BTR 490

22 BATIRAMA N°490 I AVRIL - MAI 2020 ACTUALITÉ MÉTIERS L’épidémie invite à réfléchir, comme le fait Bernard Bruno de Green Window, qui vient de déposer un brevet confortant le matériau bois comme standard constructif de demain. I l faut remonter quelques siècles en arrière pour voir apparaître la distinc- tion entre le métier de la charpente et celui de la « menue huisserie » devenue menuiserie. Lorsque la construction bois a re-émergé dans le courant du 20e siècle, le modèle maçonné imposait la séparation entre gros-œuvre et second-œuvre, parois et fenêtres. Pourtant, l’évolution de la préfa- brication a conduit à intégrer de plus en plus les baies dans les murs préfabriqués finis. Des réflexions diverses ont été menées pour assurer l’étanchéité à l’air complexe au droit des baies. Mais, jusqu’à présent, la fenêtre pré-intégrée aux parois en ossature bois ou en panneaux CLT a toujours été envisagée comme un bouche-trou conduisant le plus souvent à colmater les joints. Dans le même esprit, les constructeurs bois ont pris l’habi- tude de proposer des fenêtres en PVC en complément de leurs structures en bois. Les solutions ingénieuses de Green Window Bernard Bruno n’a pas attendu l’épidémie pour penser la fenêtre de façon différente. Longtemps menuisier aluminium, il a fondé Green Window pour mettre les solutions d’ouvrant bois caché à la portée de menui- siers locaux, repensant par la même occa- sion le concept même de la fenêtre bois-alu. Au lieu de capoter une fenêtre bois avec de l’aluminium sur le côté extérieur, Green Window réserve l’aluminium au dormant qui vient couvrir et protéger l’ouvrant en bois en position fermée. A partir de cette approche, Green Window a développé toute une gamme de solutions ingénieuses qui peinent à freiner le glissement du métier de menuisier vers la vente et la pose. Du moins, jusqu’au jour où Bernard Bruno a compris que le constructeur bois reste bien, lui, un fabricateur. Construction bois et transfert de valeur ajoutée A vrai dire, même les constructeurs bois sont en passe de suivre la même trajectoire que les menuisiers, suite à l’émergence des panneaux en CLT. Alors que l’ossature bois est en général préfabriquée par les construc- teurs en atelier, les constructions en CLT sont usinées chez l’industriel et le construc- teur se contente ensuite de les mettre en œuvre. Rares sont en effet les constructeurs bois qui disposent de portails à commande numérique leur permettant d’usiner avec une grande précision des panneaux lourds et encombrants. Le CLT est confronté aux limites de son approche technique : les pan- neaux peuvent être usinés au millimètre mais l’incorporation par l’industriel des baies, de l’isolation thermique, des dou- blages intérieurs et de l’habillage extérieur ne sont pas à l’ordre du jour. L’idée lumineuse du dormant structurel L’un des intérêts de l’approche de Bernard Bruno, c’est qu’il dépasse cette confrontation entre l’ossature et le CLT. Pour lui, les deux approches ont un point commun évident : la structure de la paroi est en bois massif. Fort de ce constat, il s’est demandé pourquoi on n’utilise pas ce cadre comme dormant de la fenêtre. Dans le cas de l’ossature, il suffirait de remplacer la montant habituel par un montant trois plis et de l’usiner à l’aide d’une moulurière. Quant aux panneaux en CLT, il suffirait d’usiner le champ grâce à des portails à commande numérique performants. Les avantages de ces deux options sont évidents en termes d’étanchéité à l’air, le performance AEV. Par contre, l’approche proposée par Bernard Bruno remet en cause la chaîne de valeur habituelle. La filière déjà mobilisée Avec le dormant structurel, le constructeur bois se met en mesure de livrer le mur fini et le clos-couvert, dans une approche très bas carbone et techniquement sécurisée. La pre- mière étape, en cours, est la validation tech- nique des solutions imaginées par Bernard Bruno. Des tests d’usinage de panneaux en CLT ont déjà été menés par un industriel français du CLT, et des essais d’usinage des montants d’ossature bois par un industriel de la fenêtre bois dans les Vosges. Il faudra passer par la réalisation de chantiers test avec retours d’expérience. Sans oublier que la France tient ici un avantage concurrentiel international. Il faut de l’audace et encore de l’audace, afin de mener ainsi à son terme la démarche industrielle de préfabrication du mur fini en bois, avec baies intégrées. JONAS TOPHOVEN Un dormant structurel pour réveiller la construction bois INNOVATION © JT © JT Bernard Bruno repense la fenêtre bois. La logique constructive du choix du bois en construction bois

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