Face au défi de la qualité de l?air intérieur, les peintures doivent évoluer. Et devenir plus environnementales sans sacrifier à leurs performances.
Les peintures à faibles émissions de COV, c’est tendance. «Nous sommes dans une problématique de qualité de l’air intérieur, rappelle Sylvain Ripoll, directeur des marchés chez Tollens. L’habitat est de plus en plus confiné à cause de l’étanchéité».
Mais ôter des COV devient gageur. «Nous avons un gros travail de recherche et développement car ces COV ont une utilité, révèle Sébastien Caucheteux, responsable marketing produit chez PPG. Nous voulons un air plus sain, et plein de produits vont être bannis de nos matières premières à cause du classement REACH».
Une problématique qui va aussi remettre en cause certaines peintures à fonction aux composants nocifs.
L’environnemental encore en quête d’adhésion. Reste que la peinture environnementale, saine, issue de matières renouvelables, aux emballages recyclables, est en passe d’arriver. Les fabricants y travaillent.
«Mais sans céder à la tentation de ne pas vérifier l’efficacité des fonctions quand il y en a, et en s’assurant que ces produits sont efficaces dans leurs caractéristiques», poursuit Sébastien Caucheteux. De plus, l’environnemental ou l’écologique peine à entrer dans les mœurs. «C’est encore nouveau pour les applicateurs, confirme Roland Pierrot, directeur général de la société Keim qui propose des peintures minérales déjà vertueuses. Or, c’est une valeur ajoutée et une image de marque qui s’éloigne des standard du marché».
Un respect de l’environnement commercialement positif à l’heure du développement durable.
AVIS D'EXPERT
Régis Saulnier
gérant et conseiller environnemental en espace intérieur chez Paris Espace Eco
«L’argument santé séduit les clients»
« L'environnemental en peinture n'est pas une tendance forte, ni une priorité absolue. Les clients qui viennent chez nous dans cette optique ont déjà une démarche intellectuelle et écologique. Et quand il s'agit d'entreprises, elles nous demandent ce type de produits parce que leurs clients les ont poussées.
Sinon, elles préfèrent des produits plus traditionnels, plus simples à appliquer et qui permettent de dégager des marges plus importantes. J'ai également le sentiment que certaines erreurs de professionnalisme au niveau de l'application de la peinture sont réduites par les produits. Mais de manière générale, l'enthousiasme pour l'écologie n'est pas inscrit dans la mentalité française.
En revanche, l'argument santé et en particulier celui de la qualité de l'air intérieur touche vraiment les clients. Dans la plupart des cas, il s'agit de personnes qui ont des enfants en bas âge, et qui sont à la recherche d'une peinture apportant une réponse mais uniquement pour leur propre usage. Un propriétaire qui refait par exemple la peinture de son appartement pour le mettre en location n'aura pas cette démarche.
Reste qu'avec une peinture minérale par exemple on peut garantir une bonne tenue à la couleur, et permettre à des personnes qui ont des problèmes respiratoires d'entrer dans une pièce seulement deux heures après que la peinture a été appliquée ».
Solution 1 : les peintures à fonction
Ces peintures permettent de dépolluer, de diminuer les COV contenus dans l’air, ou d’éluder les possibles allergies.
Une nouvelle génération de peintures se dessine permettant de purifier l’air ou encore d’éliminer les odeurs : les peintures photocatalytiques. Décomposition et dégradation de la matière s’effectuent sous l’action des rayons lumineux à la surface d’un catalyseur, le plus souvent du dioxyde de titane.
Ce type de peintures s’emploie notamment dans les parkings. Elles pallient une mauvaise ventilation ou permettent d’en diminuer l’utilisation, en détruisant les Nox, l’azote ou le gaz carbonique. Elles trouvent aussi leur utilité quand il n’est pas possible d’aérer par exemple dans une chambre donnant sur une voie de circulation passante.
Mais pour l’instant, même si la QAI commence à s’installer au cœur des préoccupations du bâtiment, les peintures photocatalytiques peinent à trouver leur marché. Parce qu’elles s’apparentent à l’univers des nanotechnologies considérées comme dangereuses, et que le coût des matières premières nécessaires à leur fabrication poussent leur prix.
Autre peinture à fonction : les peintures antibactériennes et antimoisissures. Ce marché de niche pourrait trouver un intérêt certain dans le contexte d’un logement de plus en plus isolé donc de plus en plus hermétique, où le manque d’air renouvelé peut générer des moisissures à défaut d’une ventilation efficace. Seul hic, pour éliminer les moisissures ces peintures contiennent des additifs nocifs, les biocides, en sursis d’utilisation jusque mi-2013.
Intérêt :
assurent une fonction à la peinture qui répond aux enjeux des bâtiments.Limite :
sont formulées à base de produits nocifs, ou assimilés en tant que tel.
Solution 2 : les peintures environnementales
Etiquetage du niveau d’émissions de polluants volatils oblige, les fabricants de peinture affichent désormais la contribution de leurs produits à une meilleure qualité de l’air intérieur. Un premier pas dans l’environnemental.
Pour l’instant, les peintures naturelles ou biodégradables n’apportent pas la durabilité ou la résistance. Or, un des premières critères de choix pour les peintres restent celui de la performance. Pour autant, face à la directive européenne obligatoire réduisant les teneurs maximales de COV des peintures depuis le 1er janvier 2010, et quel que soit le type de peinture, les fabricants se sont alignés.
En outre, depuis le 1er janvier 2012 les produits de construction et de décoration doivent porter une étiquette obligatoire sur leurs émissions et contenus en polluants volatils. Les caractéristiques d’émissions sont formalisées selon une échelle de quatre classes de A+ à C. S’il est difficile de définir une classe de peintures environnementales, ce classement permet aujourd’hui de choisir des peintures avec peu d’émissions donc peu de polluants.
Elles sont donc en phase avec cette tendance d’amélioration de la qualité de l’air intérieur. Et dans cette optique de respect de l’environnement, les fabricants continuent de travailler à la diminution d’émissions dans l’air. D’ailleurs, les conditions de mesures pourraient devenir bientôt encore plus restrictives. Les classe d’émission sont établies sur la base de mesure réalisées après 28 jours en chambre ou en cellule d’essai d’émission.
Or, il ne serait pas impossible que ce délai tombe à moyen terme à deux voire trois jours. Les fabricant vont donc devoir continuer à revoir leurs matières premières pour proposer des peintures à trois jours.
Intérêt :
émissions de COV réduitesLimite :
étiquetage auto-déclaratif, n’est pas forcément naturelle ou biodégradable.
Solution 3 : les peintures minérales
Naturellement écologiques, ces peintures sont formulées avec au moins 95 % de composants minéraux.
La peinture minérale, chaux ou silicate, est très utilisée dans les logements anciens sans équipements de ventilation quand le principe est d’utiliser des matériaux respirants. Ecologique et aux propriétés naturelles, elle évite les problèmes de condensation et la formation de moisissures.
Mais à condition d’être mise en œuvre sur des matériaux qui ont cette faculté de respirer avec un effet hygrorégulateur. Très perméable à la vapeur d’eau, elle s’encrasse facilement au toucher absorbant les saletés. A proscrire donc dans les pièces humides.
Reste que cette peinture naturelle contribue de fait à une meilleure qualité de l’air intérieur, d’autant plus lorsqu’elle est photocatalytique. Mais qui dit naturelle, ne dit pas pour autant bio-sourcée car la peinture minérale n’est pas renouvelable.
Intérêt :
écologique, micro-porosité élevée, naturelle, contribue à une meilleure qualité de l’air intérieur.Limite :
aspect variable, hydrophile, film pas souple, ne s’applique que sur des subjectiles minéraux donc nécessite une remise à nu du support.
Une peinture à fonction… isolante
Distribuée exclusivement en France par Colorterm , cette peinture qui utilise la technologie de la membrane thermocéramique permet une répartition uniforme de la chaleur émise par le système de chauffage.
Elle se compose notamment de microbilles de céramique creuses qui absorbent l’humidité et l’évacue vers l’extérieur, permettant ainsi de maintenir l’hydrométrie à un taux optimal de 55 %. Cette peinture a reçu le Pass Innovation du CSTB en juin 2011.
Source : batirama.com / Stéphanie Lacaze-Haertelmeyer