Après l?incendie de la cathédrale, l?architecte Jean-Michel Wilmotte a lancé l?idée de reconstruire la charpente en métal et de la couvrir de titane. Philippe Hostaléry, directeur général du CTICM donne son point de vue
Quelques jours après la catastrophe de l’incendie de Notre-Dame de Paris, le CTICM, Centre Technique Industriel de la Construction Métallique, n’a pas encore été interpellé sur les solutions à apporter à la reconstruction du monument historique. Cependant, passé le temps de l’émotion, « les équipes se sont mises à réfléchir », reconnaît Philippe Hostaléry, Directeur Général de cet organisme qui travaille de concert avec le SCMF, syndicat de la construction métallique de France
Pour cet expert précédemment chargé, chez Bureau Veritas, du contrôle des charpentes en métal et en bois dans les opérations de grande envergure, il semble difficile de retenir la solution bois pour reconstruire cet ouvrage.
« On n’a plus les arbres de dimensions suffisantes pour faire, à l’identique, une telle charpente Déjà, au 19? siècle, le métal a été la solution retenue pour reconstruire la charpente de la cathédrale de Chartres qui avait subi la même infortune. » indique Philippe Hostaléry,
Le comportement du métal est prévisible
L’exemple a été donné par l’échafaudage de chantier : il s’est déformé mais a tenu malgré le brasier. À ce titre, Philippe Hostaléry estime que la puissance thermique émise a été probablement considérablement plus importante que celle d’un feu ISO retenu dans le code de calcul des structures. Par ailleurs, il évoque qu’outre le bois, la poussière accumulée dans ces combles a pu être un facteur aggravant.
Quels avantages retenir en faveur du métal ? « On sait calculer une structure métallique, évaluer les reports de charges, maîtriser la dilatation, prévoir son comportement à haute température… Avec le bois aussi, mais avec moins de précision », relativise-t-il. Et, avantage décisif : la masse combustible du métal est nulle.
Lancée sur différents médias par l’architecte Jean-Michel Wilmotte, la solution d’une charpente métallique et d’une couverture en titane serait selon P. Hostaléry « une excellente idée. Ça ne bougerait pas. De plus, avec la réhabilitation réussie du Collège des Bernardins à Paris, cet architecte a toute légitimité pour en parler » Pour ce qui concerne spécifiquement la couverture en titane, il s’interroge : « Sur le papier, ce matériau répond à tous les critères de durabilité, de poids… », mais il est rare et très cher.
Un essai incendie au CTICM
Des ingénieurs prêts à répondre
Pourtant, retient-il, « nous n’en sommes pas encore là ! L’urgence est de réaliser un audit technique pour déterminer l’état de conservation du bâtiment, organiser les actions prioritaires sur la structure et estimer les capacités de l’ouvrage. À la suite, nos entreprises de charpente métallique de France ont toutes les compétences pour exécuter les travaux. Aujourd’hui, il faut mettre l’ouvrage en sécurité : étayer les parties d’ouvrages instables, retirer l’échafaudage et poser un sarcophage pour protéger la cathédrale des intempéries. »
« Notre métier est aussi de répondre à ce type de crise ; j’ai demandé à nos ingénieurs de se pencher sur ce sujet. » Le CTICM a cette vocation de travailler sur la conception des bâtiments les plus complexes, leur dimensionnement, leur calcul pour déterminer la stabilité « à froid » et en conditions accidentelles, comme l’incendie.
Parviendra-t-on à reconstruire Notre-Dame en cinq ans ? « Dans ce délai, on devrait parvenir à réaliser quelque chose qui puisse être montré. Mais fini, je ne le pense pas. D’ailleurs, un monument tel que celui-là n’est jamais fini. »
Photo d'ouverture ©Pascal Poggi
Source : batirama.com / Bernard Reinteau