89 exposants sont répertoriés « hors-site » pour l’édition 2024 d’un salon qui a mis en avant, au cours de ses éditions passées, cette approche qui représente un gisement d’innovation hors-pair.
Autour de l’ACIM (Acteurs de la Construction Industrialisée et Modulaire) et du chantre passionné du hors-site, Pascal Chazal, les précédentes éditions de Batimat avaient donné pâle figure au secteur de la construction bois, au profit d’un secteur hors-site en plein déploiement. De fait, des constructeurs bois comme Sybois ou des préfabricateurs comme Charmossature, fidèles exposants de Batimat, s’inscrivent eux-mêmes dans le registre du hors-site.
Médaille d’or pour la France
Le hors-site constituait une des dix catégories des Awards de l’Innovation, avec quatre lauréats : de l’or pour la Brique de Guyane et son offre de solutions modulaires Symbioflex. De fait, le fabricant de brique de terre crue, qui avait déjà exposé au Forum Bois Construction de Lille, propose désormais des habitats associant une structure modulaire en bois local à des remplissages en briques de terre crue.
Marier la terre crue si tendance avec des modules en bois ouvre la voie au développement d'une offre tropicale industrialisée et bas carbone. © SymbioFlex
Hors-site et autonomie
L’argent revient au Portugais Biomespace qui imagine un habitat modulaire autonome en termes d’énergie, d’eau, de réseaux sanitaires, sans bétonisation mais avec une structure en acier. La non bétonisation du sol se retrouve avec le lauréat de bronze, le canadien Technopieux, ex-aequo avec l’Italien Tecnostrutture Srl. Les Techno Pieux (sorte de grosses vis qui servent de fondations) ne sont pas en soi une nouveauté, mais trouvent une nouvelle jeunesse avec la possibilité de les combiner avec des modules 3D, et s’inscrivent dans une révolution de la construction qui ne s’appuie plus forcément sur une infrastructure en béton. Quant à Tecnostrutture, le système NPS Flex vise la possibilité de désassemblage et son volet avec des panneaux massifs en bois a été développé en collaboration avec Rubner. On retrouve une semblable approche chez GSCM Constructions Modulaires, qui insiste sur le reconditionnement de ses modules.
Préfabriquer pour désassembler, une approche constructive dans l'air du temps. © NPS Flex
Le modulaire 3D ne domine pas encore
Les Awards montrent bien que quand on parle du hors-site, on entend surtout la construction modulaire 3D et moins la préfabrication ou l’industrialisation en tant que telle. En fin de compte, le stand de l’ACIM, H1-M, est tout proche de celui de la filière bois (H1-P), tandis que les exposants qui se réclament de la construction hors-site sont placés un peu partout, H6, H7 (béton), H5, H4… Les 89 exposants qui cochent la case hors-site se démarquent de cinq autres catégories ou dominent étonnamment Équipbaie-MétalExpo (361 entrées) devant la catégorie Gros œuvre, Structure et enveloppe (357).
Les pieux remplace d'autant mieux les fondations que la superstructure est légère. Technopieux
En fin de compte, si l’on laisse de côté les entreprises inscrites par défaut en se référant plutôt à la préfabrication, les acteurs de la construction modulaire 3D présents à Batimat sont assez rares. Il faut cependant noter l'arrivée de la startup Zen Modular par Pascla Chazal : " Il s'agit d'une startup dont l'ambition est d'exploiter tout le potentiel de la construction modulaire pour concevoir et construire des bâtiments durables, innovants et beaucoup plus respectueux de l'environnement. Cette plateforme digitale permet de réaliser des projets de bâtiment sur la base de modules pré conçus et interopérables, fabriqués par un réseau d'industriels partenaires".
Une apparition remarquée, qui compense le manque les principaux fournisseurs français de solutions à base de bois. Batimat propose d’ailleurs une bonne diversité de matières, entre l’ossature métallique légère de Sweelco ou beSteel, les solutions acier bois d’Avelis, l‘approche savoyarde tout bois et 2D de Woodly ou le béton préfa.
Les pistes du futur
On voit se dessiner les contours du marché de demain : la préfabrication, certes, mais aussi la récupération et le réemploi. Le contenant, bien sûr, mais sans doute aussi les compléments qui permettent d’assurer une autonomie à la construction. Un choix de matière, certes, mais pourquoi pas une recherche de complémentarité hybride. Une préfabrication modulaire, pourquoi pas, mais surtout une capacité de préfabrication de tout type, 1D, 2D, 3D, car les ouvrages et la rénovation demandent cette flexibilité. Et par-dessus tout, une distance intellectuelle face au concept de hors-site qui n’est finalement qu’un vecteur de communication.
Oublier les concepts
Couler du béton dans des prémurs cadre aussi peu avec le concept du hors-site que réaliser sur site les multiples finitions permettant de masquer le caractère modulaire des modules. Les architectes trament leurs ouvrages, peut-être qu’à l’avenir, cette trame unidimensionnelle va devenir bi ou tridimensionnelle. Pour l’instant, malgré des investissements considérables, notamment dans l’industrie européenne du bois, le hors-site version modulaire 3D en bois reste la niche de la niche que constitue la construction bois. Les autres matériaux et combinaisons existent mais sans qu'aucune solution ne prenne le dessus par rapport aux autres.
Source : batirama.com / Jonas Tophoven © Biomespace