Une nouvelle solution de façade bois sécurisée vis-à-vis des risques de propagation au feu voit le jour et favorisera le développement attendu de bâtiments de grande hauteur.
Piloté par Bois HD, le centre d’ingénierie de l’école d’ingénieurs ESB Bois & matériaux biosourcés, le Groupe Feu est né d’un constat : « En 2016, nous nous sommes retrouvés dans une situation où les textes parus sur la sécurité incendie des façades bois nous compliquaient la vie », se souvient Yves-Marie Ligot, à la tête du BET Ligot à Houilles (78) et représentant de l’association IBC au sein de ce Groupe Feu dont il est à l’initiative.
« Moi, par exemple, en tant que bureau d’études techniques spécialisé dans la construction bois, mais aussi d’autres, en tant qu’entreprises, voyaient une grande difficulté dans la réalisation de ces ouvrages ».
Et pour cause. Pour favoriser la construction d’immeubles bois multi-étages en application de l’IT 249, FCBA et le CSTB, en lien avec le Codifab et France Bois Forêt éditent en 2016 un guide Bois construction et propagation du feu par les façades.
« Or, si les solutions sont techniquement efficaces, elles restent difficiles à mettre en œuvre d’un point de vue opérationnel, avec des coûts supplémentaires, et compliquent la prescription », continue le dirigeant. De plus, la réglementation impose l’obtention d’une appréciation de laboratoire agréé qui atteste la non propagation du feu par les façades.
Liée à la réalisation d’un essai LEPIR 2 avec création d’une façade complète de deux niveaux – 7,10 m de hauteur par 5,60 m de large – son coût est estimé à 40 000 euros. « Un budget difficile à réunir pour des entreprises de la filière bois », souligne Yves-Marie Ligot.
D’où la constitution de ce Groupe Feu (cf : encadré) qui regroupe 14 acteurs de la construction bois. Le but : mutualiser expertises, moyens, et élaborer une solution optimisée d’un complexe, réglementaire mais différente.
Yves-Marie Ligot, est à la tête du BET Ligot à Houilles (78) et représente l’association IBC au sein de ce Groupe Feu
Conserver des recoupements de 50 mm
« Cette solution s’est construite au fur et à mesure de l’apprentissage que nous avons fait les uns des autres, par rapport aux différents paramètre influents et à des objectifs communs », reprend Yves-Marie Ligot.
Le premier : réduire les profondeurs de recoupement. Celles préconisées dans le guide Bois construction et propagation du feu par les façades « peuvent aller jusqu’à 200 mm voire 250 mm. Or, ces dimensions sont difficiles à faire accepter aux architectes car la corniche dépasse en extérieur ».
Autre casse-tête : « où implante-t-on un bâtiment en bord de rue ? Le mesure-t-on au niveau du bardage bois ou au débord ? Dans ce cas, la bâtiment doit être reculé par rapport à la limite du terrain avec à la clé un rendement constructible moins bon ». Un des points d’entrée de l’étude du Groupe Feu a donc été de conserver des recoupements de l’ordre de 50 mm.
Une alternative, en plus, économique puisqu’il s’agit de pièces laquées, pliées après laquage. A contrario, « la solution prévue par le guide est mécano-soudée donc laquée a posteriori, avec des délais d’approvisionnement et un surcoût. En plus, nous devons ajouter des raidisseurs à ces recoupements à chaque niveau d’immeuble », précise l’initiateur du Groupe Feu.
Fire Stop inutile
Or, ces prescriptions sont paradoxales, « quand nous faisons appel au maximum à la préfabrication pour la réalisation de façades bois, justement pour réduire les coûts comme les délais de chantier », appuie Yves-Marie Ligot, tout en jaugeant l’économie réalisée : « le surcoût de la tôle mécano-soudée rapportée à des hauteurs de façade de l’ordre de 3 mètres est de 35 euros par mètre carré ».
Idem pour un autre accessoire prévu dans le guide FCBA, CSTB : le dispositif d’obturation de lame d’air ventilée ou Fire Stop. « La présence du recoupement ne le rend pas utile. Nous étions un peu dans une configuration ceinture et bretelles », illustre le dirigeant.
« En s’affranchissant de ce Fire Stop, l’économie est de l’ordre de 45 euros par mètre linéaire, soit un gain de 15 euros par mètre carré, toujours rapporté à une hauteur de trois mètres, ». Des réponses donc techniques et esthétiques qui se révèlent aussi économiques.
« Les bailleurs sociaux, par exemple, n’ont pas d’argent à dépenser en plus juste pour le plaisir de construire des logements en bois. En augmentant le coût de nos solutions, nous partions avec un handicap ». De plus cette réponse anticipe les enjeux de la RE 2020 qui dès le 1er janvier 2022 devrait faire la part belle au bois.
Comme les prochains JO 2024. « Il est primordial de rester dans les prix du marché », conclut Yves-Marie Ligot. Pour que fleurisse cette offre de bâtiments de grande hauteur en bois, en toute conformité avec les exigences attendues en matière de sécurité incendie. Sans en payer le prix.
Qui sont les membres du Groupe Feu ?
Constitué en 2017, il a rassemblé pendant ces trois années d’expérimentations et de solution, l’association Ingénierie Bois Construction (bureaux d’étude bois), l’organisation professionnelle UICB (Union des Industriels et Constructeurs Bois) et les entreprises Bouygues Construction (78), CMB (79), Construction Bois EMG (22), FP Bois (40), Groupe ISB (35), Lignalpes (74), Maître Cube (75), Piveteau Bois (85), Protac (22), Siniat (84) SivalBP (74) et Techniwood (75). |
Les atouts de la Solution technique du Groupe Feu
La solution est constituée d’un complexe qui comprend l’ensemble du mur, composé de la structure, du parement extérieur/intérieur et de l’isolation, en structure et bardage bois. Elle devait permettre d’obtenir une appréciation de laboratoire relative au comportement au feu d’un élément de façade selon le paragraphe 5.3 de l’IT 249 : 2010 et conforme à l’arrêté du 7 août 2019 du ministère de l’intérieur et du logement.
Après une recherche des facteurs influençants par des essais petite échelle, de la modélisation numérique et un premier essai LEPIR 2 (laboratoire expérimental par incendie réel à deux niveaux) d’orientation réalisé en février 2020, le Groupe Feu a obtenu chez Efectis, un essai LEPIR 2 qualifiant sur la conception de façade en décembre 2020. Ses plus :
Cette appréciation de laboratoire est nominative et donc réservée en exclusivité aux membres du groupe. La solution constitue une alternative aux propositions recensées dans le guide Bois Construction et Propagation du feu par les façades et qui répondent à l’objectif de limiter la propagation du feu d’un niveau à l’autre d’un bâtiment ou de manière latérale.
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Source : batirama.com/ Stéphanie Lacaze Haertelmeyer