L'usine Meyer Burger, estampillée "Made in Germany, designed in Switzerland", et se trouvant à Freiberg, près de Dresde, en Allemagne, a stoppé provisoirement son activité. Un arrêt qui pourrait être définitif. Meyer Burger, c'est pourtant l'une des plus importantes usines de panneaux solaires d'Europe. Mais, voilà, la concurrence chinoise (depuis cinq ans, les importations de panneaux solaires chinois ont quasiment été multipliées par quatre en Europe) est trop rude. Conséquence directe : le groupe vient d’annoncer des pertes de 300 millions d’euros sur l'année 2023.
Si aucune aide publique n'est annoncée d'ici la fin de semaine, l'usine Meyer Burger de Freiberg fermera définitivement ses portes.
L'entreprise Meyer Burger avait déjà évoqué cette probabilité de fermeture de son usine de modules de panneaux solaires en Allemagne, en mettant en cause le manque de soutien public face à la concurrence internationale, et notamment chinoise, à très bas prix. Le communiqué du groupe précisait que Meyer Burger envisageait "la fermeture de son usine allemande de modules [...] dès le mois d'avril 2024", une fermeture qui menaçait plus de 500 emplois. L'entreprise se donnait alors jusqu'à la seconde moitié de février pour prendre une décision définitive, un véritable coup dur et crève-cœur pour l'Allemagne, ainsi que ce site, ouvert en grande pompe il y a moins de trois ans, avec des machines fonctionnant 24 heures sur 24 et sept jours sur sept.
Les produits chinois sont vendus trois à quatre fois moins cher que ceux des fabricants allemands, "une concurrence déloyale", selon Ronald Müller, le directeur de la production, cité par France Info. Et il ajoute : "C'est injuste parce qu'on doit supporter tous les coûts de production d'un module solaire alors qu'ils sont subventionnés par l'État dans d'autres pays. Ici, nous devons respecter les normes et les législations européennes. Nos machines ont trois ans. C'est la technologie la plus récente. C'est vraiment un gaspillage d'argent."
Les machines de Meyer Burger fonctionnaient 24 heures sur 24 et sept jours sur sept, fabriquant quotidiennement 5 000 panneaux solaires. © Meyer Burger
Pour Meyer Burger, "la détérioration continue de l'environnement de marché en Europe" fait qu'il n'est plus viable "de continuer à produire du solaire à grande échelle" sur le continent, comme annoncé dans leur communiqué de début d'année. Le groupe avait déclaré vouloir se concentrer sur sa production aux États-Unis, de "loin le marché le plus attractif", selon son directeut général Gunter Erfurt. Il faut dire que, depuis que l'accès au marché américain leur est inaccessible, les panneaux solaires chinois envahissent l'Europe, faisant s'effondrer les prix. Les industriels européens pâtissent aussi des coûts de production et de la concurrence des États-Unis, où la production photovoltaïque locale est abondamment subventionnée suite au vote de l'RA (Inflation Reduction Act) en août 2022, un plan voté par le Sénat et doté, entre autres, de 400 milliards de dollars de dépenses en faveur de l’énergie et du climat.
Selon France Info, Wolfram Günther, le ministre de l'Énergie de la région de Saxe, espère encore une aide du gouvernement afin de sauver l'entreprise : "Partout en Europe, on assiste à une explosion des installations de panneaux solaires. Alors détruire notre propre industrie nationale pour devenir presque à 100 % dépendants de la Chine, ce n'est pas responsable. On a déjà vécu ça avec la Russie et le gaz et on voit où ça nous a menés. Ce n'est pas seulement l'industrie solaire en Allemagne qui est en danger, mais l'industrie solaire en Europe. Il faut absolument agir vite."
L'industrie solaire en Europe est en danger, il faut agir vite ! © Meyer Burger
Si Meyer Burger décide finalement de fermer son usine de Freiberg, l'entreprise conservera son autre site allemand, basé non loin de là, à Bitterfeld-Wolfen, le seul en Europe à produire des cellules de modules photovoltaïques.
Simone Peter, la présidente de l'organisation des industriels allemands des énergies renouvelables, s'était exprimée sur le sujet en début d'année, confiant à l'AFP :"Le gouvernement [allemand] et l'Union Européenne doivent agir pour éviter cette fermeture".
La filière solaire allemande avait déjà souffert lorsque le gouvernement allemand avait pris la décision de raboter un programme de soutien financier au secteur solaire, suite à une décision de justice ayant annulé 60 milliards d'euros de dépenses publiques, pour des raisons de rigueur budgétaire. À ce moment-là, le ministre de l'Économie Robert Habeck avait déclaré qu'il s'agissait d'une "décision douloureuse, mais nous travaillons sur des solutions".