La pierre naturelle est-elle compatible avec la RT 2012 ? Oui, selon un expert du CTMNC. Et les arguments en sa faveur sont plus nombreux qu?on le croit !
Daniel Palenzuela, expert thermique au CTMNC (Centre technique de matériaux naturels de construction), fait le point sur la caractérisation thermique de la pierre naturelle, en vue d’optimiser les performances énergétiques des ouvrages en pierre, dans le cadre de la nouvelle réglementation thermique.
Peut-on construire en pierre naturelle et respecter la RT 2012 ?
C’est pour argumenter la réponse positive qu’il apporte à cette question que Daniel Palenzuela présente les travaux du CTMNC.
Après un rappel des objectifs du Grenelle de l’environnement, dont la rénovation des 800 000 logements sociaux les plus énergivores d’ici 2020 et l’engagement des travaux de rénovation énergétique de tous les bâtiments d’état avant la fin 2012, l’expert résume la transition de la TR 2005 à la RT 2012.
Il rappelle les notions de Bbiomax, de Cmax, l’exigence de confort d’été et les exigences minimales qui caractérisent la nouvelle RT, ainsi que les dates d’application de cette dernière.
Comment se positionne la pierre naturelle au regard des nouvelles exigences ?
Les logiciels de calcul de la RT intègrent les caractéristiques du matériau
- au niveau de l’isolation thermique des murs extérieurs : par le biais du coefficient de transmission thermique (Up), qui dépend de la conductivité thermique de la pierre, ou par la résistance thermique (R) de la paroi ;
- au niveau de l’inertie thermique : par la capacité thermique de la pierre (c’est-à-dire la capacité thermique de la paroi à être inerte par rapport à la température extérieure, ce qui concerne surtout le confort d’été) ;
- au niveau des ponts thermiques : par les coefficients « psi » pour chaque liaison (surtout les liaisons mur-plancher).
Tests in situ et en laboratoire
Le CTMNC a commandé une étude qui analyse in situ les propriétés thermo-physiques d’un mur en pierre de Noyant. Le mur d’un pavillon, situé à Septmonts (02), a été instrumenté d’une sonde de température d’air et de 2 fluxmètres (un noir et un beige couleur de la pierre), à l’intérieur comme à l’extérieur.
Une centrale d’acquisition des données installée à l’intérieur complète le dispositif. Le traitement des mesures de température et de flux thermique en fonction du temps donne les courbes de conductivité thermique et de capacité thermique caractéristiques de cette pierre.
Les mêmes mesures effectuées en laboratoire montrent l’influence de la teneur en eau de la pierre (le mur in situ contient de 4 à 10 % d’eau selon la période de l’année) : plus l’humidité est importante, plus la conductivité est élevée. De même, la teneur en eau fait varier la capacité à emmagasiner la chaleur.
Le déphasage (décalage dans le temps des sollicitations en température), de 8 à 10 heures, montre que la paroi amortit les variations de flux thermique en surface et a un effet sur les variations de flux thermique dans le temps.
La RT 2005 donnait un garde-fou avec une R max de 2,05 m2.K/W pour un mur extérieur, ce qui à titre indicatif, correspond à une épaisseur de 1,7 m pour un mur de calcaire très tendre, et à 7,2 m pour du marbre (équivalent à 4 m de béton plein, ou encore 8 cm de laine de verre ou de polystyrène expansé). La pierre doit donc bien entendu être associée à un isolant thermique.
La RT 2012, elle, n’impose plus de valeur seuil mais exige de garantir un Bbio, ce qui implique également de bien isoler le bâtiment en pierre naturelle.
La position de l’isolant sur le mur est importante, comme l’a prouvé une étude sur des murs isolés à l’intérieur, à l’extérieur et au centre. Le meilleur résultat est obtenu avec une position centrale, au milieu d’un double mur, qui fournit une bonne isolation et permet de bénéficier de l’inertie thermique de la pierre.
Chasse aux ponts thermiques
Les ponts thermiques, postes importants de déperdition de chaleur, font l’objet d’une attention particulière. Une étude de liaison mur isolé intérieur-plancher-Intermédiaire avec deux types de plancher (un isolé et un en béton seul), a analysé trois cas : plancher non isolé en about de dalle, planelle et isolant de 1 cm, et enfin planelle et isolant débordant de 10 cm de la dalle.
Le dernier cas a montré une diminution de 20 % des déperditions thermiques (un guide sur les ponts thermiques pour la pierre naturelle sera très prochainement téléchargeable gratuitement sur le site du CTMNC).
D’autres études restent à mener pour poursuivre la caractérisation de la pierre naturelle dans le cadre de la RT 2012. D’ici là, quelques constructions en pierre massive montrent que pierre naturelle n’est pas incompatible avec réglementation thermique exigeante, ce dont ne doutent pas quelques convaincus.
Citons par exemple les logements collectifs sociaux construits par l’architecte Laurent Lehmann, une expérience que ce dernier a partagée avec les visiteurs de Batimat dans sa présentation du jeudi 10 novembre.
Source : batirama.com / Emmanuelle Jeanson