Les Directives Européennes, les Règlementations Françaises, dont les aides financières, la recherche d?une bonne Qualité de l?Air Intérieur et la baisse continue du prix des matériels photovoltaïques.
Depuis l’édition 2017 du salon Interclima, les évolutions techniques des produits et systèmes CVC (chauffage, ventilation, climatisation) et de production d’ECS (eau chaude sanitaire) sont principalement impulsées par quatre facteurs, d’importance inégale : l’évolution des Directives et des Règlements Européens (Directive ecoDesign, Directive sur l’étiquetage énergétique, Directive sur la performance énergétique des bâtiments, Règlement F-Gaz), leur adaptation au contexte français (article CH35 et future RE2020) soutenues par des incitations fiscales et les primes purement françaises, la recherche d’une meilleure qualité de l’air et son maintien dans le temps, enfin la baisse, ralentie mais continue, du coût des composants clefs des installations photovoltaïques.
Le règlement européen F-Gaz et la nouvelle rédaction de l’article CH35 sur les équipements admissibles en ERP vont certainement relancer les soltions classiques à eau glacée, notamment les ventiloconvecteurs 4 tubes. © PP
Les exigences ecoDesign
La Directive ecoDesign, dite aussi Directive ErP (Energy related Products) porte la référence 2009/125/EC. Elle concerne les chaudières gaz et fioul, les pompes à chaleur de toutes sortes (à compression électrique, à absorption, à moteur à gaz), les chaudières électriques, la cogénération, que ce soient des appareils chauffage seul ou mixtes (chauffage + production d’eau chaude sanitaire), tant que leur puissance demeure inférieure à 400 kW.
Cette Directive porte également sur les chauffe-eau et chauffe-bains jusqu’à 400 kW et les ballons de stockage d’ECS jusqu’à 2000 litres : pompes à chaleur de tous types, chauffe-eau et chauffe-bains utilisant des combustibles fossiles, ballons de production d’ECS, ballons de stockage d’ECS et solutions de production d’eau chaude solaires. Elle concerne aussi les générateurs à combustibles solides : chaudières chauffage seul, chaudières mixtes, cogénération chauffage seul et mixte jusqu’à 500 kW.
La Directive fixe un calendrier d’évolution des rendements pour tous ces appareils, d’amélioration de la qualité des produits de combustion pour tous les appareils à combustion et à moteur thermiques (cogénération, pompes à chaleur à moteur à gaz) et de réduction du bruit pour les seules pompes à chaleur. Une nouvelle échéance se profile pour les chaudières à combustibles solides au 1er janvier 2020.
Les industriels ont choisi le R32 pour les systèmes thermodynamiques monosplits et multiplits. © PP
Une conséquence de la Directive ecoDesign
L’un des impacts récents les plus significatifs de la Directive ecoDesign sur les chaudières est la disparition des chaudières B1 du marché européen depuis le 26 septembre 2018. En effet, depuis cette date, il faut un rendement saisonnier de chauffage (Etas) ≥ 75% pour les chaudières de type B1, ≥ 86% pour les autres types de chaudières à combustibles gazeux, ainsi qu’un taux de NO2 ≤ 56 mg/kWh PCS pour toutes les chaudières à gaz.
Conséquence, les chaudières B1, définies comme « un dispositif de chauffage des locaux par chaudière à combustible comportant un coupe-tirage antirefouleur, destiné à être raccordé à un conduit à tirage naturel évacuant les résidus de combustion à l’extérieur de la pièce où est installé le dispositif de chauffage, et qui prélève l’air comburant directement dans cette pièce », ne peuvent plus être mises sur le marché en Europe depuis le 26 septembre. Grossistes et installateurs ont le droit d’écouler leurs stocks, jusqu’à épuisement.
Ces chaudières, dont environ 2 millions d’exemplaires sont installés en France et 5 millions en Europe, sont souvent posées sur des conduits de fumée individuels ou collectifs qui ne supporteraient pas leur remplacement par des chaudières à condensation. En France en 2017, selon Uniclima, il s’est vendu 114 766 chaudières B1 sur un total de 606 113 chaudières d’une puissance inférieure à 70 kW.
La disparition des chaudières B1 a donc suscité l’apparition de nouvelles chaudières basse température, mais non à condensation, qui peuvent, sauf dans le cas de conduit de fumée individuel, remplacer les chaudières B1 sans travaux de fumisterie. Les principales marques, dont Chaffoteau, elm leblanc, Frisquet et Saunier-Duval proposent ce type de générateurs. La disparition des chaudières B1 a également favorisé le développement des chaudières étanches à ventouse et de conduit de fumées collectifs de type 3CE.
Il n’est pas impossible que de nouvelles exigences applicables aux chaudières soient publiées en 2019.
Pour les solutions de climatisation à détente directe plus puissantes, comme les DRV, certains se tournent vers le R32, d’autres vers des systèmes mixtes R32 + eau glacée, d’autres encore marmonnent que le R513A pourrait faire l’affaire. Il faudra sans doute attendre au moins deux ans encore pour être fixés. © PP
La climatisation prise entre deux feux
En ce qui concerne la climatisation, la Directive ecoDesign demande une amélioration des rendements. Dans le même temps, le règlement européen F-Gaz prévoit une réduction progressive du GWP (Global Warming Power) des fluides utilisés en climatisation et en froid, avec comme but un GWP moyen de 400 en 2030.
Enfin, la France a modifié ses propres règles de sécurité en ERP (Etablissement Recevant du Public), spécifiées par l’Arrêté du 25 juin 1980 « portant approbation des dispositions générales du règlement de sécurité contre les risques d'incendie et de panique dans les établissements recevant du public » et plus précisément par le fameux article CH35 de cet arrêté.
L’article CH35 ne porte que sur la climatisation des locaux. L’aspect froid commercial est pris en compte page 24 du « Guide Pratique relatif à la sécurité incendie dans les magasins de vente et dans les centres commerciaux », édition Décembre 2017, publié par la Direction Générale de la Sécurité Civile et de la Gestion des Crises (https://www.interieur.gouv.fr/content/download/107412/852971/.../GUIDE%20M.pdf). La difficulté vient du fait que les fluides désormais utilisables en climatisation et en froid commercial en raison de leur faible GWP, sont soit « légèrement inflammables » et classés A2L comme le HFO1234ze (GWP = 6), le HFO1234zd (GWP = 7) et le R32 (GWP = 675), soit franchement inflammables et classés A3 comme le Propane (R290, GWP = 3) ou encore toxiques comme l’ammoniaque (R717, GWP nul) et classé 1B.
L’article CH35 a été modifié par le tout récent arrêté (NOR : INTE1823855A) du 10 Mai 2019, paru au JO du 17 Mai 2019. Les nouvelles dispositions qu’il contient limitent sévèrement la possibilité de déployer des systèmes contenant une charge importante de fluide classé A2L (légèrement inflammable), A2 (inflammable) ou A3 (explosif). Les précautions à prendre renchérissent le coût des installations.
Les DRV (Débit de Réfrigérant Variable) qui équipent les grands bâtiments tertiaires sont concernés au premier chef. Les industriels vont devoir imaginer de nouvelles solutions. Plusieurs se profilent : le retour aux systèmes à eau glacée, le déploiement de solutions mixtes détente directes et eau glacée qui limitent la charge de fluide ou encore le développement des pompes à chaleur sur boucle d’eau que le CH35 traite plutôt favorablement.
Pour les solutions de climatisation individuelles et en petit tertiaire, un consensus est apparu : les constructeurs ont franchement basculé vers le R32 pour les mono- et multisplits, jusqu’à 5 unités intérieures.
Les pompes à chaleur à 1€ et la Rt2012 qui favorise les pac en maisons individuelles poussent l’augmentation des ventes de ces générateurs thermodynamiques. La plupart des constructeurs ont annoncé leur basculement du R410A au R32. © Panasonic
Les aides financières et les règlementations françaises
Mardi 18 juin matin, lors de la conférence de presse présentant le prochain Mondial du Bâtiment, Pierre-Louis François (Atlantic), Président du salon Interclima, rassemblé avec Batimat et Ideobain sous l’ombrelle du Mondial du Bâtiment, a souligné que les fabricants français et les importateurs de pompes à chaleur étaient dès à porésent en rupture de livraison. C’est directement la conséquence de l’opération « Coup de Pouce Chauffage » lancée en janvier par les Pouvoirs Publics qui a débouché sur plus de 25 offres de pompes à chaleur à 1€ en modernisation d’une installation fioul ou gaz non-à condensation existante.
Pierre-Louis François a également souligné que plusieurs pays d’Europe, dont la Grande-Bretagne et les Pays-Bas, ont adopté un calendrier les conduisant à une neutralité carbone en 2050. L’Allemagne serait également en train de se rallier à cette idée. Ce n’est pas une bonne nouvelle pour les générateurs utilisant des combustibles fossiles, mais cela fournit une formidable impulsion à toutes les solutions thermodynamiques.
De même, si la France opte pour une prochaine règlementation à la fois énergétique et environnementale exigeante pour la fin 2020 – nous devrions être fixés au plus tard à l’automne 2019 – les solutions de CVC dans toute la construction neuve seront profondément impactées.
Si le Bepos se généralise en construction neuve, quantité de solutions encore rares deviendront courantes : puits de lumière, photovoltaïque, solaire thermique, récupération de chaleur sur l’air extrait, sur les eaux usées, etc. © PP
Maintenir une bonne Qualité de l’Air (QAI) dans le temps
La loi Elan (Art55bis) introduit aussi l’idée d’amélioration de la qualité de l’air intérieur dans les bâtiments neufs. Cela pourrait se traduire, tout d’abord, par l’obligation de réceptionner les installations de ventilations dans les bâtiments neufs et de vérifier la conformité des débits avec le calcul, ou bien par une certification des BE et entreprises de mise en œuvre qui prouverait a priori leur savoir-faire.
Cette nouvelle exigence sur la QAI pourrait aussi aboutir à une exigence d’installation de moyens de mesure de la QAI dans les locaux – des sondes de CO2, de divers COV, d’Hygrométrie relative, etc. - avec un report clair et facilement accessible des informations pour les occupants. Enfin, l’obligation d’entretenir les installations de ventilation pourrait se voir réaffirmée.
À l’automne 2018, le Synasav (Syndicat National de la Maintenance et des Services Energétiques) rappelait que la situation la plus fréquente, en maison individuelle notamment, mais aussi en collectif et même en bureaux, est plutôt l(absence de contrat d’entretien de la ventilation. Le Synasav rappelait aussi que les installations de ventilation et de distribution d’air prétraité ne sont pas en général conçues pour être entretenues. Lorsqu’un adhérent du Synasav décroche un contrat d’entretien d’une ventilation neuve, il commence le plus souvent par la modifier, ajoutant des trappes, par exemple, pour pouvoir accéder au réseau et le nettoyer. Bref, il reste beaucoup à faire pour garantir une bonne QAI dans le temps
Le photovoltaïque est rentable en grande distribution alimentaire, dès à présent. Il peut devenir incontournable en construction neuve tertiaire début 2021, en fonction de l’intensité des performances énergétique demandées par la future règlementation. © PP
La baisse des coûts du photovoltaïque pousse à l’autoconsommation
La baisse continue des divers composants d’une installation photovoltaïque – panneaux PV, onduleurs, électronique de puissance et même stockage – introduit deux évolutions. Tout d’abord, dans le tertiaire, l’autoconsommation d’une production photovoltaïque sur site devient rentable. À tel point que toues les grandes enseignes de la distribution alimentaire et non-alimentaires développent des plans d’actions pour couvrir leurs hectares de toitures et de parking de panneaux photovoltaïques, soit directement sur leurs toits, soit sur des ombrières de parking.
Ces mêmes enseignes en profitent pour proposer, à titre expérimental dans certains hypermarchés pour l’instant, divers avantages à leurs clients. En échange de la carte de l’enseigne, le client peut charger gratuitement ou à faible coût son véhicule électrique pendant qu’il fait ses courses, par exemple. Dans le reste du tertiaire et en logement, l’avènement d’un franc Bépos ou de degrés de Bépos en construction neuve devrait conduire à une explosion des installations photovoltaïques en 2021.
En attendant, pour faire face à l’obligation d’utiliser des ENR en maisons individuelles neuves, les constructeurs – Viessmann, Vaillant, Atlantic bientôt, etc. – proposent des packages complets : pompe à chaleur air/eau + plus installation photovoltaïque en autoconsommation.
La plupart de ces nouvelles solutions seront en évidence au prochain salon Interclima en Novembre 2019 à Villepinte.
Source : batirama.com / Pascal Poggi