Les ressources de l’architecture locale

La prise en compte des matériaux locaux et des émissions de carbone réelles stimule bien plus l’architecture qu’elle ne la contraint, comme le montre la session inaugurale 3.2 du dernier Forum Bois Construction.

Qu’il s’agisse de miser sur le bois de France dans un cadre labellisé ou non, ou sur du bois local résineux ou feuillus, avec ou sans véritable comptabilisation du bénéfice carbone : l’architecture qui émerge actuellement rompt les ponts avec la tendance académique et néocorbuséenne qui a dominé le paysage français des dernières décennies.

 

 

 

Bois structurel bien visible

Le style reste à définir, mais pour la manière, c’est la sobriété qui prévaut. Le nouveau bâtiment tertiaire R+6 du CHU de Rennes est une véritable leçon de construction biosourcée de bureaux. La conjonction d’une destination code du travail et d’un environnement de sapeurs-pompiers pas totalement en accord avec la doctrine de sapeurs-pompiers de la préfecture de Police de Paris permet au bois de se révéler pleinement dans l’aménagement intérieur. Les deux noyaux de contreventement et de protection des personnes sont en béton préfa. Les planchers en CLT de pin de Piveteaubois.

 

Marc Ceia présente pour CRR l'immeuble de bureaux du nouveau CHU de Rennes, pour ainsi dire le new normal de la construction tertiaire en France. © Michel Laurent

 

 

Les façades en bois avec en partie des bardages bois sont montées en parallèle des poteaux bois de structure afin d’aller le plus vite possible vers le hors d’eau, hors d’air. L’approche en filière sèche est confortée par le recours assez inhabituel pour le tertiaire à des chapes sèches. Les études ont pu être limitées à cinq mois pour un chantier de 11. Le tandem CRR-Eiffage montre son efficacité sur le marché des bureaux, comme il l’a déjà fait sur celui des équipements scolaires.

 

 

 

L’aventure architecturale locale

Contraste avec les écoles que l’agence nancéenne Studiolada construit actuellement en bois local, non seulement en Lorraine mais également dans le Massif Central. Conformément à la méthode dont Studiolada est le chantre, le projet tente de prendre en compte les spécificités des ressources locales, non seulement en termes d’essences de bois, mais aussi de sections et de transformation. L’équation est finalement relativement simple. L’agence tente de se passer de bois collés, confortée par la maîtrise d’ouvrage locale qui ne veut pas non plus de plaques de plâtre.

 

L'équipe d'Architecture Plurielle montre l'usage qui est fait du bois lacal pour le collège Mathurin Maheux. © Michel Laurent

 

 

Les feuillus offrent des performances mécaniques adaptées également aux transformateurs locaux. Le dessin des projets est simple, parfois presque monacal, comme pour se fondre dans le décor pavillonnaire dans le cas auvergnat. La terre crue, si possible du site, vient en complément d’inertie et s’il faut des aménagements extérieurs, voici le béton de site.

 

 

 

 

L’imaginaire des enfants

Au même titre que l’immeuble rennais sans fard et les écoles en ressources locales, l’extension d’une cantine scolaire à St Martin-le-Haut dans le Rhône se moque bien des arcanes esthétiques et joue la carte infantile de la cabane perchée. Une nouvelle fois, les essences feuillues comme le chêne et le châtaignier sont sollicités de même que la terre crue, les implications techniques et structurelles du choix des essences sont acceptées et retournées comme des opportunités.

 

L'équipe de l'agence Jean-Paul Roda détaille les solutions de construction en feuillus châtaignier pour une extension de réfectoire à Saint Martin-le-Haut. © Michel Laurent

 

 

 

Les vertus du châtaignier

Ce n’est pas un hasard si le dernier projet de la session inaugurale 3.2, le collège Mathurin Méheux en Bretagne, met également en avant le recours aux essences feuillues. Le travail de l’agence Architecture Plurielle se situe à mi-chemin en celle de CRR et celle de Studiolada ou Roda. CLT, inertie par un long noyau central en béton, certes, mais un travail de marqueterie avec des essences feuillues et l’utilisation de bardeaux de châtaignier.

 

En résumé, le marché architectural propose des solutions multi-étage sèches et performantes à tout point de vue, ou bien des options en bois locaux et faiblement transformés associés à des isolants biosourcés et de la terre crue si possible du site pour régler les questions d’inertie. Le geste architectural, c’est de se baisser pour utiliser ce qui est déjà là tout autour, comme le suggérait l’architecte Julie Herrgott à l’occasion du Forum Bois Construction de Lille en avril 2023.


Source : batirama.com / Jonas Tophoven © Forum FBC

↑ Allez en Haut ↑