Alors que les négociations de branches sur le financement de l?apprentissage viennent de s?ouvrir, les tensions entre organisations professionnelles s?accroissent. L?avenir du CCCA-BTP est en jeu?
Rien ne va plus entre les partenaires sociaux du BTP, dont la Capeb et la FFB, actuellement en charge de la négociation sur la formation professionnelle et l’apprentissage. La Capeb, (Confédération artisanale des petites entreprises du Bâtiment), appuyée par la CFDT et la CGT (côté salariés), indique avoir refuser d’emblée le projet d’accord, suite à certaines propositions inacceptables émises par la FFB (Fédération française du Bâtiment).
Soutenue par la FNTP, la FFB a en effet proposé qu’une cotisation spécifique (dite la cotisation historique « CCCA-BTP ») abonde directement le nouvel Opco de la construction et non plus le CCCA-BTP et son réseau de CFA. De quoi parle-on ? Il s’agit de la contribution de formation de branche, dénommée cotisation CCCA-BTP, inscrite dans la loi (Articles L6331-35 à L6331-47 du Code du travail) dont le taux se monte à 0,30 % dans les entreprises du Bâtiment et de 0,22 % dans les entreprises de Travaux public.
A quoi sert cette cotisation ? « La cotisation contribue à l'information des jeunes, de leurs familles et des entreprises, sur la formation professionnelle initiale ou sur les métiers du Bâtiment et des Travaux publics, et au développement de la formation professionnelle dans les métiers du Bâtiment et des Travaux publics, et plus particulièrement des centres de formation d'apprentis » rappellent les textes de loi.
« Sans sa contribution historique, le CCCA BTP disparaît »
« Sans cette contribution apprentissage, (d’un montant de 100 millions d’euros), le CCCA-BTP disparaît » résume Jean-Christophe Repon, 1er vice-président de la Capeb, en charge des affaires sociales et de la formation, et par ailleurs, actuel président du CCCA-BTP (en fin de mandat). Pour ce dernier, cette proposition motivée par une logique exclusivement financière, dessert l’apprentissage et menace outre le CCCA-BTP, certains CFA implantés dans les territoires et moins rentables.
« Cette taxe historique serait transformée en taxe Opco de la Construction et orientée vers la formation continue des plus grandes entreprises » s’inquiète M. Repon. Lors de la création de l’Opco, la FFB avait d’ailleurs manifesté son regret que les actions de formation des entreprises de plus de 50 ans salariés (les « oubliées » de la réforme) ne puissent pas être financées par les fonds mutualisés.
La réforme a en effet prévu que les entreprises de 50 salariés et plus, participent au financement du Plan de développement des compétences des entreprises de moins de 50 salariés, sans contrepartie de fonds mutualisés. Ce « découpage » entre entreprises de moins et de plus de 50 salariés est d’ailleurs issu de la volonté du gouvernement soucieux de donner un meilleur accès à la formation aux TPE PME.
Donner plus d’agilité au CCCA-BTP
« Le texte proposé par la FFB revient à une captation d’argent au profit des entreprises les plus grosses » analyse Jean-Christophe Repon qui évoque « un tour de passe-passe diabolique ». « Nous ne sommes d’ailleurs pas là pour sauver à tout prix le CCCA-BTP en tant que tel, précise-t-il. Il faut lui donner plus d’agilité et le faire évoluer en tant qu’outil pérenne au service de la profession ».
Le responsable rappelle à cet effet qu’un plan (Transform BTP) a été lancé il y a 3 ans pour transformer la tête du réseau du CCCA-BTP. Il note enfin que l’organisme vient de bénéficier d’une dotation de 36 millions d’euros dans le cadre d’un appel à projet national concernant le pré-apprentissage sur 2 ans.
Le CCCA-BTP doit donc demeurer à ses yeux un outil de pilotage pédagogique. « Le rapport d’activité du CCCA-BTP a été voté à l’unanimité par les administrateurs du Conseil d’administration dont la FFB et il valorise l’investissement de la profession » ajoute J.C. Repon. « Je ne ferme pas la porte à la négociation et nous assisterons aux prochaines réunions. Nous avons un texte à proposer de notre côté avec une vision de l’apprentissage qui n‘est pas exclusivement financière, et que nous défendrons » conclut-il.
Le dernier communiqué de la FFB
« La réforme de la formation professionnelle de fin 2018 modifie en profondeur l’apprentissage et son financement, ce qui oblige à revoir son organisation dans le secteur » justifie de son côté la FFB.
La FFB qui se dit décidée à « redonner une véritable ambition à l’apprentissage en mettant les entreprises et les jeunes au cœur du projet » affirme vouloir baisser les charges des entreprises grâce aux économies de structures.
« La Fédération recommande de concentrer les moyens de péréquation sur l’OPCO (Opérateur de compétences de la Construction) afin de rationaliser l’usage des fonds » précise-t-elle. Cette contribution spécifique recalibrée peut ainsi garantir la proximité, la qualité de l’outil de formation aux besoins des entreprises et des jeunes, rappelle la FFB.
« Avec la réforme de la formation professionnelle, il y a la nécessité de prendre à bras le corps le sujet de l’apprentissage qui est incompatible avec l’immobilisme ou le repli. Nous sommes persuadés que seule une réelle ambition courageuse et affirmée, permettra de relancer l’apprentissage et de l’adapter aux enjeux du XXIe siècle. Il faut avoir une vision d’avenir pour construire le futur paysage professionnel de nos jeunes » selon Jacques Chanut, président de la FFB cité. Ce dernier avait déclaré au Moniteur, à propos du CCCA-BTP, « ne pas voir l’intérêt de maintenir une telle structure »
Source : batirama.com / Fabienne Leroy