Le Covid 19 génère de nouveaux risques assurantiels pour les acteurs de la Construction prêts à reprendre leur activité. Les assureurs ont esquissé des pistes de réflexion avec la Cinov.
Le débat organisé par la Fédération Cinov, qui regroupe les métiers de la prestation intellectuelle du conseil, de l’ingénierie et du numérique, a posé quelques jalons dans le nouveau débat ouvert autour du risque Covid.
Quelles seront les incidences de la crise en matière d’assurance et comment les différents métiers de la construction devront-ils gérer ces nouveaux risques ? Le guide de l’OPPBTP publié au début du mois d’avril dresse quelques pistes, notamment en évoquant un référent Covid, mais la question reste de savoir, qui pourra à l’avenir, assurer les missions bien spécifiques du référent en question sur les chantiers.
Les assureurs invités à s’exprimer, Grégory Kron (directeur général adjoint du groupe SMA-BTP-) et Michel Klein (directeur des services sinistres à la MAF) ont tout d’abord rappelé que les polices d’assurances souscrites par leurs adhérents étaient maintenues pendant l’arrêt des chantiers notamment en termes de Dommage ouvrage.
Intégrer un nouveau risque : le Covid 19 et la faute inexcusable de l’employeur
Au moment de la reprise des chantiers, il reste cependant à intégrer un nouveau risque, le Covid-19 et surtout à réfléchir à adapter l’organisation des chantiers à ce risque inédit. La responsabilité de l’entreprise peut notamment être mise en cause en allant rechercher la faute inexcusable de l’employeur.
De l’avis de tous, le guide de l’OPPBTP, jugé imparfait (il a été critiqué par les organisations de maîtres d’ouvrages) a le mérite d’exister. Le réécrire serait aujourd’hui trop complexe voire dangereux. Il décrit un certain nombre de recommandations pour garantir la sécurité sanitaire des acteurs des chantiers de construction, tels que le port du masque, la distanciation, la limitation de la coactivité, l’utilisation de gel...
« Ce guide constitue une base référentielle importante sur laquelle peuvent s’appuyer les acteurs du Bâtiment pour décider ou non de la reprise des travaux » affirme Michel Klein. « La réponse de la SMA est claire sur ce sujet », poursuit Grégory Kron : « Nos contrats couvrent les employeurs de bonne foi, et les risques de mises en cause seront faibles pour ceux qui prouvent qu’ils ont respecté des recommandations de l’OPPBTP ».
Le directeur général adjoint de la SMA conseille en outre de mettre à jour le document unique d’évaluation des risques (DUER). « Pour faire jouer la faute inexcusable de l’employeur, le salarié doit ensuite prouver qu’il a été infecté par le Covid sur le chantier et qu’il lui reste des séquelles » précise le directeur général adjoint.
Qui peut jouer le rôle de référent Covid sur le chantier ?
Toutefois, la réorganisation des chantiers implique également la maîtrise d’ouvrage, les maîtres d’œuvre et les coordonnateurs SPS…. Quelle est leur responsabilité en tant qu’acteurs de l’organisation des chantiers vis-à-vis du nouveau risque Covid ? Et qui peut être désigné référent Covid, tel que préconisé dans le guide de l’OPPBTP ?
« Le maître d'ouvrage pourra désigner un référent Covid-19 chargé de coordonner les mesures à mettre en œuvre » indique en effet le guide. Un libellé court qui pose question aux acteurs du Bâtiment. Que doit faire ce référent et comment doit-il interagir avec les autres acteurs du chantier ?
Pour Michel Klein, il s’agit d’une mission complémentaire qui doit être définie et prévue avec la maîtrise d’ouvrage sur le chantier. En effet, selon le directeur des services sinistres de la MAF, chaque intervenant de chantier, maître d’ouvrage, maître d’œuvre, coordinateurs SPS, entreprises de travaux, bureaux de contrôle, … gèrent des responsabilités bien définies qui sont incompatibles avec une mission supplémentaire de référent Covid sur le chantier.
Designer un référent qui demeure indépendant
« Il faut se diriger vers un assistant Covid à la maîtrise d’ouvrage ou la maîtrise d’oeuvre qui pourra coordonner l’ensemble des acteurs du chantier tout en restant indépendant. Il faudra cadrer sa mission car ce nouvel acteur ne doit pas avoir des responsabilités trop difficiles voire impossibles à assurer » recommande pour sa part Michel Klein.
L’engagement contractuel déterminera les missions du référent et la situation doit être analysée selon les risques encourus. Le référent Covid doit en effet assurer une mission de type intellectuelle, et il faut réfléchir précisément au contenu de sa mission et de son contrat et organiser les risques ensemble, avec les assureurs, souligne la fédération Cinov. Celle-ci précise qu’elle travaille de son côté à la rédaction d’un document sur le référent Covid en maîtrise d’œuvre.
« Clairement, il faudra être vigilant et tracer toutes les actions menées. La culture de l’écrit est très importante dans la gestion de la crise », insiste Grégory Kron. La responsabilité du référent ne pourrait d’ailleurs pas être mise en cause au titre de la garantie décennale. Seule sa responsabilité civile pourrait être engagée, précise Grégory Kron qui ajoute que la Fédération française de l’assurance (FFA) doit se prononcer sur l’accompagnement des référents Covid. Ce qui suppose de déterminer précisément le contenu de leurs missions et de ne pas aller au-delà de leurs obligations…
Source : batirama.com / Fabienne Leroy