L’Alliance pour le logement interpelle le nouveau ministre du Logement

Les présidents des dix organismes partenaires de l'Alliance pour le logement sonnent l'alarme et proposent des solutions

Après avoir sonné l'alarme le 24 janvier, l'Alliance pour le logement interpelle le nouveau ministre du logement le 8 février. Elle réclame une véritable politique du logement et un travail collégial sans dogmatisme.




Photo © Les présidents des dix organismes partenaires de l'Alliance pour le logement réunis pour sonner l'alarme le 24 janvier.

 

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"Monsieur le ministre du Logement, il faut un plan d'action immédiat !" peut-on lire dans un communiqué envoyé par les professionnels du logement et de l'immobilier réunis sous la bannière "Alliance pour le Logement" : la FFB, l’USH, la FNAIM, la FPI, Pôle Habitat FFB, PROCIVIS, l’UNIS, l’UNNE, l’UNSFA et l’UNTEC. Après avoir félicité Guillaume Kasbarian pour sa nomination en tant que ministre délégué en charge du Logement, ils lui demandent officiellement "des décisions fortes et immédiates" pour venir à bout de la crise actuelle.

 

Pour rappel, la filière dans son ensemble, très inquiète, s'est réunie le 24 janvier pour demander expressément une stratégie pour les trois ans à venir, au moins, qui apporterait la visibilité indispensable pour investir et prendre des décisions. Elle veut faire entendre ses propositions pour remonter la pente.

 

L’enquête Viavoice du 5 au 8 janvier 2024

 

Les résultats d’une enquête confortent le sentiment général que la situation du logement est désastreuse.

 

Parmi les 32 % de Français ayant au moins un projet d’achat ou de location, 44 % rencontrent des difficultés (notamment des taux élevés et un manque de logements adaptés à leur situation financière). Plus généralement, 83 % sont inquiets de la crise du logement et 76 % estiment que le Gouvernement n’en a pas pris la mesure.

 

Le soutien à l’accession à la propriété pour les ménages modestes, l’allègement de la fiscalité immobilière, l’augmentation des aides pour la rénovation énergétique et le soutien à la construction de logements sociaux et à loyers maîtrisés apparaissent pour les Français comme les mesures à prendre en priorité.

 

La conjoncture en chiffres

 

Ce que les Français ressentent, les professionnels du logement l’étayent avec des données et des projections :

 

En 2023, avec environ 280.000 mises en chantier, la France a atteint un niveau proche de ses plus bas historiques, relevés au début des années 1990.

 

Quant aux transactions dans l’ancien, elles passent sous le seuil des 900.000 logements et vont continuer à baisser en 2024.

 

Seule l’amélioration-entretien logement ressort en hausse, et accélère même à + 2,4 % à prix constants, portée par la rénovation énergétique (mais il est déjà acquis qu’elle ralentira, avec seulement +1,1 % en volume en 2024).

 

Janvier 2024 confirme que le contexte restera peu favorable cette année pour la filière, malgré une stabilisation, voire une très modeste baisse des taux d’intérêt à venir.

 

La dégradation de l’environnement institutionnel va renforcer ce mouvement de fond, avec les amputations opérées sur le Prêt à Taux Zéro, le maintien de la baisse des Aides Personnalisées au Logement, la fin programmée du “dispositif Pinel” en 2025, mais aussi la réforme déstabilisante de MaPrimeRénov’.

 

Si aucune mesure d’urgence n’est prise, selon les estimations FFB, l’activité en logement neuf plongera de 21,3% en 2024, pénalisée par des ouvertures de chantier toujours moins nombreuses (conséquence directe de la chute des ventes de logements neufs de l’ordre de 30 %, elles tomberaient à un plancher historique de 241.000 unités). Quant aux permis de construire, ils reculeraient encore de 12,1 %.

 

L’amélioration-entretien du logement ralentirait, à +1,1 %, eu égard à la réforme de MaPrimeRénov’ (et sous l’hypothèse d’un décrochage contenu), mais aussi à la chute des transactions de logements anciens constatée en 2023 (875.000 transactions, soit - 22 % ; la plus forte contraction observée depuis 50 ans), qui pourrait baisser encore d’environ 10% en 2024.

 

Les conséquences pour la filière

 

Dans le bâtiment, l’emploi salarié et intérimaire (en ETP) décrocherait de 6,5 % en 2024, soit 90.000 emplois directs détruits en moyenne sur l’année.

 

La destruction d’emplois devrait être de même ampleur pour l’ensemble des entreprises de l’écosystème : architectes, notaires, bureaux d’études, promoteurs, constructeurs, aménageurs, etc.

 

"Les politiques passées et actuelles auront des conséquences négatives au moins jusqu’en 2027", souligne Olivier Salleron, président de la FFB (© Alliance pour le logement)

 

Les propositions de l’Alliance

 

La diversité des approches au sein de l’Alliance permet de balayer tous les champs liés au logement, de pointer les points d’achoppement et les possibilités d’y remédier. L’Alliance affiche une belle unité et insiste sur la nécessité d’un travail sur le long terme du Gouvernement, impliquant tous les acteurs, dans un dialogue constructif, suivi d’actes et de mesures précises. Elle met comme préalable le besoin d’évaluer les besoins en logements, tant sur le plan qualitatif que quantitatif, considérant que c’est un impératif majeur compte tenu des enjeux en matière de stratégie nationale bas carbone, d’aménagement des territoires et de lien emploi-logement.

 

Les leviers identifiés

 

Les partenaires de l’Alliance souhaitent ardemment que les Pouvoirs publics (pour ne pas nommer le Président Macron et son Premier Ministre) prennent la mesure de la crise, fassent du logement une vraie priorité et agissent en concertation avec les acteurs du secteur (qui sont “100 % d’accord sur 80 % des sujets” comme ils le soulignent). Parmi les propositions de ces derniers, depuis longtemps sur la table, les principales sont :

 

  • Rétablir le prêt à taux zéro qui depuis sa création, il y a près de 30 ans, a permis à plus de 3,6 millions de familles d’accéder à la propriété ; ou a minima créer un prêt à taux bonifié.
  • Dynamiser temporairement l’acquisition des logements dans le neuf par une exonération partielle des droits de mutation.
  • Limiter les refus de crédit en assouplissant véritablement ou en suspendant temporairement les règles du Haut Conseil de Stabilité Financière.
  • Faciliter la transmission entre membres d’une même famille pour construire ou acquérir une résidence principale.
  • Mettre en place un statut du bailleur privé, véritable dispositif pérenne d’amortissement qui permettrait de faciliter l’investissement des propriétaires dans le neuf comme dans l’ancien.
  • Prendre de réelles mesures afin de massifier la rénovation énergétique pour tous les ménages : simplifier et stabiliser les modalités et les conditions de financement.
  • Revenir sur la baisse des APL, qui fait peser tous les ans un prélèvement de 1,3 milliard d’euros sur les bailleurs sociaux, et restaurer les capacités d’investissement de ces derniers en revenant à un taux de TVA réduit de 5,5 %.

"Nous ne pourrons pas nous satisfaire d’un vague projet de décentralisation qui conduirait à masquer l’absence de politique en matière de logement", préviennent les dirigeants des dix organisations.

 

Les présidents réunis

Dix organisations professionnelles sont partenaires dans l’Alliance pour le logement, force collective de propositions pour une véritable politique nationale du logement.

 

L’accès au logement, de plus en plus difficile

 

Le nombre d’annonces locatives a diminué de presque 60 % en 5 ans et la capacité d’emprunt des acheteurs a chuté de 25% depuis janvier 2022.

 

L’investissement des ménages, composé à plus de 80 % de dépenses en logement (construction neuve ou travaux lourds), a reculé de 4,9 % en 2023. Ainsi, la capacité d’achat d’un acquéreur qui a une mensualité de 1000 euros sur 20 ans a diminué de 54.000 euros entre début 2022 et fin 2023, passant de 216.000 euros à 162.000 euros.

 

La production du logement neuf s’est retournée en 2023, pour s’afficher en recul de 7,8 % hors effet prix. La forte baisse des ventes en 2023 laisse anticiper un recul de la production de logements neufs encore plus fort (environ 280.000 logements commencés en rythme annuel à fin novembre 2023 et 372.400 autorisations de construire en 2023) et pour le logement locatif social, la barre des 90.000 agréments ne sera sans doute pas atteinte alors que près de 2,6 millions de demandes étaient enregistrées au 31 décembre 2023.


Source : batirama.com/ Emmanuelle Jeanson

L'auteur de cet article

photo auteur Emmanuelle JEANSON
Collaboratrice de longue date de Batirama, elle est journaliste indépendante dans la presse pro du bâtiment et de l’énergie depuis ses débuts dans le métier (qui remontent à la dernière décennie du siècle dernier !). Ses sujets de prédilection : tout ce qui contribue à une construction plus soutenable ; les techniques anciennes remises au goût du jour ; les énergies renouvelables ; aller à la rencontre des artisans et de leur quotidien, mais aussi comprendre les enjeux de l’activité industrielle.
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