Actuellement, la nouvelle génération d’architectes ne jure que par la construction biosourcée associée à la terre crue, mais s’aventure ainsi sur un terrain peu balisé en termes de valeurs acoustiques mesurées.
La programmation du Forum Bois Construction de ces dernières années ne fait que confirmer une tendance que l’on retrouve également dans les sélections du Prix régional et national construction bois. Si possible, les projets bois intègrent des isolants biosourcés et de la terre crue. Par contre, on manque encore cruellement de mesures de performances acoustiques in situ qui doivent permettre de calibrer les projets.
L’acoustique au Forum Bois Construction
Comme le Forum Construction Bois accueille depuis l’édition de Lille en 2023 le club des acousticiens bas carbone issu de la commission acoustique de l’association AdivBois désormais dissoute, il était logique de faire le point sur l’évolution de ce nouveau domaine qu’est l’acoustique biosourcée voire biogéosourcée. Les bureaux d’acoustique Acoustb, AIDA, Gamba, Lasa et Ekkoia n’ont pas réussi à occuper toute la plage de 1h30 avec des retours d’expérience sur ce sujet.
L'acoustique biosourcée est un domaine de recherche nouveau qui suscite beaucoup d'intérêt. © Michel Laurent
La paille tellement en vogue ne peut s’appuyer que sur des mesures portant sur la Ferme du Rail déjà présentée au Forum il y a cinq ans. Quant à la paille porteuse, l’expérience actuelle de la déchetterie de Pléven en Bretagne avait incité Acoustb à venir faire des mesures par curiosité et de par sa proximité avec le BE Egis. Il a cependant fallu colmater une porte et reporter les mesures avec cloisons séparatives, à cause d’un dégât des eaux.
Un nouveau système masse-ressort-masse
Globalement, la paille enduite sur les deux faces crée une nouvelle forme de système masse-ressort-masse. De sorte que la voie humide de la construction paille, encore peu développée, cumule plusieurs atouts : protection au feu, confort hygrométrique et intérêt acoustique. Malgré l’enthousiasme des acousticiens bas carbone, il reste encore beaucoup à faire pour découvrir ce type de système, quasiment méconnu au regard de celui avec du plâtre et de la laine minérale.
Caroline de Pontevès (Aïda Acoustique) lève le voile sur des solutions acoustiques adoptées au Village des Athlètes. © FBC
Pour la paille en caissons, le cas du bâtiment d’habitation de la Ferme du Rail a permis de mesurer l’effet de l’interruption de la plaque OSB du plancher au droit des séparatifs. De même, à Pleven, la performance acoustique de la cloison en paille porteuse a pu être mesurée avec enduit mais sans doublage intérieur.
Les acousticiens n’ont pas peur des isolants bioourcés
En ce qui concerne les autres isolants biosourcés et notamment la fibre de bois, le Village des Athlètes, et notamment le lot E, fournissent de nombreuses possibilités pour s’assurer de ce qui a déjà été établi il y a des années par des tests de laboratoire : la fibre de bois en remplacement de la laine minérale ne dégrade pas la performance acoustique. Un chantier comme celui de la Ferme du Rail implique, outre la paille, de la ouate de cellulose, des textiles recyclés, et les valeurs acoustiques mesurée s’y rapportent. On manque encore de données, mais les acousticiens ne semblent pas douter de l’intérêt acoustique de ces produits alternatifs.
Karin le Tyrant d'Aïda Acoustique, pilier du club des acousticiens bas carbone. © FBC
La terre crue et l’acoustique
Il n’en va pas différemment de la terre crue, si ce n’est que les tests réalisés autour de Carré Flore révèlent quelques problèmes de microfissures peut-être dus aux fondations insuffisantes. Alors que le projet combine de nombreux matériaux, dont le bois, pour permettre de comparer les performances, les résultats présentés au Forum Bois Construction portaient paradoxalement sur une configuration avec plancher béton. Pourtant, le rapporteur du projet de recherche France 2030, Carac’Terre, souligne l’omniprésence du bois dans les solutions contructives en terre crue.
D’ici 2027, ce projet de recherche pourra combler les vides et apporter à la filière bois des mesures acoustiques utiles. D’autant que le projet se concentre, comme l’industriel francilien Cycle Terre actuellement à l’arrêt, sur des solutions non stabilisées, donc non porteuses et sans ajout de ciment. Outre la possibilité d’un ré-usage, cette option favorise le recours au bois structurel.
L’acoustique n’est qu’un moindre problème des solutions biogéosourcées face aux impératifs thermiques, à l’inertie, au feu. Mais justement, cela forme un tout. La combinaison qui apporte l’inertie et le coupe-feu peut aussi parfaire l’acoustique, voire contribuer à déplacer le point de rosée. Pour les architectes, la construction biogéosourcée est à la foi une obligation morale et un formidable défi architectural qui ouvre la voie à une nouvelle architecture.
Pour les ingénieurs, acousticiens, thermiciens, structurels, il s’agit d’un autre défi, d’autant plus stimulant que l’ingénierie est concourante. Il semble que le club des acousticiens bas carbone aime pratiquer une forme d’échange et de collaboration entre BE acoustiques. Au Forum Bois Construction, les BE structure, notamment de l’association IBC, suivent cela de près et désormais, un projet de réalisation mutuelle de livre blanc pour la construction bois acoustique semble voir le jour.
Source : batirama.com / Jonas Tophoven © Michel Laurent