, est une solution deux-en-un : étanchéité à l’eau et production PV. ©PP
Source : batirama.com / Pascal Poggi