Lors d'une conférence de presse, Pascal Boulanger, président de la FPI, n'a pas hésité à parler d'une "situation catastrophique" pour décrire l'état du logement en France en ce 3e trimestre 2023, chiffres à l'appui.
Lors de sa conférence de presse trimestrielle, les chiffres présentés par la Fédération des Promoteurs Immobiliers étaient plus qu'inquiétants, les projections actuelles pointant vers un chiffre inférieur à 90.000 logements vendus au niveau national en 2023. Le délégué général de la FPI, Didier Bellier-Ganière, a même ajouté qu'il s'agissait du "plus mauvais trimestre depuis la création de l'observatoire" de la FPI, en 2010.
Avec un nouveau repli des autorisations de logements sur tous les segments (baisse de 29,2% par rapport au 3e trimestre 2022 et de 28,3% sur 12 mois), couplé par un niveau "extrêmement faible" des mises en chantier (27.500 logements seulement sur trois mois pour les logements collectifs, un chiffre des plus bas depuis 15 ans hors période Covid), la dégradation de la situation ne peut être niée.
Pascal Boulanger, président de la FPI, n'hésite pas à parler de "situation catastrophique" : "Faute d'acquéreurs, les promoteurs n'ont d'autre choix que de retarder ou d'abandonner des opérations nouvelles. Ce sont autant de logements nouveaux qui ne seront pas sur le marché dans les 2 ou 3 ans qui viennent. Le déficit de nouveaux logements viendra bloquer le parcours résidentiel de nombreux ménages dans les prochaines années. De conjoncturelle, la crise est devenue structurelle."
Des indicateurs qui inquiètent
Une hausse des taux d'intérêts des nouveaux crédits à l'habitat qui ne semble pas encore avoir atteint son pic. Source : FPI.
Les principaux indicateurs relevés par la FPI indiquent que le secteur s'enfonce dans la crise, sans "aucun signe d'un retournement favorable de la conjoncture immobilière".
- En France, la croissance stagne (+0,1% au T3 2023 par rapport au T2 2023). La branche construction du T3 est même baissière (-0,1% au T3 2023 par rapport au T2 2023).
- L'investissement des ménages se stabilise, après avoir été en baisse depuis 2022 (+0,1% au T3 2023). Le bilan global de l'année 2023 reste négatif cependant (-3,2%).
- Le taux d'épargne est élevé, à 18,8% (il est en moyenne de 15% depuis 8 ans, hors périodes de confinement)
- L'inflation est toujours forte (+4%). Après un brusque rebond à +4,9% en septembre, le taux est revenu au niveau de 4% fin octobre 2023. L'inflation a connu son pic en février 2023 à 6,3%. Selon la Banque de France, le retour de l'inflation à un niveau autour de 2% devrait intervenir en 2025, hors nouveau choc sur les matières premières importées.
- Les taux d'intérêt des crédits continuent d'augmenter (3,30%). Ainsi, la croissance des encours brut des prêts à l'habitat n'est plus que de 1,8% (estimation fin septembre 2023), alors qu'elle était de +3,7% en mai 2023. La production mensuelle de crédit à l'habitat (hors renégociations) se réduit progressivement à 9,9 milliards d'euros en août 2023 contre 22,1 milliards d'euros en mai 2022. Il s'agit d'un niveau inférieur au précédent point bas atteint en avril 2020 (10,5 milliards d'euros).
- Le taux d’intérêt moyen des nouveaux crédits à l’habitat (à long terme - au-delà de 7 ans - à taux fixe, hors frais et assurances) s’établit désormais à 3,30% en août 2023.
- La confiance des ménages demeure à un niveau très bas.
Une crise structurelle de l'immobilier neuf
Les mises en vente sur trois mois : une chute de 48,6% pour atteindre 12.039 logements sur le troisième trimestre. "C'est le pire trimestre depuis la création de l'observatoire en 2010", précise la FPI. En observant les chiffres de mise en vente sur 9 mois, la chute est de -30,8%, avec 54.839 logements. Source : FPI
Des ventes en chute libre (-30,6% de ventes totales au 3e trimestre 2023, par rapport au 3e trimestre 2022), des réservations nettes encore plus baissières (-46,6%)...
Pour Pascal Boulanger, "les chiffres sont sans appel : les mesures visant à amortir le choc, mises en oeuvre par le gouvernement avec l'aide d'Action Logement et de CDC Habitat, sont très utiles mais restent insuffisantes".
Perte d'emplois dans le secteur
La FPI a indiqué que nombreux étaient les promoteurs immobiliers contraints à ne "plus remplacer" les départs à la retraite, et que le secteur commençait à perdre des emplois, et donc du savoir-faire. "Ça devient très inquiétant, je vois beaucoup de chargés d'opérations, de monteurs d'opérations changer de métier" a indiqué le président de la FPI.
Selon les estimations patronales, 300.000 emplois seraient menacés d'ici à 2025 dans le secteur, la moitié dans le bâtiment, la moitié dans les métiers connexes, tels les promoteurs, architectes, assureurs...
Source : batirama.com/ Photo © Emilie Wood