L?Europe a préparé une liste d?activités favorables à la protection de l?environnement qu?elle entend promouvoir. Ce qui ne figure pas sur la liste ne sera pas aidé. Que trouve-t-on sur cette liste ?
Comprenons le contexte. L’Union Européenne est déterminée à prendre une part active dans la protection du climat et contre sa dégradation. Cela se concrétise notamment par le fait que les Etats membres ont accepté la création de Green Bonds (obligations vertes) européens pour financer cette lutte contre la dégradation du climat.
Pour clarifier les débats, en quelque sorte, et pour guider les investisseurs, la Commission Européenne a publié le 21 avril dernier un premier « Acte Délégué », ainsi que ses deux annexes, qui dressent en plus de 500 pages au total, la liste des activités qui pourront être financées par l’Europe à l’aide de ses obligations vertes et de son budget.
La Taxonomie Européenne
La Commission appelle ça une Taxonomie. C’est en gros une liste qui rassemble dans un grand nombre de domaines, des forêts à la pêche, en passant par l’industrie, la production d’énergie, d’eau potable et le bâtiment, toutes les activités de production et de services que l’Union Européenne considère comme favorables à la protection de l’environnement.
Tout ce qui n’est pas sur la liste ne sera pas financé. En creux, les activités qui ne sont pas listées sont clairement considérées comme néfastes à l’équilibre climatique de la planète.
Il manque l’énergie nucléaire dans la taxonomie. L’Europe se donne encore un peu de tempos de réflexion et a demandé de nouvelles expertises sur ce sujet. En revanche, en ce qui concerne l’énergie, la fabrication de produits et systèmes pour la production d’énergie renouvelables est décrite page 39 de l’Annexe 1. La fabrication d’équipements pour la production et l’utilisation d’hydrogène apparaît page 41, suivie de la fabrication de batteries rechargeables (p 46), de la fabrication d’équipements et de composants efficaces du point de vue énergétique pour le bâtiment (p48).
Toutes ces sections renvoient à la codification NACE ou Nomenclature statistique des Activités économiques dans la Communauté Européenne qui contient 615 codes différents et été mise à jour en 2008 pour la dernière fois.
Parmi les activités listées au titre de la fabrication d’équipements efficaces du point de vue énergétique pour le bâtiment, on trouve notamment la production d’équipements d’éclairage électrique (code NACE C27.4.0), la fabrication d’appareils électriques domestiques (C27.5.1) ou encore la fabrication de pompes et de compresseurs (C28.1.3), voire de vannes et robinets (C28.1.4).
Des performances minimales sont exigées
Ces codifications sont indicatives et certaines activités dont la codification n’est pas citée peuvent demander à être incluses en apportant la preuve – d’une manière qui n’est pas définie – de leur vertitude.
La plupart des activités listées sont accompagnées d’exigences de performances minimales pour prétendre bénéficier de fonds européens. Par exemple, page 52 de l’annexe 1, la production de clinker, de ciment ou de liants alternatifs (code C23.5.1) ne peut être soutenue que si la fabrication de clinker de ciment gris génère moins de 0,722100 tCO2eq de gaz à effet de serre par tonne de clinker, …
De même (page 54), pour être soutenue, la fabrication d’aluminium (C24.4.2 et C24.5.3) doit respecter deux parmi trois critères de vertitude jusqu’en 2025, puis les trois critères simultanément ensuite.
Faire mieux que les Directives Européennes
Le chapitre sur l’énergie ne compte pas moins de 43 pages de l’annexe 1, contre à peine 13 pour le bâtiment et l’immobilier. En ce qui concerne la construction neuve, la taxonomie exige une consommation au minimum inférieure de 10% au plafond fixé par la transposition en droit national de l’exigence NZEB (near-zero energy building ou bâtiment à énergie quasi-nulle) figurant dans la directive 2010/31/EU sur l’efficacité énergétique des bâtiments (pages 166-167).
Bon, traduit en français, ça signifie RE2020 – 10% en termes de consommation d’énergie. Plus, pour les bâtiments de plus de 5000 m², il faut un test de l’étanchéité à l’air et un test « d’intégrité thermique », c’est-à-dire la vérification de l’isolation et des ponts thermiques, un calcul de l’empreinte environnementale du bâtiment à chaque étape et fournir tous ces renseignements aux investisseurs et aux occupants.
Le chapitre bâtiment traite également de la rénovation des bâtiments (p. 169 de l’Annexe 1), de l’installation et de la maintenance de leurs équipements efficaces en énergie, de l’installation et de la maintenance de stations de chargement pour véhicules électriques, de l’installation, de la maintenance et de la réparation des équipements nécessaires à la régulation et au contrôle de la performance énergétique des bâtiments.
Il faut construire des bâtiments très performants pour bénéficier des fonds européens
L’installation, la maintenance et la réparation des équipements produisant ou utilisant des énergies renouvelables figurent page 176. L’achat et l’exploitation de bâtiments sont mentionnés page 177 et suivantes. Ne pourront être soutenus par des fonds européens que les bâtiments très performants, dont les caractéristiques sont spécifiées de manières différentes selon qu’ils sont livrés avant ou après le 31 décembre 2020.
Cela signifie, par exemple, qu’une collectivité territoriale qui souhaitait une aide de fonds européen pour acquérir un bâtiment sera contrainte de viser une performance énergétique élevée.
La portée de cette taxonomie européenne, qui peut évoluer, n’est pas encore parfaitement claire. Mais elle paraît suffisamment importante pour que tous les syndicats professionnels des industriels européens représentés à Bruxelles se soient assurés que les activités ou les fabrications de leurs membres y figurent expressément.
Tous n’ont pas réussi. Par exemple, l’activité C28.2.5, la production d’équipements non-domestiques de rafraîchissement et de ventilation, ne figure pas dans la liste de la page 48 de l’Annexe 1.
Source : batirama.com / Pascal Poggi