Saisie par la Commission des finances du Sénat en décembre 2016, la Cour a mené une enquête auprès de l'Agence nationale de l'habitat (Anah) qui gère le programme "Habiter Mieux" depuis sa création en 2010, et passé au crible un peu plus d'un millier de dossiers.
Le bilan de cette prime versée aux ménages, pour la plupart des propriétaires occupants modestes, pour les aider à rénover leur logement - en complément d'autres aides - est "encourageant", a résumé Pascal Duchadeuil, président de la cinquième chambre de la Cour des comptes en présentant le rapport.
"Il n'est pas fréquent que la Cour", souvent très critique quant à la qualité de la gestion des deniers publics, "soit amenée à délivrer ce type d'appréciation, surtout d'ailleurs dans le domaine de la politique du logement", a-t-il souligné.
Si le dispositif a des "faiblesses", celles-ci peuvent "être corrigées", selon la Cour, "pour répondre aux nouveaux défis auxquels "Habiter mieux" est désormais confronté": atteindre l'objectif de 75.000 logements rénovés par an, soit une hausse de 50%, fixé par le gouvernement fin novembre.
Deux des trois objectifs fixés au programme ont été atteints: accompagner les plus défavorisés, avec des bénéficiaires très modestes (83% des dossiers) et faire baisser la consommation d'énergie de logements, avec 43% de gain énergétique en 2016, soit bien mieux que les 30% visés.
Suite à une "période de chauffe prolongée", outre le "gain financier sur la consommation d'énergie", les ménages constatent une "amélioration de l'état général du logement, un assainissement des logements, une diminution de la sensation de froid et une amélioration de la santé des occupants", note la Cour.
Pour le troisième objectif en revanche, rénover le parc privé de logements, "le bilan est en demi-teinte": sur un objectif 2010-2017 de 300.000 logements, "on a dépassé 240.000 fin 2017", a souligné M. Duchadeuil.
La Cour pointe surtout un "manque de stabilité des moyens et de la réglementation" d'"Habiter mieux": le montant de son enveloppe, le Fonds national d'aide à la rénovation thermique (FART), 500 millions d'euros pour 2010-2017, a été révisé à 10 reprises.
"Cette instabilité financière n'a pas permis d'établir un régime d'aide suffisamment pérenne pour attirer tous les bénéficiaires potentiels de ces aides", estime la Cour. De leur côté, les montants alloués ont connu cinq modifications en sept ans, passant de 1.600 à 3.500 euros, pour redescendre à 2.000 euros depuis 2016.
Soulignant la "gestion efficace" d'un dispositif "bien évalué et contrôlé" par l'Anah, la Cour prône une gestion dématérialisée des dossiers et une "simplification" des aides pour financer les travaux par tranches - deux évolutions en cours -, pour passer à la vitesse supérieure.
Pour moitié des actifs et pour moitié des retraités, les bénéficiaires sont des personnes aux revenus très modestes, logées dans de "grandes maisons individuelles anciennes", onéreuses à chauffer, qui "s'imposent des restrictions de dépenses".
La Cour préconise de mieux les accompagner, de "renforcer le lien" entre les niveaux des plafonds d'aide et leur situation de précarité énergétique, de mettre en oeuvre une programmation pluri-annuelle, de stabiliser la réglementation et enfin de "développer le partenariat noué avec les collectivités territoriales".
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