Deux ordonnances transposent en droit français la « Renewable Energy Directive » 2018/2001 du 11 décembre 2018 : elles clarifient le paysage des ENR en ouvrant des nouvelles possibilités aux collectivités.
Texte relatif à la promotion de l’utilisation de l’énergie produite à partir de sources renouvelables, la directive RED II 2018/2001 du 11 décembre 2018, seconde directive européenne sur les énergies renouvelables, vient d’être transposée en droit français par deux ordonnances parues au JO du 4 mars.
L’ordonnance n° 2021-235 porte uniquement sur le volet durabilité des bioénergies de la directive européenne 2018/2001. Elle traite principalement des énergies renouvelables issues de la biomasse et celles d’origine non biologique ; ces dernières, très spécifiques, comprennent notamment les futurs carburants pour avions mis au point à partir de rejets industriels.
L’ordonnance n° 2021-236 transpose les autres volets de la directives RED II (les garanties d’origine…) ainsi que la directive européenne 2019/944 sur les règles communes pour le marché intérieur de l’électricité.
Biomasse : des exigences de durabilité et de réduction d’émissions de gaz à effet de serre
L’ordonnance n° 2021-235 porte sur les énergies renouvelables définies par l’article L. 211-2 du code de l’énergie (1) et oblige les installations de production de bioénergies à de nouveaux seuils d’exigence en matière de « durabilité et de réduction d’émissions de gaz à effet de serre ».
Le code de l’énergie est complété de six nouveaux articles – L. 281-5 à L281-10 – qui indiquent les minima de réduction d’émissions pour les biocarburants et biogaz utilisées pour le transport ou injectés dans les réseaux de gaz naturel.
Ainsi, le potentiel de réduction des gaz à effet de serre est d’au moins 50 % pour les installations mises en service avant le 6 octobre 2015 ; il passe à 65 % pour celles datant du 31 décembre 2020 et passera à 80 % pour les futures installations mises en services après le 1er janvier 2026.
Ces articles imposent une traçabilité de l’origine de matières premières, qu’il s’agisse de la biomasse agricole, des déchets, des produits issus de l’exploitation forestière… Le but clairement exprimé de ces mesures est d’assurer la pérennité de la filière, de na pas détruire les sols (dans le cas de l’interdiction d’exploitation des tourbières) et d’assurer la biodiversité, tant en agriculture qu’en forêt.
Cependant, le texte comprend çà et là plusieurs alinéas traitant des exceptions qui risquent de provoquer le contournement des grands principes affichés.
Le second objectif de cette ordonnance est de permettre de comptabiliser les émissions de gaz à effet de serre et de rapporter ces chiffres auprès de l’Union européenne.
Électricité : une exploitation cadrée
Cette ordonnance fixe par ailleurs les modalités d’exploitation de cette biomasse pour la production d’électricité. Pour celles d’une puissance nominale inférieure à 50 MW, l’obligation minimale sera de capter ou stocker le CO2 issu de la biomasse et de ne pas utiliser les énergies fossiles comme énergie principale.
Pour celle de 50 à 100 MW, il faut recourir à la cogénération à haut rendement ou, pour la production d’électricité seule, aux meilleures technologies disponibles au regard de la directive européenne 2010/75/UE sur les émissions industrielles… et au captage ou stockage de CO2.
Pour les installations de plus de 100 MW, la cogénération à haut rendement s’impose, sinon la production d’électricité seule avec un rendement d’au moins 36 % et le captage/stockage de CO2. Ces mesures s’appliqueront dès le 25 décembre 2021.
Communautés et citoyens, acteurs énergétiques
L’ordonnance n° 2021-236 vient quant à elle bouleverser les marchés de l’électricité, notamment les marchés locaux. En premier lieu, elle clarifie de sujet des garanties d’origine. En particulier, un organisme est créé pour délivrer les certificats, les transférer ou les annuler. Ce sésame peut ouvrir droit à obligation d’achat ou complément de rémunération pour le producteur.
Ce sujet de la garantie d’origine porte aussi sur le gaz renouvelable. Les communes et groupements de communes peuvent en bénéficier à titre gratuit pour leur propre consommation.
Plus intéressant pour les collectivités locales, l’article 5 de l’ordonnance, sur l’énergie citoyenne et l’autoconsommation, crée l’opportunité d’établir des communautés d’énergies avec investissement participatif. Les différents chapitres de cet article décrivent les modalités de constitution des sociétés, leur objet – fourniture d’électricité, gaz naturel, chaleur ou froid –, les modes de financement… Une mise à plat qui intervient après des années de débats.
1- Les sources d'énergies renouvelables sont les énergies éolienne, solaire, géothermique, aérothermique, hydrothermique, marine et hydraulique, ainsi que l'énergie issue de la biomasse, du gaz de décharge, du gaz de stations d'épuration d'eaux usées et du biogaz.
La biomasse est la fraction biodégradable des produits, déchets et résidus provenant de l'agriculture, y compris les substances végétales et animales issues de la terre et de la mer, de la sylviculture et des industries connexes, ainsi que la fraction biodégradable des déchets industriels et ménagers.
2- Voir le JO du 4 mars 2021, textes 1 à 6.
Source : batirama.com/ Bernard Reinteau