Dans cette affaire, lors de la réception des travaux, il manquait une gaine extérieure de 22 mètres de haut, prévue au cahier des charges. La réception a néanmoins été faite sans réserve.
La CCI de Perpignan et des Pyrénées-Orientales a confié à la société Ingerop Conseil et Ingénierie un marché de maîtrise d'œuvre pour la « rénovation des installations de production de froid et des travaux de menuiseries » des immeubles abritant le palais de justice de Perpignan pour un montant de 40 250 euros hors taxes.
Lors d'un contrôle inopiné, a été relevé un taux de légionnelles supérieur au seuil légal autorisé au niveau de la tour aéroréfrigérante positionnée dans la cour intérieure des bâtiments à proximité de la précédente tour qu'elle a remplacée. L’affaire va en justice.
L'instruction a révélé que la réception du lot « remplacement des équipements de production de froid du palais de justice » a été prononcée sans réserve, les ouvrages exécutés ayant été déclarés « conformes aux spécifications du marché ».
Dès lors, la CCI de Perpignan et des Pyrénées-Orientales n'est pas fondée à rechercher la responsabilité contractuelle de la société Ingerop Conseil et Ingénierie, maître d'œuvre des travaux, pour des fautes dans la conception des travaux réalisés.
Vice apparent passé sous silence par le maître d’œuvre
Mais, la responsabilité du maître d'œuvre pour manquement à son devoir de conseil peut être engagée, dès lors qu'il s'est abstenu d'appeler l'attention du maître d'ouvrage sur des désordres affectant l'ouvrage et dont il pouvait avoir connaissance, en sorte que la personne publique soit mise à même de ne pas réceptionner l'ouvrage ou d'assortir la réception de réserves.
A cet égard, il importe peu que les vices en cause aient ou non présenté un caractère apparent lors de la réception des travaux, dès lors que le maître d'œuvre en avait eu connaissance en cours de chantier.
Or, alors que le marché prévoyait la présence d'une gaine de rejet de l'air, seule à même de permettre la mise en place de la tour dans la cour de l'immeuble dans des conditions de fonctionnement permettant d'éviter le risque de légionnelles, cette gaine n'était pas présente lors de la réception de l'ouvrage.
Dès lors, en vertu de ses devoirs professionnels et des stipulations de son contrat, la société prestataire avait l'obligation d'appeler l'attention du maître de l'ouvrage sur les défectuosités de nature à faire obstacle à ce que la réception soit prononcée sans réserve. Par suite, la faute ainsi commise par la maîtrise d'œuvre est de nature à engager sa responsabilité contractuelle.
Vice apparent non remarqué par le maître d’ouvrage : faute d’inattention
Toutefois, il résulte également des conclusions expertales que l'absence de gaine de rejet prescrite par les stipulations du cahier des clauses techniques particulières, dont les dimensions étaient de 2 x 3.35 mètres de section par 22 mètres de haut, était remarquable par l'ensemble des acteurs lors de la réception des travaux, que ces acteurs soient des professionnels ou non.
Ainsi, la Cour laisse à la charge de la CCI de Perpignan et des Pyrénées-Orientales une part de responsabilité à hauteur de 50 % compte tenu de l'insuffisante attention qu’elle a apportée aux opérations de réception des travaux
Cour Administrative d’Appel de Marseille, 12 avril 2021
Source : batirama.com/ Damien Aymard