Contre-visite médicale diligentée par l’employeur : que propose le nouveau décret ?

Un nouveau décret (décret 2024-692 du 5 juillet 2024) organise les modalités et conditions de la contre-visite médicale diligentée par l’employeur. L'occasion pour l'avocat François Taquet de faire le point sur le sujet.

On sait que depuis la loi n° 78-49 du 19 janvier 1978 sur la mensualisation, l’employeur qui maintient tout ou partie de la rémunération d’un salarié malade peut, en contrepartie de cette obligation, demander à un médecin de contrôler la réalité de cette incapacité de travail, en organisant une contre-visite médicale, dès le premier jour d’absence (article L 1226-1 du Code du travail). Le nouveau décret a pour objet d’organiser cette contre-visite médicale.

 

 

 

 

 

Où a lieu la contre-visite médicale ?

 

La contre-visite médicale à domicile

La contre-visite médicale a lieu en principe au domicile du salarié par un médecin mandaté par l’employeur qui se prononce sur le caractère justifié de l’arrêt de travail, y compris sa durée (C. trav. art. R 1226-11, al. 1).

Si toutefois son lieu de repos est différent de son domicile, le salarié doit communiquer cette adresse à l’employeur, dès le début de son arrêt de travail ainsi qu’à l’occasion de tout changement. S’il bénéficie d’un arrêt de travail portant la mention "sortie libre" prévue à l’article R 323-11-1 du CSS, il informe également l’employeur des horaires auxquels la contre-visite peut s’effectuer (C. trav. art. art. R 1226-10).

Si la contre-visite a lieu au domicile du salarié ou au lieu qu’il a communiqué, le médecin peut s’y présenter sans qu’aucun délai de prévenance ne soit exigé (C. trav. art. R 1226-11, al. 3) :

– en dehors des heures de sortie autorisées en application de l’article R 323-11-1 du CSS, le médecin peut donc s’y présenter de 9 h 00 à 11 h 00 et de 14 h 00 à 16 h 00 ;

– Ou, s’il y a lieu en cas d’arrêt de travail portant la mention "sortie libre", aux heures communiquées par le salarié.

 

 

La contre-visite médicale au sein du cabinet du professionnel

Toutefois, cette contre-visite peut également avoir lieu, au choix du médecin, au sein du cabinet du professionnel (C. trav. art. R 1226-11, al. 2 à 4). Si la contre-visite a lieu au cabinet du médecin, elle se fait sur convocation de celui-ci. Si le salarié est dans l’impossibilité de se déplacer, notamment en raison de son état de santé, il doit en informer le médecin en précisant les raisons (C. trav. art. R 1226-11, al. 4).

 

 

 

 

 

Quelles suites sont données à la contre-visite médicale ?

 

Relayer l'information

Au terme de sa mission, le médecin doit informer l’employeur (C. trav. art. R 1226-12, al. 1) :

– soit du caractère justifié ou injustifié de l’arrêt de travail ;

–  Soit de l’impossibilité de procéder au contrôle pour un motif imputable au salarié, tenant notamment à son refus de se présenter à la convocation ou à son absence lors de la visite à domicile.

Pour sa part, l’employeur doit transmettre sans délai cette information au salarié (C. trav. art. R 1226-12, al. 1).

 

 

Une période d’essai rompue hors délai s’analyse en un licenciement (Cass soc. 3 juillet 2024. pourvoi n° 22-17452)

En l’espèce, un employeur avait rompu une période d’essai tardivement, en mentionnant par écrit les raisons justifiant, selon lui, la fin de l’essai. Logiquement, la Cour d’appel avait jugé que cette rupture de la période d’essai hors délai s’analysait en un licenciement sans cause réelle et sérieuse. La Cour de cassation rejette logiquement le pourvoi, rappelant que, la période d'essai ayant été rompue hors délai, la Cour d’appel n’avait pas à examiner les motifs énoncés par l'employeur dans la lettre de rupture, celle-ci s’analysant en un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

 

 


Dépassement de la durée du travail (Cass soc. 11 mai 2023. pourvoi n° 21-22281)

Le seul constat du dépassement de durée maximale hebdomadaire ou quotidienne de travail ouvre droit à réparation. Notamment si le salarié n'a pas bénéficié du repos journalier conventionnel de 12h entre 2 services.

N'oublions pas que selon l’article L. 4121-1 du Code du travail, l’employeur est tenu de prendre toutes les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale de ses salariés. Qui plus est, depuis les arrêts "Eternit" de 2002 la Chambre sociale de la Cour de cassation a décidé "qu'en vertu du contrat de travail le liant à son salarié, l'employeur est tenu envers celui-ci d'une obligation de sécurité de résultat" (Cass soc. 28 février 2002, pourvoi n° 00-11793).

 

 

 

 

 

Du côté de la jurisprudence

 

Droit du travail

Lorsque le salarié, en raison de son état de santé, travaille selon un temps partiel thérapeutique lorsqu'il est licencié, le salaire de référence à prendre en considération pour le calcul de l'indemnité compensatrice de préavis ainsi que de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse est le salaire perçu par le salarié antérieurement au temps partiel thérapeutique et à l'arrêt de travail pour maladie l'ayant, le cas échéant, précédé (Cass soc. 12 juin 2024 pourvoi n° 23-13975).

Pour un salarié dont l'ancienneté dans l'entreprise est de moins d'une année, le montant maximal de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse est d'un mois de salaire, ce dont il résulte que l'intéressé peut prétendre à une indemnité dont il appartient au juge de déterminer le montant (Cass soc. 12 juin 2024 pourvoi n° 23-11825).
Les formalités substantielles de la rupture conventionnelle ont été respectées lorsque, après que l'autorité administrative a déclaré irrecevable la demande d'homologation de la convention de rupture au regard du montant des salaires mentionné dans le formulaire de rupture, l'employeur n'a pas recommencé la procédure mais a donné des explications à l'administration sans modifier les montants de salaires indiqués initialement, ces observations ne nécessitant pas une telle modification (Cass soc. 19 juin 2024 pourvoi n° 22-23143).

En cas de litige relatif à la validité d’une signature apposée sur un CDD, l’original du contrat doit être produit devant le juge. À défaut, le contrat est réputé non écrit et encourt la requalification en CDI (Cass soc. 12 juin 2024 pourvoi n° 22-20962).

La lettre par laquelle l’employeur adresse des reproches à la salariée, pour des faits qu’il estime fautifs, constitue une sanction disciplinaire (Cass soc. 29 mai 2024 pourvoi n° 22-19313).

 

 

Paie / URSSAF

La mise en demeure adressée par l’URSSAF à la société constitue, à l'égard du débiteur principal, la décision de mise en recouvrement des cotisations (Toulouse. 4e Chambre Section 3. 18 juillet 2024. RG n° 21/04904).

L'article L.244-9 du code de la sécurité sociale dispose que la contrainte est décernée par le directeur d'un organisme de sécurité sociale. Il est constant que la contrainte doit être signée par le directeur de l'organisme de sécurité sociale ou son délégataire de sorte qu'en cas de litige, le tribunal doit vérifier la qualité du signataire et notamment que le signataire de la contrainte est titulaire d'une délégation du directeur de l'URSSAF (Aix en Provence. Chambre 4-8a. 18 juillet 2024. RG n° 22/06324).

La mise en demeure adressée à l'adresse du débiteur produit son effet quels que soient les modes de délivrance. Cet acte n'étant pas de nature contentieuse, le défaut de réception effective par le débiteur de la mise en demeure (qui doit lui avoir été adressée à la dernière adresse déclarée) par lettre recommandée avec avis de réception n'affecte ni la validité de celle-ci, ni la validité de la procédure de redressement (Dijon, Chambre sociale, 4 juillet 2024, RG n° 22/00411).

Dans le cadre du travail dissimulé, la communication du rapport de contrôle et du procès-verbal de travail dissimulé au cotisant n'est pas exigée. Il en est de même de l'information du cotisant de l'existence d'une charte du cotisant dans l'avis de contrôle prévue par l'article R. 243-59 alinéa 1 qui n'est pas applicable au contrôle en matière de travail dissimulé (Amiens, 2° protection sociale. 11 juillet 2024, RG n° 23/01055).

 



Source : batirama.com / François Taquet

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