Quantité de nouveaux éditeurs de logiciels s?embarquent dans le BIM et visent une offre globale de briques logicielles imbriquées qui permettra de tout BIMer, de la conception à la maintenance.
Au salon Bimworld 2019, porte de Versailles à Paris, le BIM en maintenance est la grande question. Seulement une heure après l’ouverture du salon, on indiquait sur le stand bimobject que les questions portaient avant tout sur ce thème : est-ce que les objets BIM de bimobject sont prêts pour la maintenance ? Clairement, la réponse est "non, pas encore".
L’amélioration de la qualité et du détail des attributs accompagnant les objets BIM, ceux de bimobject, de Polantis, de BIM & Co et des autres fabricants d’objets BIM sont l’une des conditions du développement de l’emploi du BIM en maintenance.
BuildingSmart France / Mediaconstruct constitue le chapitre français d’une organisation internationale et participe aux travaux de développement d’une standardisation des attributs de objets BIM. ©PP
Les attributs des objets BIM
Un objet BIM, c’est d’abord une représentation graphique en 3D en format .IFC – le format d’échange entre les logiciels de conception comme Revit, Archicad, AllPlan et les logiciels métiers -, en format natif Revit, Archicad ou autres. Cette représentation, exacte et aussi détaillée que possible si l’on veut l’utiliser dans un processus de maintenance, est assortie d’une liste d’attributs ou de propriétés qui font de l’objet BIM un objet au sens informatique que l’on peut intégrer dans des bases de données, dont on peut lire et utiliser les propriétés dans des logiciels dévolus au calcul thermique, acoustique, de résistance au feu, au facility management, etc.
Mais, souligne bimobjects, les confectionneurs d’objets BIM ne sont pas responsables des données associées à ces objets : ni de leur nature, ni de leur exactitude. Toutes les plateformes qui proposent des objets BIM en téléchargement aux architectes et aux entreprises, insistent sur le fait que ces objets appartiennent aux industriels qui les ont réalisés ou qui ont mandaté la plateforme pour leur réalisation et qui, en tout état de cause, sont les fournisseurs des propriétés associées et des informations qu’elles contiennent.
Et, il faut bien l’avouer, la cible presque unique jusqu’à présent de tous les industriels et des fabricants d’objets BIM étaient les concepteurs : architectes et BE divers. Les propriétés et attributs développés pour les objets BIM visaient d’abord à satisfaire les besoins des concepteurs de bâtiments. Pour passer au BIM en maintenance, les attributs des objets BIM doivent être beaucoup plus développés et précis.
Par exemple, si une entreprise de maintenance doit remplacer une vanne motorisée, outre les notions de base comme ses dimensions et son type de raccordement (filetage, mâle, femelle, …), elle a besoin de savoir s’il s’agit d’une vanne normalement fermée (si le moteur de la vanne n’est plus alimenté, elle se place en position fermée), d’un moteur trois points, etc. Autant de données qui ne sont pas encore disponibles parmi les attributs des objets BIM. Les développer représente un chantier considérable.
Un tout petit nombre de logiciels de conception se partagent le marché français du BIM. Les deux premiers sont Revit d’Autodesk et Archicad distribué en France par Abvent. Allplan fait partie des 5 premiers. ©PP
Le BIM en maintenance
Pour pallier ce manque de données et accéder tout de même au Nirvana du BIM en maintenance, les entreprises de maintenance tentent d’être associées le plus tôt possible aux opérations de construction ou de rénovation et de proposer un cahier des charges des données dont elles auront besoin et qu’elles aimeraient retrouver dans la maquette numérique qui sera livrée à la réception du bâtiment.
Ce n’est pas toujours possible et si les entreprises de maintenance ne sont entendues, pour mettre en œuvre le BIM, elles commencent par compléter elles-mêmes les données manquantes. Dans un bâtiment tertiaire de 10 000 m², c’est un travail initial titanesque. Il faut d’abord vérifier chaque ouvrage, chaque système technique dans le bâtiment pour être sûr que la maquette numérique correspond bien au « tel que construit ».
Ensuite, il faut compléter les attributs disponibles pour chaque ouvrage et système technique avec les données que l’entreprise de maintenance juge indispensable. Et, tant qu’à faire, il faut géolocaliser ou vérifier la géolocalisation de tout ces équipements dans le bâtiment. En l’absence d’un standard existant pour définir les attributs, la manière dont ils sont rangés, puis décrits – savoir, par exemple, si les dimensions de telle vanne sont données en pouces comme c’est l’usage en chauffage et en plomberie ou bien si elles sont exprimées en système métrique – est propre à chaque entreprise de maintenance.
Bien sûr, il existe des travaux en cours pour définir une standardisation des attributs pour chaque produit. Mais, d’une part, c’est un travail monstrueux qui prendra des années avant d’aboutir ; d’autre part, il existe en réalité plusieurs démarches concomitantes, mais différentes.
La place d’Autodesk et de Revit, son logiciel phare, est telle que de nombreux éditeurs de logiciels métiers, comme le français FISA, ont choisi de présenter leurs softs comme des applicatifs de Revit. Ce qui, du même coup, règle bien des problèmes liés à l’imperfection du format IFC. ©PP
Les travaux de standardisation en cours
Le Royaume-Uni, qui avait besoin d’une réponse rapide pour rendre le BIM opérationnel pour tous les projets publics dès 2016, a développé COBie (Construction Operations Building Information Exchange) : une liste de propriétés, accompagnée de leur expression (unités, etc.), disponible en tableur et échangeable en XML, en Excel, en CSV, etc.
Défini en 2011, COBie est une structuration détaillée des informations pour décrire un bâtiment et tout ce qu’il contient. COBie n’est utilisé qu’au Royaume-Uni. D’autres travaux sont en cours, auxquels participe BuildingSmart France (ex-Mediaconstruct). Pour l’instant, sont définis des attributs généraux normalisés (nom, description, identifiant unique, etc.), des ensembles de propriétés (Property Sets) encore trop peu développés pour atteindre le détail requis en maintenance.
Pour les besoins spécifiques de la maintenance justement, la Fedene, Syntec-Ingenierie, Sypemi et Sypim ont conjointement proposé une structuration des données dans leur brochure « Réussir le BIM pour l’Exploitation ». Mais, sur le terrain, les objets BIM comportent encore trop peu de données associées.
Vers un standard de fait pour les objets BIM
Une autre solution se profile. Il s’agit d’un standard de fait. En France, la part du logiciel Revit d’Autodesk est prépondérante dans les opérations menées en BIM. Selon les interlocuteurs, elle est évaluée entre 60 et 90%, sans que l’on sache exactement comment on parvient à ces chiffres. Quoiqu’il en soit, deux softs de conception, Revit et Archicad, représentent très probablement 80 à 90% des softs de conception BIM utilisés en France.
De nombreux éditeurs de logiciels métiers à travers le monde, dont BBS Slama et FISA pour les calculs thermiques règlementaires, les calculs de réseaux, Magicad en Grande-Bretagne, etc. ont noué des partenariats avec Autodesk pour utiliser directement des maquettes numériques au format Revit natif ou proposer leurs softs sous la forme de Plug-ins de Revit. Ce qui accroît encore l’importance de Revit dans le monde du BIM, en France en particulier.
Par ailleurs, Autodesk et bimobject ont noué une collaboration étroite. En 2016, bimobject a racheté Autodesk Seek, un programme et une plateforme permettant de confectionner des objets BIM et de les diffuser. En échange, bimobject est devenu le principal fournisseur d’objets BIM pour Revit. Le portail bimobject est par exemple intégré à Revit, ce qui permet à un utilisateur d’aller chercher des objets BIM directement sur le site bimobject, sans quitter l’application Revit.
Il y a deux semaines, bimobject a acquis Polantis. Bref, poussé par son propre dynamisme et par son étroit partenariat avec Autodesk, bimobject acquiert une place prépondérante dans la fourniture d’objets BIM. Ses choix en matière d’attributs et de leur structuration pour les besoins des entreprises de maintenance deviendront un standard de fait. Un peu comme le DXF d’abord, puis le DWG, tous deux inventés par Autodesk, sont devenus des formats standards de représentation graphique dans le monde du bâtiment et de l’industrie.
Source : batirama.com / Pascal Poggi