L'Ordonnance du 25 Mars 2020 qui prolonge les délais échus pendant la période d?urgence sanitaire et adapte les procédures, suscite l?incompréhension de la profession.
Le Conseil des Ministres du 25 Mars a pris 25 Ordonnances imposées par l’urgence sanitaire. Elles ont été publiées au Journal Officiel du 26 mars. Cinq autres ordonnances ont été prises le 27 Mars et publiées au JO du 28 Mars.
L’une d’entre elles, intitulée « Ordonnance du 25 Mars 2020 relative à la prolongation des délais échus pendant la période d’urgence sanitaire et à l’adaptation des procédures pendant cette même période », soulève l’incompréhension des promoteurs, notamment des membres de la LCA-FFB, mais aussi des Agences Immobilières.
Julien Haussy, fondateur d’Espaces Atypiques, un réseau d’agence immobilières spécialisé en espaces atypiques, dénonce notamment deux dispositions de cette ordonnance.
La première concerne le délai SRU (Solidarité et Renouvellement Urbain) qui permet à un acquéreur, signataire d’une promesse ou d’un compromis de vente, de se rétracter dans les 10 jours. Pour tous les compromis et toutes les promesses de ventes signées après le 3 Mars, le délai de rétractation est prolongé jusqu’au 3 juillet.
« A mon sens, dit-il, le délai de réflexion de 10 jours suspendu n’a pas lieu d’être en cette période où les Français sont chez eux et ont justement tout le loisir de réfléchir à leur achat ». Il demande que les délais de SRU courent normalement après la signature d’une promesse ou d’uhn compromis de vente.
Les transactions immobilières bloquées pendant plusieurs mois
La seconde disposition qui ne lui plaît pas concerne le DIA ou Déclaration d’Intention d’Aliéner. C’est le mécanisme qui permet aux Municipalités d’exercer leur droit de préemption. Pour tous les dossiers déposés en mairie après le 13 janvier, le DIA est suspendu, mais peut reprendre à partir du 3 août.
« Les DIA, indique Julien Haussy, sont reportées car les mairies et les services d’urbanisme n’assurent plus le service minimum. Au vu de la situation économique, est-ce important de bloquer les transactions aussi longtemps pour permettre aux mairies de préempter éventuellement un achat ? Je pense qu’elles n’auront de toute façon pas les moyens de le faire et auront d’autres priorités dans l’emploi de leurs ressources afin de soutenir par exemple les personnes en situation de détresse ».
« Ces deux mesures, à elle seules, conclut-il, gèleront toutes les transactions immobilières pendant plusieurs mois, empêchant les personnes qui le souhaitent de déménager, entraînant ainsi des situations dramatiques dans certains cas d’achat/revente. Pour les agences immobilières, cela générera un trou de 5 à 6 mois de CA en 2020. Ce qui est une catastrophe pour toute notre profession et les notaires aussi seront touchés économiquement ».
Il souligne aussi une incohérence, « Enfin, l’Etat et les collectivités locales auront un manque à gagner important du fait de la forte baisse des droits de mutation. En effet, L’Etat demande aux entreprises d’assurer une continuité économique pour ne pas bloquer le pays mais cette ordonnance du 25 mars empêche cette continuité concernant notamment les transactions immobilières.”
Le désespoir des promoteurs et des constructeurs de Maisons Individuelles
De leur côté, les promoteurs et les constructeurs de maisons ne comprennent pas du tout une autre disposition continue dans la même ordonnance du 25 Mars. Elle modifie en effet les procédures de délivrance, d’exécution et de contrôle des autorisations d’urbanisme.
La LCA-FFB a compris que les délais d’instruction pour les demandes de permis de construire étaient suspendus, tout comme le délai dont dispose l’administration pour demander des pièces complémentaires, les délais de recueil des avis préalables et les délais de recours des tiers contre les permis accordés et affichés.
La LCA-FFB estime, premièrement, que la conséquence de ces dispositions est que la délivrance de permis de construire ou d’aménager est suspendue jusqu’au 25 juin. Deuxièmement, les permis délivrés, même ceux qui l’ont été avant le début de l’état d’urgence sanitaire, ne seront purgés des recours avant le 25 octobre 2020.
Un "coup fatal à un secteur économique jugé stratégique"
Grégory Monod, Président de la LCA-FFB, estime que « l’Etat, sans aucune concertation, vient de porter un coup fatal à un secteurs économique qu’il considère paradoxalement indispensable et stratégique pour limiter les effets économiques de l’épidémie qui frappe le pays ».
Il est en effet difficile de comprendre pourquoi ces dispositions ont été prises. Sauf à supposer que ceux qui les ont écrites, ceux qui les ont relues et ceux qui les ont signées, n’ont pas saisi leur portée. Cette portée est d’ailleurs nettement plus étendue que la LCA-FFB ne l’imagine.
De nombreux travaux sur les bâtiments existants, comme une réfection de façade, la reprise d’une toiture, la pose de fenêtres de toit, … requièrent un permis de construire, une autorisation d’urbanisme, un avis préaable des ABF (Architectes des Bâtiments de France), etc. En principe, ils ne peuvent plus démarrer.
Source : batirama.com/ Pascal Poggi