Le Plan Bâtiment Durable, l?Ademe, le CSTB et l?Observatoire de l?Immobilier Durable (OID) se préoccupent des bâtiments de demain, de manière différente.
Comme chacun sait, le parc des bâtiments existants se renouvelle lentement. Pourtant, la pandémie du Covid-19, l’accélération du changement climatique a mis au premier plan la nécessité d’adapter nos bâtiments à notre future mode de vie, pour autant qu’on l’imagine. Deux groupes d’organismes différents ont pris ce problème à bras-le-corps.
L’Ademe et le CSTB ont lancé, début 2020, la démarche de prospective collective « Imaginons ensemble les bâtiments de demain » pour identifier les différents scénarios possibles pour l’évolution du patrimoine immobilier de la France.
L’Observatoire de l’Immobilier Durable (OID) a pour sa part développé un outil – nommé BAT-Adapt – pour évaluer la résilience des bâtiments existants face au risque climatique multiforme et proposer des mesures pour accroître cette résilience, bâtiment par bâtiment.
Les facteurs clés de l’évolution du patrimoine immobilier
Animé par Albane Gaspard (Ademe) et par Jean Christophe Vizier (CSTB/Ademe), un groupe de quinze personnes a constitué début 2020 le comité de prospective de la démarche « Imaginons ensemble les bâtiments de demain ». Ce travail est une démarche prospective à l’horizon 2035 et 2050 et comprendra trois étapes d’une durée totale de 18 mois : identification des facteurs clés, analyse de chacun de ces facteurs, exploration des possibles scénarios.
La première étape de leur travail, l’identification des facteurs clés de l’évolution du patrimoine immobilier, a donné lieu à un rapport de trente pages, publié le 27 avril 2020 par le Plan Bâtiment Durable.
Les facteurs clés identifiés sont au nombre de 22 et peuvent être rassemblés en quatre groupes. La demande, l’offre, le contexte et la régulation (au sens des politiques et règlementations d’urbanisme). ©Ademe/CSTB
L'impact du télétravail sur la conception des logements
Le nombre de personnes par logement et la surface des logements constitue un aspect fondamental, notamment pour parvenir à une bonne adéquation entre l’offre et la demande de logements et réduire autant que possible le nombre des logements vacants.
Le rapport souligne que ce facteur doit être rapproché du facteur de contexte « Répartition des lieux de vie et des activités sur le territoire », car la demande de logement est très fortement dépendante de la localisation.
La crise du Covid-19 et le confinement qui en est résulté ont montré tout l’intérêt, mais aussi les limites, du télétravail, à la fois en termes d’organisation des logements – peu disposent d’un espace aménageable en Home office – et d’infrastructure numérique nécessaire. Cela peut conduire à ré-imaginer le schéma traditionnel des grandes villes dans lesquelles, on habite à l’Est et on utilise divers moyens de transport pour aller travailler à l’Ouest, ou inversement.
Le facteur vieillissement de la population influera aussi beaucoup sur la localisation et l’aménagement des logements. Tout comme d’ailleurs l’évolution de la nature des activités économiques sur le territoire. Certaines – la logistique, par exemple – ont explosé durant le confinement. Tandis que le brutal et puissant développement du télétravail va sans doute pousser à reconsidérer le développement continu des surfaces de bureaux et leur concentration dans des zones précises.
En même temps, si les appels à la réindustrialisation de la France, suite à la crise sanitaire du Covid-19 qui a montré les limites de la mondialisation dans certains domaines, se traduisent réellement dans les faits, l’emploi industriel peut rebondir. Il est peu générateur de télétravail et requiert une présence physique sur les lieux de production.
Posséder ou louer ?
La crise économique profonde dans laquelle nous nous engageons aura certainement un effet à la fois sur le prix des bâtiments et sur les ressources des ménages et des entreprises. Ce qui peut contraindre à une remise en cause de l’intérêt de la propriété au sens patrimonial et au développement de nouvelles solutions : la coopérative pour les logements collectifs, la location pour les entreprises, voire le développement de nouveaux modèles de coworking et de coliving.
Les politiques publiques vont peser sur les évolutions de l’immobilier : Stratégie Nationale Bas Carbone, Transition Energétique, règles d’urbanisme, RE2020 et suivantes, …
Ce travail de l’Ademe et du CSTB se rapproche de celui de l’OID à propos de l’obsolescence des bâtiments. Ce premier rapport note en effet que l’obsolescence d’un bâtiment nait de multiples facteurs : il ne correspond plus aux besoins, mais aussi il peut être menacé par le phénomène du changement climatique au sens large. Le retrait d’un trait de côte peut condamner un bâtiment. Un risque récurrent d’inondation ruine la valeur patrimoniale de toute une zone, etc.
Prendre en compte tous les risques
L’OID a en effet construit un outil d’évaluation multirisque lié à l’effet du changement climatique sur les bâtiments. Baptisé Bat-ADAPT, il compile les travaux de divers centres de recherches publics, comme Météo France ou le BRGM, pour prendre en compte simultanément plusieurs risques : vagues de chaleur, sécheresses, retrait et gonflement des argiles, inondations et submersions marines.
Accessible sur la plateforme Taloen, l’outil Bat-ADAPT permet de saisir l’adresse d’un bâtiment – prenons au hasard le 23 quai des Queyries 33000 Bordeaux – et de mesurer chacun de ces risques climatiques, ainsi que leur combinaison. Après avoir saisi une description rapide du bâtiment en quelques clics, l’outil génère une fiche synthétique. ©OID
La fiche synthétique Bat-ADAPT montre pour une adresse précise, le profil de risque d’exposition climatique – en l’occurrence pour notre adresse, le risque le plus important est celui d’une remontée des eaux de nappe – et le profil de sensibilité du bâtiment à l’horizon 2030. ©OID
Bat-ADAPT est un véritable outil d’aide à la décision pour les Maîtres d’Ouvrage. Son but est de proposer une évaluation rationnelle des risques physiques liés au changement climatique, afin de rendre les bâtiments plus résilients et d’orienter les décisions de rénovation du patrimoine existant.
Source : batirama.com / Pascal Poggi