Arkeon Energy Systems invente une nouvelle architecture de pompes à chaleur pour adresser le marché de la rénovation des chaufferies fioul et gaz en collectif et en tertiaire.
Notre exploration des fabricants français de pompes à chaleur nous conduit vers des technologies de plus en plus spécifiques. Ce neuvième article est consacré à Arkeon Energy Systems qui développe des pompes à chaleur haute température tout à fait particulières pour le collectif. Nous avons déjà parlé de Q-Ref, Lemasson, Saunier Duval à Nantes, Arkteos, Airwell, Géothermik, Thereco, un fabricant de rooftops breton, de Novenci SAS qui fabrique et commercialise des pompes à chaleur sous la marque Novency dans les Vosges.
D’abord la rénovation
Comme elle se présente elle-même, Arkeon Energy Systems est une start-up industrielle créée en 2020 dans le domaine des pompes à chaleur et du bâtiment intelligent. Elle a été fondée par deux ingénieurs issus de l’aéronautique et du spatial, une personne venue d’Engie et par Philippe Chauvin, l’actuel CEO de l’entreprise. En 2022, la société est lauréate de l’Appel à Projets Sepac de soutien à l’innovation dans les systèmes énergétiques et traitement de l’air des bâtiments, opéré par l’Ademe et doté de 3M€ de subventions.
En 2023, Arkeon Energy Systems a levé 5,5 M€ auprès du fonds CA’IN du Crédit Agricole, de Team for the Planet (1,2 M€), complétés par cette aide du plan de financement France 2030 opéré par l’Ademe.
Comme l’explique Philippe Chauvin, l’entreprise se focalise sur le collectif et le tertiaire et a mis au point une solution permettant de réaliser jusqu'à 70% d’économie d’énergie par rapport à une chaudière fioul ou gaz dans l’existant. Arkeon Energy Systems vise d’abord le marché de la rénovation des chaufferies fioul et gaz et du remplacement du chauffage électrique direct. Elle travaille étroitement avec les principaux exploitants – Dalkia, Engie, Idex ou la CRAM – pour développer des projets de rénovation de chaufferie.
Le palier thermique
Arkeon Energy Systems développe la SmartpPAC, une pompe à chaleur assez particulière. Pour commencer, elle utilise le HFO-1234ze, dont le GWP est égal à 7 et qui ne semble pas visé par les restrictions d’emploi apparues dans la dernière rédaction du règlement F-Gaz. L’emploi du HFO-1234ze permet de produire des températures de départ d’eau jusqu’à 80°C. Ensuite, elle embarque un unique compresseur à vis Bitzer, plus robuste que les scrolls, piloté par inverter, qui alimente deux circuits indépendants : la SmartPAC utilise un "palier thermique".
Le premier circuit est un circuit thermodynamique air/eau qui produit de l’eau stockée à 30°C dans un ballon tampon. Le second circuit, toujours propulsé par le même compresseur, est un circuit thermodynamique eau/eau dont la source froide est le tampon thermique à 30°C. Ce second circuit produit une température de départ d’eau, selon les besoins de l’installation, entre 65 et 80°C. Le même compresseur est également utilisé pour la production d'ECS. Un seul compresseur pour trois fonctions différentes, ce qui lui assure un fonctionnement continu ou presque. Bien que Philippe Chauvin reste discret sur ce point, la Smartpac contient aussi un jeu de vannes électroniques très sophistiqué pour passer du circuit air/eau, au circuit eau/eau. Le dégivrage est assuré à partir du tampon thermique.
Cette architecture spécifique avec palier thermique est destinée à résoudre l’une des limitations des pacs : la baisse du rendement des pac air/eau lorsque le Δt entre la température extérieure et la température de départ d’eau est important. © Arkeon Energy Systems
Selon Philippe Chauvin, par une température extérieure de -11°C et avec une température de départ d’eau de 65°C, le COP de la SmartPAC atteint 2.
Côté software, la startup utilise la data science et l’intelligence artificielle pour alterner efficacement ces cycles et mieux anticiper les besoins. En tout, cinq brevets en systèmes thermodynamiques et IoT ont été déposés.
De 50 à 600 kW
Pour l’instant, la Smartpac commence à 50 kW de puissance. 50 kW correspondent aux besoins d’un bâtiment existant d’une vingtaine de logements. Arkeon Energy Systems étudie aussi des applications au-delà d’1 MW et l’alimentation de mini-réseaux de chauffage urbain.
Outre le palier thermique, la SmartPAC incorpore d’autres innovations. Sa construction lui permet de s’effacer si le réseau électrique le demande, tout en profitant de l’inertie des bâtiments.
La récente levée de fonds va notamment financer l’industrialisation de la fabrication des SmartPAC. Les premières sont pour l’instant fabriquées chez Cap2i à Sartrouville, qui, depuis 40 ans conçoit et fabrique des systèmes de climatisation et de traitement d’air.
La levée de fonds va également financer le développement d’un stockage tampon pour le palier thermique faisant appel non-plus à l’eau, mais à des matériaux à changement de phase pour augmenter sa densité énergétique et maîtriser son volume quand la puissance des systèmes SmartPAC augmente. Arkeon Energy Systems envisage de plonger les échangeurs des circuits thermodynamiques directement dans les matériaux à changement de phase, au lieu de les encapsuler. Ce qui devrait améliorer le rendement. Arkeon Energy Systems vient également d’acheter une entreprise de software et possédant une forte expertise en IoT (Internet of Things ou internet des objets). On peut donc s’attendre d’ici trois mois à de nouvelles annonces. Nous resterons attentifs.
Les deux premières SmartPAC en Rhône-Alpes
En attendant, les deux premières SmartPAC sont en construction et devraient être installées dans des bâtiments de logements collectifs appartenant à l’OPAC du Rhône. L’un abrite 30 logements, la seconde opération rassemble 64 logements répartis entre plusieurs bâtiments dans une résidence.
Arkeon Energy Systems est passé de 12 à 34 personnes au cours des derniers mois. Mais comme le souligne Philippe Chauvin, la SmartPAC bénéficie de tout un écosystème qui participe à son développement : les chercheurs de Bitzer, les experts de Cap2i, le service de recherche d’Arkeon Energy Systems, pour l’instant abrité dans les locaux de l’ESTIA à Bidart, … au total une cinquantaine de personnes participent à son développement et à son industrialisation. ©Arkeon Energy Systems
©Arkeon Energy Systems
Source : batirama.com / Pascal Poggi