Un projet d’arrêté est mis en consultation pour modifier le label BBC Rénovation qui date de 2009. Il traite différemment le logement et le tertiaire. En logement, le DPE devient la méthode de calcul.
Au moment où l’on s’interroge sur l’efficacité respective des rénovations globales et des rénovations par gestes successifs, le Ministère de la Transition énergétique met en consultation jusqu’au 4 avril 2023, un arrêté modifiant les labels "Haute performance énergétique rénovation" et "Bâtiment basse consommation rénovation, BBC rénovation 2009".
Toiletter la réglementation thermique pour l’existant, la RTx
Petit retour en arrière. En France, pour la construction neuve, nous sommes sous l’empire, selon le type de bâtiment, soit de la RT2012, soit de la RE2020.
En ce qui concerne les bâtiments existants, nous vivons depuis 2007 sous le régime, soit de la RTx pour les rénovations globales, soit de la RT par élément. La RTx repose sur une méthode de calcul, tandis que la RT par élément dispose simplement que l’ouvrage ou l’appareil remplacé doit posséder des caractéristiques minimales de performance thermique. La RTx ne concerne que les bâtiments de plus de 1000 m², lorsqu’ils font l’objet de travaux de rénovation importants.
La RT par élément est tellement dépassée, notamment grâce à l’effet de plusieurs directives européennes, que les caractéristiques de performances exigées n’existent plus sur le marché européen.
En 2009, les Pouvoirs Publics ont complété la RTx par deux labels plus exigeants concernant les bâtiments construits après le 1er janvier 1948 :
- le label HPE Rénovation correspond à une consommation d’énergie primaire ≤ 150 kWh/m².an pour les cinq usages classiques de la RTx : chauffage, rafraîchissement, production d’ECS, ventilation et éclairage. Avec, en plus, une modulation géographique de cette exigence en fonction de la zone climatique et de l’altitude.
- le label BBC Rénovation qui descend la consommation d’énergie maximale à 80 kWh/m².an, pour les mêmes cinq usages, avec également des modulations selon l’altitude et la zone climatique. De plus, ce label exige un test d’étanchéité à l’air de la maison, du logement, du bâtiment.
Les deux labels s’appliquent au logement. Seul le label BBC Rénovation s’applique au tertiaire.
Il n’existe pas de label public pour les bâtiments construits avant 1948. Mais certains certificateurs, comme CERQUAL Qualitel Certification, dans le cadre de l’attribution de certifications plus larges comme NF Habitat ou NF Habitat HQE, peuvent délivrer soit le label "Rénovation 150", dont les exigences correspondent à celles du label HPE Rénovation, soit le label "BBC Effinergie Rénovation", porté par l’association Effinergie et dont les exigences correspondent à celles du label BBC Rénovation.
Ces divers labels et certifications proclament aux yeux de tous la preuve de l’efficacité de la rénovation thermique d’un bâtiment. Et aussi, ce sont souvent des prérequis en logement social pour l’obtention de certains financements de travaux de rénovation.
Abandon de la méthode RTx au profit de celle du DPE pour le logement
La décision de modifier les label HPE Rénovation et BBC Rénovation résulte de l’article R171-7 du Code de la Construction et de l’Habitation, datant du 30 Juin 2021. Il est très court et indique : Un arrêté des ministres chargés de la construction et de l'énergie détermine les conditions d'attribution à un bâtiment existant du label "haute performance énergétique rénovation".
Premier point, pour établir la performance énergétique globale d’un bâtiment à usage d’habitation, l’arrêté en consultation remplace la méthode de calcul Th-C-E ex utilisée par la RTx globale par celle du DPE 2021, telle qu’elle figure dans l’arrêté du 31 mars 2021 relatif au diagnostic de performance énergétique pour les bâtiments ou parties de bâtiments à usage d'habitation en France métropolitaine.
Pour les bâtiments à usage autre que d’habitation, en revanche, la performance énergétique globale est mesurée par la consommation conventionnelle d’énergie selon l’article 9 "l’Arrêté du 13 juin 2008 relatif à la performance énergétique des bâtiments existants de surface supérieure à 1000 mètres carrés, lorsqu'ils font l'objet de travaux de rénovation importants", autrement dit, la méthode Th-C-E ex.
Donc, dans le cas du logement, le calcul passe à la méthode DPE. Ce qui fait entrer la charge carbone dans le calcul. Dans le cas du tertiaire, nous en restons à la méthode de la RTx qui ignore tout de l’empreinte carbone du bâtiment. ©PP
Ce projet d’arrêté restaure même la Tic – Température intérieure conventionnelle – pour évaluer le confort d’été des bâtiments tertiaires. La Tic, rappelez-vous, est cette méthode tellement décriée qu’elle a été remplacée par l’indicateur DH dans la RE2020.
Deux niveaux de label BBC Rénovation 2023 pour le logement
Pour le logement, le projet d’arrêté fait disparaître le label Haute Performance Energétique, mais instaure deux niveaux de label BBC Rénovation 2023.
- le label "BBC Rénovation 2023 – première étape" correspond au minimum à l’atteinte de la classe C au sens du DPE. Dans le cadre d’un audit énergétique, il prévoit aussi une planification des travaux en trois étapes au maximum pour atteindre le niveau du label "BBC Rénovation 2023" (voir plus bas). Ensuite, cette première étape de travaux doit porter au moins sur la ventilation et sur deux postes de travaux sur l’enveloppe du bâtiment, à choisir parmi les postes suivants : isolation des murs, isolation des planchers bas, isolation de la toiture, remplacement des menuiseries extérieures. Le projet d’arrêté précise que "le traitement d’un poste correspond au traitement d’au moins 90%" de sa surface.
Les postes traités au cours de cette première étape doivent aboutir à des performances thermiques minimales en termes de résistance thermique. Enfin, le label « BBC Rénovation 2023 – première étape » prévoit un test d’étanchéité à l’air à l’issue de cette première étape. ©PP
- le label "BBC Rénovation 2023" correspond à l’atteinte de la classe A ou B au sens du DPE. Pour obtenir ce label, il faut étudier "l'isolation des murs, l'isolation des planchers bas, l'isolation de la toiture, le remplacement des menuiseries extérieures, la ventilation, la production de chauffage et d'eau chaude sanitaire, la production de froid ainsi que les interfaces associées". Il faut aussi installer des protections solaires extérieures – certains ABF vont être contents – sur les fenêtres des pièces de vie et de sommeil, s’il n’y en a pas. A l’issue de cette rénovation, les déperditions thermiques à travers les parois et les baies du bâtiment respectent des performances minimales. Un test de perméabilité à l’air est réalisé selon la méthode Q4Pa-surf et donne un résultat ≤ 1,20 m3/(h.m²) de parois déperditives hors plancher bas.
Le label BBC Rénovation 2023 prévoit, en logement collectif, l’isolation thermique des réseaux de distribution et de bouclage d’eau chaude sanitaire, de chauffage et de froid, situés hors des volumes chauffés ou refroidis. ©PP
Interdiction des chaudières alimentées majoritairement par des combustibles fossiles
Poursuivant sa croisade contre le gaz naturel et le fioul, le projet d’arrêté prévoit que pour obtenir le label BBC Rénovation 2023 , il est interdit :
- d’installer une nouvelle chaudière ou production d’eau chaude sanitaire alimentée majoritairement par des combustibles fossiles. C’est le moment de ressortir les chaudières mixtes bois/gaz. Perge, le constructeur français en proposait.
- de conserver une chaudière ou production d’eau chaude sanitaire alimentée majoritairement par des combustibles fossiles dans le périmètre de déploiement prioritaire d’un réseau de chaleur.
- de conserver une chaudière ou production d’eau chaude sanitaire alimentée majoritairement par du fioul.
Bref, pas de fioul, ni de gaz naturel. Il reste la pompe à chaleur, y compris en collectif, les chaudières bois, les réseaux de chaleur et le solaire thermique.
Le solaire thermique, peut-être en chauffage, mais certainement en production d’eau chaude, peut certainement satisfaire l’exigence sur la non-alimentation "majoritairement par des combustibles fossiles". ©PP
Les nouvelles exigences sont elles plus sévères ?
En ce qui concerne les logements, il n’est pas possible de comparer les exigences de ce projet de décret avec le DPE : les méthodes de calcul sont profondément différentes et la comparaison n’a pas de sens. Par exemple, le DPE ne prévoit pas de modulations selon les zones climatiques ou l’altitude. Il faut donc effectuer une série de calculs selon les deux méthodes et comparer.
Il ne semble pas que cela ait été fait pour l’instant. Seule l’association Effinergie laisse filtrer sur Linkedin que plusieurs calculs montrent que les nouvelles exigences seraient plus strictes.
A propos du tertiaire, l’article 4 du projet d’arrêté indique que la consommation calculée pour un projet de bâtiment visant le nouveau label BBC Rénovation 2023 doit être inférieure ou égale à 40% de la consommation de référence pour ce bâtiment. Oui, pour tous ceux qui sont trop jeunes pour s’en souvenir, la méthode RTx calculait d’abord les consommations d’un bâtiment de référence, puis les consommations du bâtiment étudié. 40% de la consommation de référence est une exigence forte.
Vous avez jusqu’au 4 avril pour lire le projet d’arrêté et, le cas échéant, poster vos remarques.
Source : batirama.com / Pascal Poggi