Le design devient accessible dans l?univers du bâtiment. Certains industriels font même appel à de grands noms pour penser leurs collections. Objectifs : se différencier, se réinventer, innover et pénétrer de nouveaux marchés.
Le design, quésaco ? En préambule de l’exposition “Design, où es-tu ? – Observeur du design 13”*, Anne-Marie Boutin, présidente de l’Agence pour la promotion de la création industrielle (APCI) définit le terme : « Le design est une méthode créative de conception qui associe écoute, intuition et analyse : le designer analyse le contexte, écoute les acteurs impliqués aux différentes phases de la vie du produit, observe leurs gestes et usages afin de leur proposer de nouveaux scénarios ou concepts. C’est un travail qui associe les différents acteurs de l’entreprise concernés par la conception. »
Aujourd’hui, le design est partout… Dans l’univers des matériaux de construction aussi. Ce secteur est d’ailleurs représenté dans le cadre de l’Observeur du Design, prix national de design organisé par l’APCI.
Dans ce contexte, la société lyonnaise Laméo par exemple, spécialiste de la lame de terrasse composite, vient d’être labellisée Observeur du design pour son produit phare, la lame XTRA durable et réversible. Le Red Dot product design award, l’un des prix internationaux les plus prestigieux en matière de design, s’intéresse, lui aussi, entre autres, aux matériaux…
Sans oublier Batimat, le salon international de la Construction qui organise ses propres Trophées du Design.
Un facteur de réussite ? Il semblerait que l’industrie ait compris depuis quelques années l’importance du design dans le processus de production : un facteur de réussite, au niveau économique et esthétique… « Avoir fait appel à des designers et des architectes pour nos produits nous a permis une meilleure prise en compte des tendances sur les formes et les volumes, une prise en compte plus forte des contraintes environnementales, une réflexion sur l’association des matériaux », explique Frédéric Plasseraud, directeur marketing chez Polyrey.
Pour aller plus loin, l’industriel a même lancé son propre concours cette année, en invitant de jeunes talents à plancher sur les modèles de demain.
De son côté, Knauf, acteur des marchés de la construction sèche, a inauguré l’an dernier le co-développement, en faisant appel à l’inspiration des maîtres d’ouvrage et des prescripteurs pour compléter sa collection Organic.
D’autres misent sur le savoir-faire et l’immense créativité de designers renommés, à l’image du céramiste italien Mutina ou de l’entreprise Concrete by LCBA qui a inventé avec Matali Crasset un panneau d’habillage mural avec une face en véritable béton.
« Le designer a un rôle clé dans le processus d’innovation », poursuit Anne-Marie Boutin. Et les industriels ont bien cerné l’intérêt d’une collaboration avec un designer dans un contexte économique difficile…
Source : batirama.com / Delphine Després
* ”Design, où es-tu ?”, exposition organisée par l’APCI. 170 réalisations, espaces et services issus de tous les secteurs d’activité. Jusqu’au 24 mars 2013 à La Cité des Sciences et de l’Industrie, 30, avenue Corentin-Cariou, 75019 Paris. www.cite-sciences.fr
Polyrey honore les jeunes talents
« Aujourd’hui, il est difficile d’aborder un nouveau projet sans cette intelligence du design », affirme Frédéric Plasseraud, directeur marketing chez Polyrey, spécialiste de panneaux décoratifs et revêtements stratifiés pour l’aménagement intérieur.
Avec son concours Polyrey Design Awards lancé en 2012, il a invité les jeunes créateurs à réfléchir à des modèles décalés de panneaux autour de 4 thématiques. Plus de 600 candidats venus de toute l’Europe ont répondu à l’appel !
Quatre vainqueurs ont été sélectionnés par un jury de professionnels et leurs créations figureront dans la collection 2013 : Ane Baztarrika, Cécile Fleuriet, Baggio Shura et Gessica Mendilicchio. Le fabricant s’appuiera sur la technologie du digital print pour retranscrire à l’identique les projets gagnants (environ 20?% plus chers que les panneaux traditionnels) ! www.polyrey.com
Matali Crasset chez Concrete by LCDA
Fabricant de mobilier en béton près d’Angers (49), la jeune société Concrete by LCDA s’est aussi dirigée l’an dernier vers la réalisation d’un panneau d’habillage mural, le Panbeton, avec une face en véritable béton brut !
« Nous cherchions des designers pour nos meubles, confie Julien Delalande, l’un des associés de l’entreprise. Et nous avons choisi le designer industriel Matali Crasset, qui s’occupe désormais de notre direction artistique. Nous souhaitions proposer des solutions d’aménagement intérieur inspirées de l’architecture moderniste. Avec Matali, nous avons imaginé une collection de panneaux muraux en béton, qui se collent sur tous les supports : cinq modèles qui créent l’illusion d’un mur coffré sur place. »
Autre avantage du Panbeton : la légèreté ! Ces panneaux de 2600 x 900 mm (15 mm d’épaisseur), constitués de béton fibré haute performance pour la face avant et de panneaux de construction pour la face arrière, ne pèsent que 8 kg/m2 !
Knauf parie sur le co-développement
« Nous réalisions déjà du design en interne, mais c’est la première fois que nous faisions appel à des forces extérieures », relate Jens Dupont, directeur marketing et communication chez Knauf, l’un des spécialistes de la construction sèche.
Dans le cadre de sa collaboration et de sa réflexion avec l’agence Outsign et l’architecte Marc Dölger pour les dalles acoustiques en laine de bois (plafonds et murs) de sa ligne Organic, Knauf a souhaité étendre la gamme en organisant en 2011 un concours via Facebook.
Et a ainsi inauguré le co-développement pour que des créatifs puissent déposer leurs idées et imaginer des motifs tendance pour Organic. Élus par les suffrages Facebook et un jury de professionnels, quatre designers et architectes se sont distingués : Anne-Astrid Chachignon, Audrey Frère, Thomas Barra et François Machado.
Leurs dalles sérigraphiées à forte personnalité, principalement destinées aux plafonds, seront disponibles sur le marché en 2013. Sans surcoût important assure la marque.
www.knauf.com
Trois questions à Massimo Orsini, pdg de Mutina
Le céramiste italien Mutina se démarque par l’extrême singularité de ses produits imaginés par des designers stars et plébiscités par les prescripteurs à la recherche de modèles novateurs.
Quels étaient vos souhaits lorsque vous avez repris Mutina ?
Massimo Orsini : Mutina existe depuis 1974. Lorsque nous avons repris l’entreprise en 2005 avec trois associés, notre objectif était de travailler avec des designers importants dont nous apprécions la créativité et la passion pour la recherche. Nous avions déjà en tête des designers comme Patricia Urquiola, les frères Bouroullec, Rodolfo Dordoni, Raw Edges, Tokujin Yoshioka... Nous avons eu de la chance, car toutes ces personnes ont accepté de collaborer avec nous?!
Les grands noms œuvrent plutôt dans l’architecture intérieure et dans le design de mobilier… Comment avez-vous réussi à les convaincre ?
Au début, ce n’était pas simple, car les designers ne sont pas très liés au matériau céramique. Patricia Urquiola par exemple n’était pas très intéressée par le carrelage, car elle avait une vision ancienne de la céramique. Nous souhaitions travailler en profondeur sur la matière et la faire ressortir à partir de 8 coloris de base assez neutres. Et elle a compris que notre projet était différent… Les designers nous apportent vraiment quelque chose de nouveau, du relief, des formes autres. Et les gens commencent à reconnaître le style Mutina !
Quels sont vos projets pour les prochaines collections ?
Nous allons déjà continuer avec les designers habituels. Ronan et Erwan Bouroullec sont en train de dessiner leur 2e collection. Nous présenterons aussi en 2013 les créations des Anglais Barber et Osgerby. Nous réfléchissons aussi avec l’architecte Jean-Michel Wilmotte à une collection architecturale. Inga Sempe devrait aussi, plus tard, enrichir notre gamme.