Le Carrefour International du Bois version 2022 révèle quelques innovations fondamentales visibles et tant d'autres invisibles.
Un salon, c’est de l’innovation. Encore faut-il savoir laquelle. Le nouveau décor ? Le truc osé qu’on sort comme test pour attirer le chaland ? La petite différence qui va tout changer sur le marché ? Ou bien les lauréats du concours Canopée Challenge, qui ont pu présenter leurs solutions sur un stand dédié, à Nantes comme dans une semaine à Lyon pour Eurobois ? Parmi eux, Horizons Bois vient d’obtenir une Atex, Hybridal construit pour de bon, Wall’Up Préfa est en mode de production industrielle, mais sans qu’on sache si ces nouvelles solutions de parois ou de planchers changeront la donne du marché à terme.
Sortir le CLT du bois
On se souvient de Piveteau qui avait axé sa communication du CIB sur une nouvelle solution d’ignifugation de bardages bois, révolutionnaire, et dont on n’a plus entendu parler l’édition d’après car elle avait été abandonnée. Cette fois, Piveteau innove certes sur sa gamme de bardage avec le Vibrato XL, mais l’accent est mis non pas sur un produit, plutôt sur un système complet qui en lui-même est innovant sur le marché français : l’Hexakit. Le CLT de Piveteau, Hexapli, n’était pas une révolution, même si le scieur proposait une belle variété d’essences.
Pollmeier propose de livrer les sciages de hêtre en sections fixes et c'est une évolution radicale.
Par contre, l’Hexakit est une petite révolution sur le marché du CLT en France. Si ça prend. L’une des idées de base est de faire sortir le plancher CLT du seul marché du bois et des gros chantiers. L’offre est adaptée à la maison individuelle ou aux petits chantiers en bois, certes, mais aussi en parpaing brique, métal. Un pari sur l’intégration du CLT pour l’optimisation du bilan carbone, qui peut changer la face de la construction en France.
L’innovation du grand innovateur
Comme le CIB ne sélectionne pas les innovations comme à Lyon la semaine prochaine, qu’il faut écumer plus de 600 exposants et que ces derniers n’ont pas tendance à mettre leurs nouveautés en avant dans leur scénographie, la mise en relief des nouveautés est délicate, certainement fragmentaire et aléatoire.
Nicolas Masson, directeur général d'Evertree, et son panneau MDF green.
Si l’on part du produit, l’Allemand Pollmeier propose une toute nouvelle manière de commercialiser les avivés, avec des éléments poncés de même section. Cela n’a l’air de rien mais bouleverse le marché des sciages de hêtre comme autrefois l’approche précédente de Pollmeier, qui est parvenue à imposer la fourniture de hêtre étuvé avec des catégories de qualité spécifiques. Bref, quand Pollmeier se lance dans quelque chose, il faut regarder cela de près.
Le panneau bon pour la santé et pour le climat
Du même ordre d’importance est la percée d’Evertree avec Panneaux de Corrèze pour proposer des panneaux MDF à colle biosourcée donc non fossile. Le CIB était le moment de la première présentation, à la fois sur le stand d’Evertree et sur celui de Panneaux de Corrèze. On entre dans le nouveau monde des panneaux non seulement bons pour la santé mais aussi pour l’environnement, ce qui revient de plus en plus à la même chose.
Neutraliser les émissions carbone de la production de panneaux, n'est-ce pas la principale innovation actuelle ?
De même, pour le panneau de particule, l’Allemand Elka a décroché un certificat de neutralité carbone que propose l’industrie allemande du bois. Il s’agit de comptabiliser le carbone et de compenser le résidu en achetant des certificats. Dans le cas d’Elka ce sont surtout des parts dans l’éolien. Cette façon de faire est extrêmement innovante comme telle et vaut pas mal d’innovations produit.
Haro sur l’OSB
Sur le marché de l’OSB, Swiss Krono présente la plaque OSB 3 SF-B ignifugé B-s2, d0 pour les ERP. Mais il ne parvient pas à compenser la production de panneaux de l’Est de l’Europe, ce qui n’arrange pas le monde de la construction bois pour qui l’OSB est déjà de longue date une source de tracas à cause des délais de livraison. Résultat, après quatre ans d’efforts, Siniat sort un panneau de contreventement à base de plâtre, le Defentex, pour les bâtiments MOB jusqu’à R+3. C’est de loin la principale nouveauté de l’industrie du plâtre pour la construction bois depuis longtemps.
Frédéric Castaings, patron de la SAS "Avec le bois" à Clermont-Ferrand.
La dernière grande innovation venait également de Siniat, c’était la plaque Weather Defense, particulièrement utile désormais pour créer des systèmes de façades correspondants aux attentes des sapeurs-pompiers de Paris. Sybois intègre la plaque WD dans sa gamme complète de solutions de façade bois et cette approche globale de Sybois est également une grande nouveauté.
Quand l’échec de l’innovation devient un ressort
Sur le plan structurel, l’approche japonaise de Suteki est quasiment une contre-nouveauté, dans le sens où les Japonais, après de multiples expositions en fanfare notamment à Batimat, on finit par réduire la voilure et se retirer du marché. Si ce n’est que la solution a été reprise par l’un des employés et qu’il la développe de plus belle, dans un contexte où la recherche de solution constructive démontables et réutilisables est plus mûre que jamais, avec de nouveaux chantiers à l’appui.
Pinutex de Mocopinus, avec quand même le problème que l'essence est le mélèze... de Sibérie (mais aussi le pin du nord).
C’est peut-être un peu pareil pour les panneaux ap pano développés par les Reitz après leur clash avec Lignotrend. Une solution ingénieuse de panneaux acoustique en bois de peuplier avec un mode de pose unique en son genre et très élégant. Aujourd’hui, ce n’est plus le côté alternatif à l’offre en panneaux acoustiques de plafonds en bois qui importe, mais l’utilisation performante de bois de peuplier. La commercialisation d’ap pano repose désormais sur l’équipe de Frédéric Castaings à Clermont-Ferrand.
Que nous propose Mocopinus ?
Enfin, il faut passer au CIB sur le stand de l’Allemand Mocopinus, car c’est là en général que se font les tendances. Il y a eu la façade en bardage structurés, ou en bois brûlés. Cette fois, l’accent est mis sur une terrasse bois à lames sur chant, d’autant plus élégante que le même pas peut être utilisé pour les bancs associés. Les intervalles entre lattes sur chant sont bien ajustés en termes esthétiques, et aussi pour prévenir la glissance. Mocopinus, c’est trois agents en France mais aussi le première marché export du fabricant allemand. Un vrai poil à gratter pour tous les acteurs français de la terrasse et du bardage, ou bien : un facteur d’inspiration.
Source : batirama.com/Jonas Tophoven © JT