Le programme Oscar, lancé il y a un an avec pour objectif d'aider artisans à mieux comprendre les d'aides à la rénovation, demande au Gouvernement des mesures fortes de simplification après avoir mené une enquête.
Simplifier la compréhension et le processus des démarches administratives pour les artisans en ce qui concerne les aides à la rénovation énergétiques, voici l'objectif que s'est fixé le programme Oscar, créé dans le cadre de la 5ème période des CEE 2022-2024, depuis un an. En parallèle de son travail de recrutement et de formation de référents d'aides à la rénovation (RAR) partout sur le territoire, Oscar a mené une enquête dans le cadre de son Atelier Artisan en décembre 2022, auprès des petites entreprises du BTP.
Quels freins rencontrent les artisans pour monter des dossiers pour leurs clients ?
Afin de mieux comprendre la réalité du terrain, Oscar a décidé d'interroger directement les intéressés pour mieux comprendre leurs difficultés.
Or, difficultés, il y a. Interrogés sur les adjectifs que leur inspire le dispositif des aides CEE, c'est le mot complexité qui ressort le plus souvent. Malgré la mention de quelques adjectifs positifs (simplifiable, générateur de business, puissant), la majorité des mots choisis spontanément par les personnes interrogées sont négatifs et reflètent leur lassitude du système : "pénible, complexe, incompréhensible, lourd, non harmonisé, usine à gaz, stressant, épuisant, énergivore".
Interrogés sur les étapes nécessaires de manière chronologique pour faire un dossier en amont, pendant les travaux et après ceux-ci, les artisans ont su bien les identifier et lister les documents nécessaires à la constitution d'un dossier. Ce n'est donc pas la méconnaissance de la procédure qui pose un problème. De même, la phase travaux ne présente pour eux aucune problématique particulière. Ce sont donc les contraintes administratives avant et après les travaux qui ne leur conviennent pas.
Les problématiques générales listées par les artisans
- Des éléments de langage trop complexe, non harmonisés et abscons,
- Des délais trop courts au vu de la complexité du dossier et la longueur administrative,
- Des problèmes de compatibilité avec les logiciels de comptabilité, qui ne prennent pas en compte les subtilités des aides gouvernementales. Beaucoup de temps est perdu car les devis ou les factures finales doivent être réécrits ce qui alourdit le temps passé en comptabilité,
- Un sentiment d'insécurité en raison d'un contrat qui leur semble déséquilibré entre les différentes parties prenantes (obligé, délégataire et artisans, entreprises),
- Les dispositifs d'aides n'ont pas été fait en concertation avec les entreprises qui mettent le système en œuvre,
- Des informations parfois contradictoires concernant l'éligibilité des produits et qui peuvent conduire à un blocage ou refus de dossier,
- Des évolutions réglementaires trop fréquentes, avec des délais d'application très courts,
- L'obtention ou le renouvellement de qualification RGE, indispensable afin de pouvoir monter des dossiers pour ses clients, est un processus lourd administrativement. Retards, voire refus de délivrance de certificats peuvent impacter certaines instructions de dossiers.
Par exemple, dans les métiers de l'isolation, les artisans rencontrent des problèmes avec MaPrimeRénov' à cause de la "tergiversation entre la BAR-EN-101 et la BAR-EN-102", les règles d'éligibilité ayant été modifiées à plusieurs reprises ces derniers mois.
Les problématiques en amont des travaux
- Lorsque sur un même projet, des aides CEE et MaPrimeRénov' (MPR) cohabitent, des difficultés peuvent survenir. En effet, les critères d'éligibilité ne sont pas harmonisés entre les deux dispositifs : écart entre l'ITE surface réelle, la surface éligible aux CEE et le financement des prêts bonifiés Eco PTZ.
- La complexité du langage est problématique, d'autant que le vocabulaire utilisé entre les deux dispositifs n'est pas identique. "On ne sait plus comment rédiger un devis, il faut faire deux fois le même travail", témoigne un artisan.
- La validation de MaPrimeRénov' devant être faite en amont des travaux, la planification des travaux est plus complexe. De plus, si un dossier est déjà engagé par un autre corps de métier, il doit être achevé avant de pouvoir ouvrir un autre dossier MPR. L'attente peut ensuite rendre le dossier CEE caduc parce que les éléments sont périmés.
- Le manque de flexibilité de la procédure rend l'adaptation au chantier impossible. Par exemple, si le bénéficiaire change d'avis sur une façade à isoler ou si le nombre de m² n'est pas correct dans le dossier, ce dernier reste impossible à modifier une fois créé.
Les problématiques après les travaux
- Une avance de trésorerie par les artisans et les entreprises est parfois nécessaire. En effet, afin de rester compétitifs, les petites entreprises artisanales se sentent souvent contraintes d'avancer certaines primes à leurs clients. L'allongement des délais d'instruction pèse alors sur leurs trésoreries.
- Des erreurs de versement sont parfois constatées.
- Les compétences techniques des interlocuteurs en charge de l'instruction des dossiers CEE et MPR ne sont parfois pas suffisantes pour bien comprendre les factures et donc la nature des travaux.
- Le dossier n'est pas traité dans sa globalité. A chaque erreur, défaut administratif ou interrogation, de nombreuses personnes doivent intervenir. "Ça prend au minimum 15 jours par difficulté" ; "On nous demande bien souvent de refaire entièrement le dossier pour des travaux qui sont fait", indiquent les artisans interrogés.
- Les échanges avec les instructeurs du dossier se font uniquement par boîte mail.
- Les artisans souhaiteraient que les opérationnels leur confirme la compréhensibilité globale de leur dossier avant de le traiter, pour pallier aux potentiels problèmes tout de suite.
- La multiplication des contrôles RGE/CEE/MPR pour un seul chantier peut poser problème, d'autant que ces derniers ne sont pas harmonisés entre eux. De plus, le niveau de compétence diffère entre les contrôleurs, et les entreprises contrôlées souhaiteraient être présente lors des contrôles, indiquant que le client ne connait pas les détails techniques du chantier et peut mal répondre à leurs questions.
Des solutions pour les artisans ?
Le programme Oscar a également invité les artisans interrogés à présenter des pistes d'amélioration qu'ils souhaiteraient voir pour simplifier ces processus.
Quatre suggestions ont été mises en avant :
- Une meilleure accessibilité de l'information et des démarches administratives en ce qui concerne les dispositifs d'aide et leur évolution,
- Un recensement plus clair des informations techniques (liste exhaustive des matériaux/matériels éligibles etc.),
- La simplification des démarches administratives (notamment un portail unique CEE/MPR),
- L'harmonisation et la simplification du contrôle,
- L'allègement de la charge financière pour les artisans.
Le programme Oscar et ses partenaires ont décidé de porter ces demandes auprès du Gouvernement et de proposer des solutions de simplifications concrètes et adaptées.
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