BTR 491

BATIRAMA N°491 I JUIN - JUILLET 2020 45 GESTION Le gouvernement a déposé au Parlement un projet de loi portant diverses dispositions urgentes pour faire face aux conséquences de l’épidémie de covid-19. L edit projet permettrait d’assouplir le régime des CDD et des contrats de travail temporaire. En effet, une convention d’entreprise pourrait : • fixer le nombre maximal de renouvel- lements possibles pour un CDD. Cette disposition ne serait toutefois pas appli- cable aux contrats conclus dans le cadre de la politique de l’emploi • fixer les modalités de calcul du délai de carence entre deux contrats • prévoir les cas dans lesquels le délai de carence n’est pas applicable Le projet de loi prévoit des disposi- tions similaires en matière de travail temporaire. Le changement est impor- tant puisque jusqu’à présent, seul une convention collective de branche pouvait déroger aux dispositions légales. Désor- mais, que ce soit en matière de CDD ou de travail temporaire, les stipulations de la convention d’entreprise ainsi conclue seraient applicables aux contrats de tra- vail conclus jusqu’au 31 décembre 2020. Accords de ratification simple pour les TPE Et l’on sait que les TPE (c’est-à-dire dans les entités dépourvues de délégués syndicaux de moins de 11 salariés et jusqu’à 20 sa- lariés en l’absence d’élu au CSE) peuvent mettre en œuvre très simplement des ac- cords par ratification à la majorité des deux tiers du personnel. Toutefois, ces nouvelles dispositions ne régleront pas tous les pro- blèmes puis que selon l’article L 1242-1 du Code du travail, « un contrat de travail à durée déterminée, quel que soit son motif, ne peut avoir ni pour objet ni pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l’activité normale et permanente de l’en- treprise » ! Liberté oui…mais surveillée ! Pourra-t-on faire des CDD à la carte ? CRISE ÉCONOMIQUE ET SANITAIRE Pratiquer des ruptures amiables Il ne pas confondre rupture amiable et rupture conventionnelle Il a été jugé par les juges du fond que l’instauration de la rupture convention- nelle (dans le cadre du CDI) interdisait aux parties le recours à la rupture amiable (Dijon, 5 mai 2011, RG no 10-160 - Riom, 12 juin 2012, RG no 11/0099). Cette po- sition a été approuvée par la Cour de cassation (Cass. soc. 15 octobre 2014, pourvoi no 11-22251) La loi vise la rupture amiable dans deux cas : • Le contrat d’apprentissage passé les quarante-cinq premiers jours, consécutifs ou non, de formation pratique en entre- prise, peut être résilié selon l’article L. 6222-18 du Code du travail « sur accord écrit signé des deux parties ». • Le contrat de travail à durée détermi- née selon l’article L. 1243-1 du Code du travail peut être rompu par accord des parties. Toutefois, en cas de rupture amiable dans ces hypothèses, il ne saurait y avoir de garantie de l’assurance chômage pour le salarié ! Modifier unilatéralement un contrat de travail Un contrat de travail ne peut être mo- difié qu’avec l’accord exprès du salarié, lequel ne peut résulter de son silence ou de la poursuite par lui du travail (Cass soc. 16 octobre 2019, pourvoi n° 17-18443) Mettre en œuvre des licenciements économiques de façon prématurée Il existe une définition du licenciement économique : constitue un licenciement pour motif économique le licenciement effectué par un employeur pour un ou plusieurs motifs non inhérents à la per- sonne du salarié résultant d’une suppres- sion ou transformation d’emploi ou d’une modification, refusée par le salarié, d’un élément essentiel du contrat de travail, consécutives notamment à des difficultés économiques caractérisées soit par l’évo- lution significative d’au moins un indica- teur économique tel qu’une baisse des commandes ou du chiffre d’affaires, des pertes d’exploitation ou une dégradation de la trésorerie ou de l’excédent brut d’ex- ploitation, soit par tout autre élément de nature à justifier de ces difficultés (article L 1233-3 du Code du travail). Bien cerner les « difficultés écono- miques prévisibles » Toutefois, même s’il n’y a pas des difficul- tés économiques avérées au moment du licenciement, il y a peut-être des difficul- tés économiques prévisibles « Constitue un motif économique de licenciement, la réorganisation mise en œuvre pour pré- venir des difficultés économiques à venir liées à des évolutions technologiques et leurs conséquences sur l’emploi, sans être subordonnée à l’existence de difficultés économiques à la date de licenciement ». La réorganisation de l’entreprise afin de sauvegarder sa compétitivité est donc un motif de licenciement économique même si les difficultés ne sont pas encore concré- tisées. Pour établir le bien fondé d’un tel licenciement, il paraît cependant impératif que la menace pesant sur la compétitivi- té de l’entreprise, même si elle n’est pas imminente, ne soit pas simplement hypo- thétique (Cass soc. 11 janvier 2006 (arrêts Pages Jaunes). Après avoir envisagé ce qu’il ne fallait pas faire, nous envisagerons la prochaine fois ce que l’on peut faire… FRANÇOIS TAQUET

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