"Dans cette étude, nous avons montré que le DPE est un mauvais prédicteur de la consommation énergétique des logements, au point qu'une estimation purement aléatoire aurait des performances similaires" tranche, dans sa conclusion, l'étude d'Hello Watt, qui a été conduite en décembre 2022 sur 221 logements. En effet, selon Hello Watt, entreprise de conseil en énergie pour les particuliers, seuls 29% des DPE seraient corrects. En notant les logements au hasard, le résultat obtenu aurait été de 25% d'étiquettes DPE correctes ...
Un résultat d'autant plus dérangeant que la loi se base sur les DPE afin d'interdire, depuis le 1er janvier 2023, la signature de nouveaux baux pour la location de logements considérés comme des "passoires énergétiques", logements qui dépassent les 450 kWh/m² par an en énergie finale (une partie des logements classés G). Cette interdiction doit être étendue à tous les logements classés G au 1er janvier 2025 et s'appliquera également aux baux en cours.
Pour réaliser cette étude, Hello Watt a utilisé les logements des utilisateurs de son application et a téléchargé les données des DPE de l'Ademe les concernant. Ensuite, l'entreprise a comparé les données de consommation rapportées par les compteurs communicants gaz et électricité de ses utilisateurs. Les consommations rapportées, exprimées en kWh, ont été transformées afin d'obtenir une quantité d'énergie primaire qui peut être comparée à celle estimée par le DPE.
Les logements avec moins d'un an de données historiques connues en consommation électrique ou en consommation gaz (pour ceux qui ont déclaré se chauffer au gaz), ont été exclu de l'étude. Seuls les logements dont le DPE a été réalisé récemment (après juillet 2021) ont été pris en compte.
Bien sûr, le DPE se base uniquement sur les consommations pour le chauffage, l'eau chaude sanitaire, la climatisation, les éclairages et les auxiliaires (chauffage et ventilation) et ne tient pas compte des autres consommations électriques d'un foyer (ordinateurs, télévisions, électroménager, cuisine...). Hello Watt a pris en compte ces paramètres dans son étude, en se basant sur les chiffres de l'Ademe qui estime que les usages pris en compte par le DPE totalisent environ 66% de la consommation énergétique d'un logement moyen.
Correspondance entre le DPE et la consommation d'énergie | ||
Classe énergétique | Consommation estimée par le DPE | |
Classe A | moins de 70 kWh/m² par an | |
Classe B | de 71 kWh/m² à 110 kWh/m² par an | |
Classe C | de 111 kWh/m² à 180 kWh/m² par an | |
Classe D | de 181 kWh/m² à 250 kWh/m² par an | |
Classe E | de 251 kWh/m² à 330 kWh/m² par an | |
Classe F | de 331 kWh/m² à 420 kWh/m² par an | |
Classe G | plus de 421 kWh/m² par an |
On aurait donc pu s'attendre à obtenir une corrélation claire entre le DPE et la consommation finale des foyers.
Or, les résultats obtenus ont de quoi inquiéter. Car si 40 % des logements sont classés avec une classe d'écart, ils sont 31% à comporter au moins deux, voire trois classes d'écart. A noter également, un nombre similaire de logements sont surévalués (78), par rapports aux logements sous-évalués (79). Parmi les logements sous-évalués, 20 logements ont été notés E, F, ou G alors qu'ils devraient être classés A, B, ou C, tandis que parmi les logements surévalués, 13 logements ont été notés A, B, ou C alors qu'ils devraient être E, F ou G selon leur consommation réelle.
Parmi les exemples concrets cités par Hello Watt, un appartement de Caen (14) de 25 m² doté d'un chauffage électrique a été classé F, alors que Linky mesure 110kWhEP/m² - et devrait donc avoir une étiquette B. Une maison de 120 m² à Gragnague (31), également dotée d'un chauffage électrique, consomme 162 kWhEP/m² selon son compteur Linky et devrait donc être classé D, alors que son DPE lui confère une étiquette A.
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Afin d'expliquer ces discordances, qui avaient déjà été constatées précedement par une étude de l'UFC Que Choisir qui portait sur un plus petit échantillon de 7 logements, Hello Watt se questionne sur la fiabilité de la méthode 3CL, utilisée pour estimer les propriétés des bâtiments. Cette méthode est-elle assez précise ? Possède-t-elle un biais interne qui rend son résultat peu fiable même lorsqu'elle est appliquée correctement ? Mais même si la méthode est fiable, Hello Watt s'interroge sur la possibilité que certains professionnels qui l'appliquent puisse prendre des raccourcis pour réduire sa complexité ou ne pas l'implémenter correctement pour diverses raisons.
"Plusieurs causes peuvent expliquer ce problème de fiabilité", résume Hello Watt son site, "comme le manque d’informations sur le bâti, l’usage du logement qui aurait un impact sur la consommation bien plus élevé que les caractéristiques thermiques du logement, et le manque d’encadrement et de formation des diagnostiqueurs, éléments déjà mis en avant dans les autres études, comme celle d’UFC que choisir."
Pour consulter l'étude dans son intégralité, qui a été publiée en français le 4 janvier, c'est ici.
Dans un communiqué le 5 janvier en fin de journée, la CDI Fnaim a défendu la fiabilité des DPE, indiquant que c'est la méthodologie utilisée par Hello Watt qui était erronée, et non les DPE. La Chambre des diagnostiqueurs immobiliers a en effet souligné que les consommations des uns et des autres étaient grandement variables, en fonction des usages de chacun, et expliquaient à elles seules les disparités constatées entre la consommation réelle et le DPE. Plus d'information sur cet article.
bronze
Merci pour le résumé de cette étude dont la conclusion n'est pas étonnante: les DPE sont toujours aussi fantaisistes. Il suffit d'aller consulter quelques forums pour trouver de magnifiques exemples: des propriétaires qui, après travaux d'isolation, se retrouvent avec un DPE encore plus mauvais qu'avant de faire leurs travaux!!! Sur l'étude d'Hello Watt qui se base sur la consommation réelle en énergie du logement, je me demandais comment ils s'y étaient pris pour pondérer cette consommation réelle en fonction des caractéristiques d'usages du logement (température de consigne de chauffage dans chaque pièce, nombre de pièces réellement chauffées, nombre d'occupants, taux d'occupation du foyer sur 24h, etc....). Pour un même logement, la consommation réelle peu facilement varier de 50% suivant les caractéristiques d'usages du logement, ce qui va biaiser le classement DPE.