Les ressources du modulaire 3D bois à l’âge du hors-site

L’industrialisation de la préfabrication d’éléments tridimensionnels biosourcés n’entrave ni l’architecture, ni les objectifs sociaux, révèle l’atelier B4 du dernier Forum Bois Construction.

Le fondateur d’Ossabois, Pascal Chazal, est le chantre du hors-site et on lui doit sans doute la création d’une association dédiée, en complément de l’univers médiatique et de conseil qu’il a créé, fin 2023. Quelques mois après la création de l’association et de la Charte, le Forum Bois Construction l’invite à modérer un atelier basé sur les appels à projets, qui font émerger plusieurs chantiers de modulaire 3D originaux et complémentaires.

 

 

 

Le discours face à la pratique du hors-site

On sait bien que quand le modérateur est Pascal Chazal, il va parler de façon passionnée de son grand sujet, face à des conférenciers architectes qui ne sont pas forcément des inconditionnels du modulaire 3D. Un débat critique sur les limites de cette approche modulaire qui revient régulièrement comme un serpent de mer se brise sur la gentillesse et l’entrain du modérateur, pour qui, en retour, les projets sélectionnés de l’atelier B4 ne sont pas forcément des modèles de l’industrialisation de la construction qu’il préconise. On ne lui en veut pas non plus de ne pas s’en être tenu dans son introduction à un aperçu des impressionnants investissements internationaux en matière de production de modules biosourcés 3D, en Grande-Bretagne, en Allemagne, en Suède et en France.

 

L'internat remanié par les agences Leclercq et Carcelen ressemble plus à un ouvrage leclercq Carcelen qu'à un empilement de boîtes. © Leclerq Carcelen

 

 

 

L’internat-ionale du 3D

Ainsi, quand Ossabois fabrique les modules de chambres de l’internat du lycée Uruguay-France à Avron, les pointures Leclercq et Anne Carcelen poussent la productivité d’Ossabois dans ses retranchements en intégrant des modules d’angle et des socles de rattrapage pour insérer les nouveaux modules dans le bâtiment ancien. Globalement, ce chantier est typique du 3D, comme les logements étudiants à Cuffies par le spécialiste Moon Architecture et Bouygues TH.

 

La rénovation de l'internat de Cluny par Bô Architecte est le chantier modulaire le plus spetaculaire de l'année. © Bô Architectes

 

 

On attendait de TH des concepts biosourcés et modulaires permettant de créer des écoles, mais pour le coup, démonstration est faite que Bouygues est désormais en mesure de faire le levage des modules tout en étant associé à leur fabrication, en conception-réalisation, de sorte que GA/Ossabois dispose désormais d’un concurrent direct. Et on se demande ce qui s’est passé car avant d’être revendu à GA Smart Buildings, Ossabois avait fait un tour dans la nébuleuse Bouygues.

 

 

 

Le modulaire au service du vernaculaire

Ce n’est pas la première fois que le Forum présente des projets modulaires et par le passé, il y en a eu de plus sexy, comme l’hôtel de 75 mètres sans béton au nord de Stockholm par White Architecture, les grands projets européens de Sauerbruch Hutton ou la surélévation provisoire au-dessus d’un boulevard de Monaco avec Ossabois. Les internats sont plus courants, mais l’opération de rénovation d’un internat à Cluny en conservant l’enveloppe ancienne a défrayé la chronique : faire travailler des locaux sur des modules hors normes et déplacer le toit pour venir les insérer dans un volume intérieur totalement curé est spectaculaire. Il s’agit surtout d’une prouesse architecturale de l’agence Bô Architectes, une maîtrise du biosourcée qui lui permet d’adopter l’option modulaire quand le besoin s’en fait sentir.

 

Module de Toit Temporaire Urbain déposé à Paris. © Virtuel Architecture

 

 

 

Une nouvelle économie de la construction

Au sein de cet atelier, le projet qui se démarque par-dessus tout est cependant le Toit Temporaire Urbain, même si on en parle déjà depuis de nombreuses années et que deux modules témoins viennent seulement d’être installés à l’ombre des tours Duo à Paris. Comme le rappelle Laurent Pillaud de Virtuel Architecture, ce projet est unique à plus d’un titre, par un regroupement de la commande publique qui s’adresse à un regroupement de fournisseurs où surnage Selvea. Il est question d’acheter chaque année 200 modules au fabricant de Montpellier, afin de bâtir des installations diverses et temporaires, tout en récupérant les modules pour les réutiliser. Une première opération est prévue pour la fin de l’année à Stains.

 

 

 

Modularité et temporalité

C’est une revanche pour Virtuel Architecture qui avait réussi il y a quelques années à habiter le toit de barres de logements sociaux à Poissy avec des maisons modulaires abondamment montrées mais ne débouchant sur aucune commande ultérieure, un peu comme le bois debout R+5 ossature bois de Stéphane Cochet pour Osica à Montreuil ou d’autres opérations spectaculaires et sans suite. Virtuel connaît le modulaire et sa dimension sociale et se risque à une grande complexité de processus de décision pour un concept épuré de modules standards 6x3 m (donc au-delà des 2,80 m routiers), permettant de créer des cellules des 9x6.

À la clé, une approche qui ne se résume plus à empiler des modules dans un environnement d’accès, mais d’intégrer ces circulations dans les modules. Selvea est l’un des maîtres français du modulaire 3D en bois et sait de quoi il parle, mais on attend des réalisations concrètes pour se faire une véritable idée de la faisabilité technique et économique d’une approche sociale originale.   

 


Source : batirama.com / Jonas Tophoven © Michel Laurent

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