Le béton est le matériau de construction par excellence. Plus performant qu?hier, le béton est aujourd?hui plus exigeant et son contexte normatif est plus complexe? Le point sur ce qu?un artisan doit connaître avant d?utiliser du béton.
Les premiers brevets du matériau béton datent de 1849. Même si le béton a permis de réaliser des ouvrages complexes, il a longtemps souffert de l’image qui lui est accolée, celle des grands ensembles construits à la va-vite dans les années 60 – 70.
Depuis 20 ans, grâce à la chimie des plastifiants, le béton n’est plus ce qu’il a été. Il autorise aujourd’hui des audaces techniques ou esthétiques où les lois de la physique sont souvent dépassées.
Un contexte normatif précis
Aujourd’hui, le concepteur a plus de liberté. En effet, le béton, matériau que l’on devrait écrire avec un grand “B” fait reculer les limites du possible, mais le contexte normatif est plus difficile à appréhender.
Concevoir et mettre en œuvre du béton sont particulièrement bien encadrés par un corpus de normes. Par ailleurs, en 2009 a été signé un protocole entre les utilisateurs et les fabricants de béton prêt-à-l’emploi.
Où se procurer les documents ?
Concernant les NF DTU, la NF EN 206-1, l’Eurocode 2, le BAEL 91-99, tous ces documents sont téléchargeables (payant) sur les sites www.cstb.fr ou www.afnor.fr. Le fascicule 65 A est téléchargeable gratuitement sur de nombreux sites internet visant le béton armé.
Le protocole visant les commandes de béton prêt-à-l’emploi a été signé par un certain nombre d’organisations professionnelles et le Syndicat National du Béton Prêt-à-l’Emploi (SNBPE) le 14 octobre 2009. Ce protocole est très important et doit être cité dans les pièces de marché, si l’entreprise souhaite s’en prévaloir.
Pour télécharger (gratuit) ce protocole : www.fntp.fr / espace grand public / technique. Au niveau du matériau béton, la norme NF EN 206-1 d’avril 2004 est incontournable, aussi bien pour les marchés privés que publics, qu’ils soient fabriqués sur le chantier ou en centrale de Béton prêt-à-l’emploi.
Il faut donc choisir le bon béton pour la bonne partie d’ouvrage, en veillant à prohiber tout ajout d’eau après sa fabrication.
Question 1 : qu’est ce qu’un bon béton ?
Longtemps, le critère de choix d’un béton a été sa résistance. Aujourd’hui, même si la résistance est un critère important, il n’est pas suffisant. Le béton doit être en adéquation avec l’environnement dans lequel il va évoluer.
Un béton en environnement marin a de fortes chances de moins bien vieillir qu’un béton situé à l’intérieur d’un bâtiment. C’est pour cette raison que la norme NF EN 206-1 définit des classes d’exposition.
Le risque le plus fréquent
pour les bétons armés est celui de la carbonatation du béton qui entraîne la rouille des armatures avec les conséquences que l’on connaît. 4 classes sont à prendre en compte : XC1 (sec ou humide en permanence) ; XC2 (humide rarement sec) ; XC3 (humidité modérée) et XC4 (alternance d’humidité et de séchage).
Le deuxième risque
à prendre en compte est celui de l’attaque du gel/dégel avec ou sans agent de déverglaçage. En fonction de l’intensité du gel et de la présence d’un agent de déverglaçage, la classe d’exposition sera :- XF1 (gel faible ou modéré sans agent de déverglaçage) ;
- XF2 (gel faible ou modéré avec agent de déverglaçage ;
- XF3 (gel sévère sans agent de déverglaçage) et
- XF4 (gel sévère avec agent de déverglaçage).
Prenons deux exemples : un voile intérieur aura une classe d’exposition XC1, un voile extérieur non protégé aura (si gel faible ou modéré) une classe d’exposition XF1.
Dans les mêmes conditions une rampe d’accès à un parking (avec sels de déverglaçage) aura une classe d’exposition XF2.
Choisir la bonne classe d’exposition pour le béton est fondamental, car elle conditionne la formulation du béton. Sur les bons de livraisons de béton prêt-à-l’emploi, l’utilisateur doit être très vigilant sur ce point et le cas échéant refuser le béton, s’il ne correspond pas à ce qu’il a commandé.
Des classes d’exposition particulières peuvent également être prises en considération :
- XS1, XS2, XS3 pour le risque de corrosion induite par les chlorures présents dans l’eau de mer ;
- XD1, XD2 ou XD3 pour de la corrosion induite par des chlorures autres que marins (piscines) ;
- XA1, XA2 ou XA3 pour de l’attaque chimique?: fondations, bâtiments à usage agricole…
- Gel faible ou modéré :
- XF1 : sans agent de déverglaçage
- XF2 : avec agent de déverglaçage
- Gel sévère :
- XF3 : sans agent de déverglaçage
- XF4 : avec agent de déverglaçage
Les zones de gel modéré à gel sévère peuvent varier en fonction de l’altitude (Norme FD P18-326 – Béton – Zones de gel en France).
Ajout d'eau : non merci
La formulation étant optimisée par la centrale de béton, tout ajout d’eau fait perdre de la résistance au béton. Si l’utilisateur souhaite une consistance fluide, il doit le préciser à son bétonnier et surtout ne pas ajouter d’eau dans son béton.
Vous avez dit BAP ?
Dans la famille des bétons fluides, il y a les bétons auto-plaçants (BAP) horizontaux ou verticaux, qui se mettent en place tout seuls sans le recours à la vibration et pour des résistances équivalentes à des bétons classiques. En revanche, le coût de ces bétons est plus élevé !
Ces bétons sont fréquemment préconisés par les architectes, car ils permettent d’obtenir des parements bruts de décoffrage avec des modénatures complexes. Néanmoins, les BAP peuvent rendre d’incontournables services à l’utilisateur, notamment pour les dallages.
Attention à ne pas oublier dans ce cas de figure l’application d’un produit de cure.
Question 2 : Etes-vous BAEL ou Eurocode 2 ?
En termes de conception, longtemps le BAEL (béton armé états limites) a fait autorité. Désormais, les Eurocodes s’imposent et dans le cas qui nous intéresse, il s’agit de l’Eurocode 2 – Calcul des structures en béton. Exit le BAEL ? Pas tout à fait.
Rien n’interdit à l’entrepreneur, si son client est d’accord, d’avoir recours au BAEL ! En revanche, si son ouvrage a été calculé aux Eurocodes, l’entrepreneur devra se conformer aux exigences de l’Eurocode 2. La raison tient au fait qu’il n’est pas possible de panacher les textes relatifs à la conception. Un ouvrage conçu aux Eurocodes ne pourra donc pas faire appel au BAEL.
5 cm, 3 cm, 1 cm sont les enrobages minimaux du BAEL afin de protéger les armatures exposées à différents degrés d’exposition.
L’enrobage de toute armature est au moins égal à :
- 5 cm pour les ouvrages à la mer ou exposés aux embruns ou aux brouillards
- 3 cm pour des parois coffrées ou non qui sont soumises (ou sont susceptibles de l’être) à des actions agressives ou à des intempéries, ou des condensations, ou encore, eu égard à la destination des ouvrages, au contact d’un liquide.
- 1 cm pour des parois qui seraient situées dans des locaux couverts et clos qui ne seraient pas exposées aux condensations.
L’enrobage, au sens de l’Eurocode 2, est une dimension calculée à partir d’un certain nombre de paramètres (classe structurale de l’ouvrage, classe d’exposition du béton…). Le concepteur doit ainsi calculer l’enrobage et préciser sa valeur sur les plans. A l’entrepreneur de respecter ces valeurs.
Exécution : attention aux tolérances pour les ouvrages horizontaux et verticaux !
Conformément au DTU 21, il existe 4 qualités de parement : élémentaire, ordinaire, courant et soigné.
Le parement élémentaire
est généralement réservé aux parois de locaux utilitaires pour lesquels une finition ordinaire n’est pas nécessaire ou aux parois destinées, soit à recevoir une finition rapportée non directement appliquée sur le support, soit à être masquées par une cloison de doublage indépendante de ces parois.
Le parement ordinaire peut convenir pour les emplois ci-dessus lorsque la paroi est destinée à recevoir un enduit de parement traditionnel épais.
Le parement courant
correspond, par exemple, à des ouvrages susceptibles de recevoir des finitions classiques de papiers peints ou peintures moyennant un rebouchage préalable et l’application d’un enduit garnissant (sauf indication contraire des DPM, ces travaux de rebouchage et enduit garnissant ne sont pas à la charge de l’entreprise de gros œuvre).
Le parement soigné
convient aux mêmes usages que le parement courant mais sa meilleure finition permet de limiter les travaux ultérieurs de revêtement éventuel et n’exige qu’une moindre préparation.
En l’absence de toute indication des DPM
, les parements ordinaires sont retenus. Cependant le parement extérieur des ouvrages exposés à la pluie doit, lorsqu’il est destiné à rester brut ou à être revêtu d’une peinture ou d’un carrelage collé, être un parement soigné. Des qualités de parement différentes peuvent être exigées. Elles sont alors définies dans les DPM (parements bouchardés, lavés, etc.).
CARACTÉRISTIQUES DE PLANÉITÉ DES PAREMENTS | ||
Parement | Planéité d'ensemble rapportée à la règle de 2 m | Planéité locale (hors joints) rapportée à un réglet de 0,20 m |
Elémentaire | Pas de spécification particulière | |
Ordinaire | 15 mm | 6 mm |
Courant | 7 mm | 2 mm |
Soigné | 5 mm | 2 mm |
SPÉCIFICATIONS CONCERNANT L'ÉTAT DES DALLES ET DES PLANCHERS | ||
Etat de surface | Planéité d'ensemble rapportée à la règle de 2 m | Planéité locale (hors joints) rapportée à un réglet de 0,20 m |
Brut de règle | 15 mm | Pas de spécification particulière |
Surfacé | 10 mm | 3 mm |
Lissé | 7 mm | 2 mm |
* Attention, dans le cas où les DPM indiquent que le support est destiné à recevoir un revêtement collé ou une sous couche isolante ou encore un revêtement de sol en pose scellée désolidarisée, les tolérances sont celles qui s’imposent à un état de surface lissé. En l’absence de toute indication des DPM, l’état de surface est surfacé. |
Comment éviter les litiges
Un excès de gaines, de conduites, de fourreaux dans les dalles ou les dallages conduit à de la fissuration et des litiges entre le maître d’ouvrage et l’entrepreneur…
Les canalisations, gaines, fourreaux, etc., incorporés doivent satisfaire, tous corps d’état confondus, aux spécifications suivantes :
- être situés entre les nappes d’armature (lorsqu’elles existent), de chacune des deux faces,
- permettre un enrobage par le béton au moins égal au diamètre de la plus grosse gaine, avec un minimum de 4cm,
- présenter, sauf localement, une distance horizontale entre elles au moins égale à leur diamètre, avec un minimum de 4cm,
- au droit des croisements ou empilages localisés, ne pas occuper plus de la demi-épaisseur et permettre un bétonnage correct des zones de concentration ponctuelle de gaines au voisinage des raccordements dans les boîtiers.
* Ce thème a été traité le 6 avril 2011 par Wilfried Pillard, directeur technique de l’Union de la maçonnerie et du gros œuvre lors de la matinale du Syndicat des entrepreneurs de construction de Paris Ile-de-France.
Source : batirama.com