Tout a été dit et écrit sur cette île artificielle dans le Golfe de Mandelieu-la-Napoule, près de Cannes (Alpes-Maritimes) : aberration écologique, projet dénué de bon sens, île paradisiaque ... Qu'en est-il vraiment ?
Tous les ingrédients pour une interminable saga estivale sont là : Côte d'Azur, plage ensoleillée, cocktails en bord de piscine, mer Méditerrannée, bergère d'azur infinie que l'on voit danser le long des golfes clairs ... et rebondissements en pagaille !
Une île flottante récréative au cœur des polémiques
Durant plus d’un an, l'île artificielle Canua Island, sous forme de trimaran géant, aura été au cœur d'une interminable saga, entre procédures judiciaires, contestations et polémiques.
Le premier à engager les hostilités avait été Renaud Muselier, le président de la région Provence-Alpes-Côte d’Azur. Derrière ce trimaran XXL, il voyait un projet "dénué de bon sens" et nuisible à l’environnement, dont il refusait la présence sur son territoire. Le gouvernement partageait sa position et avait été jusqu’à engager un recours devant le Conseil d’État. © Gala
L'affaire avait même été portée devant le Conseil d'État, qui avait finalement validé le projet le 18 décembre 2023, en accordant les permis de navigation et d'amarrage.
Toutefois, même si l'inauguration du trimaran flottant récréatif a eu lieu ce jeudi 16 mai 2024, beaucoup d'encre devrait encore couler puisqu'au lendemain même de son inauguration, 21 maires de la Côte d’Azur ont rédigé une tribune contre cette "aberration écologique", arguant que cette "activité ne peut que générer des nuisances qui impacteront gravement l’intégrité du milieu naturel et affecteront la faune et la flore sauvage.", tel que le déclare le maire de Nice, Christian Estrosi.
Parmi les autres signataires de la tribune, on retrouve les maires de :
– Théoule-sur-Mer (Alpes-Maritimes),
– Saint-Laurent-du-Var (Var),
– Villeneuve-Loubet (Alpes-Maritimes),
– Bandol (Var),
– Bormes-les-Mimosas (Var),
– Hyères (Var),
– Toulon,
– et Saint-Tropez (Var).
Dans leur communiqué, les édiles souhaitent alerter : "Sans une opposition claire à cette exploitation commerciale du milieu maritime naturel, ce projet risque de se multiplier sur nos côtes", pour "une activité événementielle qui mettra en péril l’intégrité naturelle du milieu marin" via "des ondes sonores aquatiques", un "trafic permanent de navires à moteur pour le transport de clients et du personnel", une "luminosité artificielle nocturne", un "risque de pollution due à la collecte de déchets" ou encore "la récupération des eaux grises".
Ainsi, si Marc Audineau et Tony Philp, les deux fondateurs et associés de cette plage flottante, peuvent enfin souffler, leur répit est peut-être de courte durée ...
Le navire le "plus propre de la Méditerranée"
De leur côté, les deux fondateurs du projet, Marc Audineau et son associé Tony Philp, un ancien champion du monde de planche à voile, n’ont cessé de marteler que ce navire était le "plus propre de la Méditerranée", en comparaison des yachts ou bateaux de croisières pullulant sur les eaux azuréennes, vantant un "concept écoresponsable" avec des matériaux recyclés et notamment l’usage de biocarburant.
Marc Audineau et Tony Philp ont tenté de rassurer sur leur projet, arguant qu'il ne s'agissait en aucun cas d'une boîte de nuit et qu'ils s'engageaient à réduire le plus possible les nuisances sonores afin de ne pas perturber la faune marine. Leurs arguments sont demeurés lettre morte auprès des différents opposants, qui voient aussi dans le projet une concurrence déloyale vis-à-vis des autres restaurateurs implantés sur le littoral. © Lionel Barbe / Canua Island
Marc Audineau et Tony Philp l'assurent : les normes environnementales sont au centre du projet de Canua Island. Ainsi, l'empreinte carbone est trois fois moins élevée que celle d’un voilier du Vendée Globe, l'utilisation d'un biocarburant est actée, le mouillage se fait sur fonds sablonneux, la récupération des eaux usées est mise en place, zéro lumière sous-marine admise et le son est atténué afin de respecter un maximum la vie marine.
"Tout a été fait dans des matériaux naturels, durables, recyclables." tiennent à rassurer les deux créateurs du projet. Son dessalinisateur renouvelle l'eau sans épuiser les ressources en eau douce et son système de gestion des eaux usées évite tout rejet nocif dans la mer, ce qui permet à l'île nomade de s'intégrer harmonieusement à son environnement côtier. Canua Island met au cœur de son projet la sensibilisation et la formation de son équipage, tous dédiés à la préservation de l'écosystème marin. © Lionel Barbe / Canua Island
1 750 m2 sur deux étages
À bord de ce mastodonte des mers, il y a de l'espace, comme de quoi se livrer à une pléthore d'activités, dont le farniente : piscine d'eau douce et ses transats confortables, espace lounge, rooftop, restaurant, bar, activités nautiques (paddle, kayak, snorkeling), etc., rien n'est laissé au hasard afin de divertir les clients au beau milieu de la mer Méditerranée, le tout dans un cadre cosy et musical et une vue époustouflante à 360°.
Le rooftop de 480 m2 peut accueillir jusqu’à 350 invités. © Lionel Barbe / Canua Island
L'île nomade Canua island peut s'ancrer dans différentes zones de la "French Riviera" et se distingue par son faible rapport de hauteur, assurant une stabilité sept fois supérieure à celle d'un super yacht. L’été dernier, alors qu’ils n’avaient pas réussi à obtenir les permis, les co-fondateurs semblaient avoir abandonné, dénonçant "une aberration, une obstruction et une vendetta politique" à leur encontre. Aujourd'hui, même si les deux entrepreneurs ont eu gain de cause sur le terrain judiciaire, rien ne dit que la saga n'aura pas une suite ... © Lionel Barbe / Canua Island
Pour sa première année de commercialisation, Canua Island souhaite se limiter à des événements privés. L'île nomade ne sera donc pas accessible au public, ce qui était préalablement prévu via un système de navettes.
Neuf marins composent l’équipage du trimaran XXL, financé par des entrepreneurs français pour la modique somme de 16 millions d’euros.
Canua Island, basée à La Seyne-sur-Mer, doit flotter au gré des événements dans les eaux azuréennes durant toute la saison estivale : "Nous irons là où nous avons le droit de mouiller tout en respectant la réglementation pour les bateaux de plus de 24 mètres" précisent Marc Audineau et Tony Philp.
Source : batirama.com / Laure Pophillat