Schneider Electric a réduit la consommation énergétique de son siège de 33 % en 5 ans

L'entrée du bâtiment

Schneider-Electric a prouvé qu’il est possible de réduire drastiquement la consommation d’énergie d’un bâtiment de bureaux sans toucher au bâti, seulement en agissant sur les consommations d’énergie.




L’enjeu était simple pour Schneider Electric : prouver que l’optimisation des consommations d’énergie pour le chauffage, le rafraîchissement, la ventilation, l’éclairage et les auxiliaires, en gros les cinq usages retenus par les règlementations sur la construction neuve, permet de réaliser de très substantielles économies d’énergie. Quel meilleur terrain d’exercice que "The Hive", son siège social à Rueil-Malmaison ? 

C’est un bâtiment de bureaux livré en 2008, occupé par Schneider Electric en temps que locataire en 2009 et capable de recevoir 2 300 personnes. Depuis le Covid et le développement du télétravail, il accueille au maximum 1 300 personnes simultanément. L’entreprise s’est attelée en 5 ans, entre 2009 et 2014, à réduire les consommations d’énergie, tout en assurant le confort des occupants et en effectuant les modifications nécessaires en site occupé, sans interruption d’activité.

 

Après les efforts de Schneider Electric pour optimiser les consommations d’énergie de son bâtiment The Hive, celui-ci a reçu une brassée de certification LEED EBOM Platinum (niveau le plus haut pour l’exploitation des bâtiments de la certification LEED), l’évluation Afnor Efficient Building selon la norme ISO 50001, BREAM IN USE OUTSTANDING, NF HQE EXPLOITATION EXTRAORDINAIRE, etc. © PP

 

 

 

Prouver que le gisement d’économies grâce à l’optimisation est facilement accessible

Du coup, nous avons visité le site avec Régis Martin, chargé Environnement et Énergie du site "The Hive". Comme il nous l’a expliqué, il y avait eu un commissionning des installations techniques en 2009, mais, selon les usages il y a 15 ans, il s’agissait plutôt de s’assurer de leur bon fonctionnement à réception que de l’optimisation des systèmes pour maîtriser les consommations d’énergie

La première action a donc consisté à mettre en place les matériels et les logiciels nécessaires pour bien comprendre ce qui se passe à tout moment dans ce bâtiment. Tous les compteurs ont été rendus communicants. Ensuite, dès 2009, une année entière a été consacrée à la mesure du bâtiment, puis à l’analyse des mesures et à la formalisation d’un plan d’action et d’investissement sur les systèmes techniques de manière à générer des économies d’énergies avec un temps de retour sur investissement inférieur à cinq ans, cinq ans étant la durée du bail. 80 % des actions proposées ont été mises en œuvre entre fin 2009 et 2014. Ce qui a en réalité débouché sur un nouveau commissionning donnant la priorité au confort et à l’optimisation énergétique.

 

Toutes les données collectées par les capteurs, centrales de mesure et compteurs du bâtiment sont remontées au Cloud Schneider Electric local et exploitées par les logiciels de la suite EcoStruxure, notamment EcoStruxure™ Building Operation  et EcoStruxure Building Advisor . Le premier remonte les données et les restitue de manière claire et facilement compréhensible. Le second est une suite de services qui améliore les performances d'exploitation de du système de gestion des bâtiments. Il fournit des informations clés sur les opérations du bâtiment, en surveillant constamment les systèmes et en identifiant les anomalies pour remédier aux inefficacités du bâtiment. © PP

 

 

Tous les TGBT ont été remis à niveau et sont désormais suivis par le logiciel EcoStruxure Power Commission qui aide les électriciens à configurer, tester et signaler, mettre en service et entretenir plus efficacement les disjoncteurs BT et les tableaux électriques. © PP

 

 

Les anciennes centrales de mesure Merlin-Gérin PowerLogic PM800 ont reçu des modules de communication, les compteurs qui communiquaient en Modbus ont migré vers Modbus TCP pour que toutes les informations soient ramenées vers le réseau IP du bâtiment. © PP

 

 

Une série de découvertes

L’analyse des données recueillies dans les TGBT (Tableau Général Basse Tension) a, par exemple, montré que toutes les CTA (Centrale de Traitement d’Air) du bâtiment étaient réglées selon les mêmes consignes de températures : soufflage à 21 °C en hiver et 26 °C en été. Alors que certaines desservaient des parois exposées au nord, d’autres des parois exposées au sud : pose de capteurs de température ambiante pour moduler la température de soufflage

À l’origine, le chauffage était assuré par une chaufferie gaz alimentant des CTA, avec un appoint par résistances électriques dans des poutres "froides" Swegon. Ces poutres froides étaient par ailleurs chargées du rafraîchissement des locaux, alimentées en deux tubes par des groupes froids placés sur les toitures terrasses et raccordées en réseau LonWorks filaire à la GTB. De plus, les CTA ne fonctionnaient qu’en tout ou rien : à l’arrêt ou à 100 % en débit d’air neuf. Schneider Electric a posé des détecteurs de CO2 dans les locaux et modulé le débit des CTA en fonction de leurs informations : le débit nominal passant à 100 % d’air neuf dès que les capteurs détectaient 1 000 PPM (Parties Par Million) de CO2. Cette valeur ayant été définie comme le seuil d’inconfort. Pendant la pandémie du Covid, ce seuil a été abaissé à 500 PPM pour réduire le risque de contamination. Il est resté à cette valeur depuis.

Le résultat de ces collectes de données, de leur analyse et des modifications de réglages des installations à conduit à une réduction de 50 % des consommations d’énergie du poste CVC (Chauffage-Ventilation-Conditionnement d’air) en cinq ans, entre 2009 et 2014, ainsi qu’à une réduction des consommations d’éclairage et des auxiliaires, soit une réduction globale de 33 % des consommations d’énergie – électricité et gaz – au cours de ces cinq années. Mais ce n’était pas suffisant : Schneider Electric vise une neutralité carbone en 2030.

 

The Hive est en réalité composé de trois bâtiments A, B et C. Les capteurs et la numérisation des TGBT rapportent dans le logiciel Power Monitoring Expert, le détail des charges électriques appelées par les divers équipements techniques des bâtiments, usage par usage. Et, pour un usage donné, le chauffage, par exemple, on connaît aussi les puissances appelées étage par étage dans chaque bâtiment. © PP

 

 

 

 

On peut également connaître les consommations par usage, par période pour chaque usage, comparer des périodes, etc. pour une analyse très fine permettant la plus précise des optimisations des consommations de toutes les énergies. © PP

 

 

 

D’autres modifications après 2014

Au-delà des réductions de consommations d’énergie, il fallait donc également migrer vers des sources d’énergie décarbonées : plutôt de l’électricité que du gaz. En ce qui concerne le réseau électrique, le site est livré en 20 000 V et rassemble des cellules MT (Moyenne Tension) et quatre transformateurs dans son poste de livraison. Tous les TGBT ont été numérisés pour acquérir et remonter les données de fonctionnement du réseau de distribution électrique du site, dans le but d’améliorer la sécurité des personnes et des équipements, mais aussi la fiabilité et la qualité de la fourniture de courant, ainsi que faciliter l’exploitation. L’exploitation du bâtiment est assurée par Engie. Ensuite, en 2015-2016, 1 300 m2 de panneaux photovoltaïques ont été installés en toiture, soit 260 kWc, qui produisent en moyenne 9 % de la consommation électrique du site. Puis, Schneider Electric a procédé en 2017 à l’installation d’une géothermie sur nappe. Cette installation n’a pas remplacé la totalité de l’énergie gaz consommée pour le chauffage. Dans le cas d’une géothermie peu profonde (<200 m), la puissance puisée est limitée à 500 kW. De plus, dans le cas de la géothermie sur nappe, avec puisage et rejet dans la même nappe phréatique, d’autres limitations réglementaires ont limité la puissance :

La température de l’eau prélevée en nappe doit être inférieure à 25 °C, et ici, elle est puisée à 16 °C :

– le volume prélevé et le volume réinjecté le sont dans le même aquifère ;

– Ces volumes sont identiques et demeurent inférieurs à 80 m3/heure ;

– La variation de la température dans la nappe dans un rayon de 200 m autour du rejet doit demeurer inférieure à 4°K.

 

Bref, lorsque nous avons visité le site le 19 février 2025, la géothermie eau/eau, réalisée avec des groupes UNIFLAIR, une filiale italienne dont Schneider Electric ne parle pas assez, avait fonctionné 15 814 h depuis sa mise en service, puisé 202,76 MWh dans la nappe et atteint un EER de 5, avec une efficacité tous organes compris (pompes de puisage, de réinjection, etc.) de 300 %.

 

Bilan, le PV en toiture et la géothermie couvrent 20 % des besoins d’énergie de The Hive. Ce qui a fortement réduit les achats d’énergie aux réseaux gaz et électricité et réduit de 90 % les émissions de CO2 du site issues de ses consommations d’énergie pour le CVC. © PP

 

 

Depuis le lancement de l’effort d’optimisation des consommations d’énergie du bâtiment en 2009, de nouveaux usages sont apparus, notamment la charge des véhicules électriques sur le site. The Hive abrite désormais 50 points de charge de 22 kW en triphasé, soit 1100 kW tout de même. Ce qui a requis l’installation d’un nouveau contrôleur dédié au pilotage de ces points de recharge. Pour ne pas exploser la puissance appelée et dépasser la puissance souscrite, il examine en permanence la puissance disponible, fournie par le PV et par le poste de livraison du site, moins les autres usages (chauffage, rafraîchissement, ventilation, éclairage, ascenseurs, etc.) considérés comme prioritaires et répartit cette puissance entre les divers points de charge actifs à un moment donné. The Hive s’est même récemment équipé de points de charge électrique. Le nouveau contrôleur communique en ZigBee avec les points de charge. © PP

 

 

Mais voilà, les résultats obtenus depuis 2009 ne suffisent toujours pas, le siège social de Schneider Electrique ne peut pas vraiment atteindre la neutralité carbone. L’entreprise s’apprête donc à déménager dans un bâtiment tout neuf construit pour elle à La Défense par ICADE, filiale de la Caisse des Dépôts. Nous avons bon espoir de pouvoir vous présenter ce bâtiment.



Source : batirama.com / Pascal Poggi

L'auteur de cet article

photo auteur Pascal Poggi
Pascal Poggi, né en octobre 1956, est un ancien élève de l’ESSEC. Il a commencé sa carrière en vendant du gaz et de l’électricité dans un centre Edf-Gdf dans le sud de l’Île-de-France, a travaillé au marketing de Gaz de France, et a géré quelques années une entreprise de communication technique. Depuis trente ans, il écrit des articles dans la presse technique bâtiment. Il traite de tout le bâtiment, en construction neuve comme en rénovation, depuis les fondations jusqu’à la couverture, avec une prédilection pour les technologies de chauffage, de ventilation, de climatisation, les façades et les ouvrants, les protocoles de communication utilisés dans le bâtiment pour le pilotage des équipements – les nouveaux Matter et Thread, par exemple – et pour la production d’électricité photovoltaïque sur site.
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