Photovoltaïque : le coût des panneaux en sortie d’usine a baissé de 52 % en 2023

Dans l'usine 3Sun d'Enel Green Power à Catane

Le photovoltaïque continue son expansion, les panneaux augmentent leur puissance, leur rendement et leur durabilité, tandis que leurs prix baissent encore. Heliup produira des panneaux PV en Isère à l’automne.




Selon l’éditorial de l’hebdomadaire anglais The Economist du 22 juin, intitulé "The Solar Edge", en gros la capacité photovoltaïque installée dans le monde double tous les trois ans et est donc multipliée par 10 en 10 ans. Si l’expansion du PV se maintient à ce rythme à travers le monde au cours des dix prochaines années, la nouvelle puissance PV totale installée d’ici 2034 sera équivalente à huit fois le total de la capacité de production d’électricité nucléaire installée aujourd’hui dans le monde entier, tout ça en moins de temps qu’il n’en faut pour bâtir une seule centrale nucléaire.

Rappelons, cruellement, que l’ASN (Autorité de Sécurité Nucléaire) a autorisé la mise en service de l’EPR de Flamanville, le 7 mai 2024, dernier après 17 ans de chantier et un coût total désormais évalué à 19,1 Md €.

 

 

 

 

Les prix du PV baissent toujours

Par contraste, le rapport "International Technology Roadmap for Photovoltaïcs" (ITRVP) publié en mars 2024 par le VDMA, estime que 502 GWc de panneaux ont été expédiés en 2023, dont 412 GWc installés fin 2023 et 90 GWc non-encore installés. Le prix spot moyen des modules PV en 2023 est, toujours selon l’ITRVP, de 0,118 $ HT (0,11 € HT/Wc) fin 2023, contre 0,228 € HT/Wc (0,21 € HT/Wc) fin 2022. Attention, il s’agit du prix en sortie d’usine et non du prix auquel un installateur peut acheter des panneaux PV chez un grossiste. À titre de comparaison, ManoMano propose sur son site un panneau solaire en silicium monocristallin de 110 Wc à 119 € TTC, soit 0,90 € HT/Wc. Chez l’espagnol FV Componentes, on trouve une palette de 36 panneaux de 425 Wc Jinko Solar JINKO Tiger Neo 425W Half-Cut black frame (JKM425N-54HL4-V) à 4 397,75 € TTC. L’Espagne applique un taux de TVA de 10 % sur les panneaux PV, ce qui nous donne donc 0,258 € HT/Wc. En France, Wc. Planet SOAR propose la même palette de 36 panneaux Jinko Solar à 4 977,54 € HT, soit 0,325 € HT.

L’ITRPV estime que la capacité de production mondiale de modules PV atteint 1 000 GWc fin 2023.

 

En Italie, la gigafactory 3Sun d’ENEL Green Power, installée à Catane, augmente sa capacité jusqu’à 3 GWc/an, contre 200 MWc pour l’instant. © 3Sun

 

 

 

 

PERC, n-type, TOPCon, tandem pérovskite/silicium

En ce qui concerne la technologie des modules PV, l’ITRVP estime que le silicium monocristallin a conquis la totalité du marché mondial, le polysilicium a disparu des modules mis en vente en 2023. Le marché se répartit en 70 % de modules PERC (Passivated Emitter and Rear Cell) et 30 % de modules n-Type. Une cellule PERC, apparue sur le marché en 1989, ajoute une couche de passivation diélectrique à l’arrière de la cellule. Cette couche supplémentaire contraint la lumière qui n’a pas été absorbée au premier passage à travers la couche de silicium à repasser à travers le silicium, augmentant le rendement. Une cellule PERC réduit aussi la transformation de la lumière en chaleur, ce qui contribue également à améliorer le rendement de conversion de la lumière en électricité. Les panneaux atteignent un rendement de 20 % en moyenne. Une cellule n-type, de son côté, remplace le Bore par du phosphore pour doper le silicium. Trina Solarn, par exemple, avait annoncé en septembre 2022 que ses cellules n-type atteignaient un rendement de 25,5 % et que ses panneaux Vertex S+, destinés aux toitures résidentielles, offraient un rendement de 22 %.

 

 

 

 

Jusqu’à 40 ans de garantie sur le rendement

TOPCon (Tunnel Oxyde Passivated Contact), une troisième technologie, qui est désormais associé aux cellules n-type, a été développée par l’institut de recherche allemand Fraunhofer Institute for Solar Energy de Fribourg en 2013. La technologie TOPCon ajoute une très très fine (quelques microns) d’oxyde de silicium à la surface de la cellule. Ce qui évite les pertes d’électricité par les connecteurs métalliques. Le rendement n’est pas dramatiquement amélioré par la technologie TOPCon, le panneau Trina Solar Vertex S+ de 435 Wc qui combine n-type et TOPCon culmine à 22 % de rendement. Mais la longévité dans le temps est accrue. Ce panneau Trina Solar affiche une perte de 1 % de rendement au bout de la première année et de 0,4 % par an ensuite. Du coup, le rendement est garanti 30 ans par Trina Solar. Le panneau Trina Solar Vertex S+ de 435 Wc est vendu 132,90 € TTC à l’unité par UPWATT, soit 0,254 € HT/Wc.

Côté garantie, Sunpower fait mieux avec son panneau Maxeon 3 monocristallin 425 Wc cadre noir et offre 40 ans de garantie sur le rendement : 22,4 % au départ, 2 % de perte de puissance la première année, puis 0,25% de perte par an.

L’ITRPV estime que le rendement des modules PV, toujours inférieur à celui d’une cellule, devrait couramment atteindre 24 % en 2028, puis 25 % en 2034. Une nouvelle technologie, dite à cellules tandem pérovskite/silicium à hétérojonction, pourrait apparaitre dans des modules commercialisés en 2028 avec un rendement de module compris entre 27 et 28 %, puis une croissance du rendement qui atteindrait 30 % vers 2034. Ces cellules tandem sont constituées en superposant une cellule à base de matériau pérovskite sur une cellule silicium. Ces records de 30 % de rendement n’ont pour l’instant été obtenus qu’en laboratoire sur des cellules de 1 cm² de surface.

 

Combinant leurs ressources, les chercheurs du CEA-INES et de Enel ont obtenu en décembre dernier, un rendement de 28,4 % avec une cellule tandem de 9 cm². © CEA/Cherpin

 

 

Comme l’indique 3Sun, "les cellules traditionnelles au silicium ont une limite théorique d'efficacité de 28-29 %, avec un maximum réellement et difficilement réalisable de 26-27 %". La technologie tandem pérovskite/silicium permettra d’atteindre et de dépasser 30 % de rendement. Son industrialisation commence à peine. © 3Sun

 

 

 

 

En France, quatre bonnes nouvelles

Première bonne nouvelle, plus de 1 GWc de puissance photovoltaïque a été installée en France au 1er trimestre 2024, selon le SDES (Service des données et études statistiques) du ministère de la Transition écologique, qui indique qu’il s’agit certainement d’une sous-estimation. Les chiffres définitifs seront connus à la fin du second trimestre 2024. Ce qui est encore mieux que le dernier trimestre 2023 qui avait vu l’installation en France de 984 MWc, à comparer avec une estimation indiquée fin 2023 de 955 MWc. 59 366 installations nouvelles ont été raccordées au 1er trimestre 2024 et plus de 100 000 projets sont en cours d’instruction fin mars 2024. Le Sdes précise que cet élan est largement propulsé par l’autoconsommation : "En début d'année 2024, 54,4 % des installations photovoltaïques (ou 11,8 % de la puissance installée) produisent de l'électricité qui est entièrement ou partiellement autoconsommée. La part de ces installations est en hausse de 6,2 points par rapport au trimestre précédent". Fin mars 2024, le parc photovoltaïque français compte donc 949 809 installations pour une puissance totale raccordée de 21 GWc.

 

Deuxième bonne nouvelle, après avoir lancé sa ligne pilote début 2024, le français Heliup, spin-off du CEA-LITEN, achève la construction de son usine de panneaux photovoltaïques légers Stykon®, au cœur de SLS Actiparc Sillon Alpin, Le Cheylas en Isère. Cette ligne de 100 MWc, associée à la création de 100 emplois, produira 500 000 m²/an de panneaux solaires Stykon® légers et efficaces, et sera opérationnelle en Septembre 2024. © Heliup

 

 

 

 

Heliup prépare le développement d’une gigafactory dans les prochaines années. Heliup est soutenu par des investisseurs dont Starquest, EIT InnoEnergy, BNP Paribas Développement, GROUPE IDEC, auprès desquels l’entreprise a levé 10 M€ à l’automne 2023, ainsi que par des partenaires, dont SOPRASOLAR SAS, CEA, Banque Populaire Auvergne Rhône Alpes, BNP Paribas, Crédit Agricole des Savoie, Bpifrance, ADEME, AURA entreprises et AXA.

 

SOPRASOLAR SAS a obtenu une certification Atex de cas a (n°3308_V1 and 3309_V1) pour intégrer le panneau STYKON® dans un complexe d’étanchéité et d’isolation thermique pour grandes toitures. © Soprema

 

 

 

 

 

 

Heliup exploite une technologie développée pendant trois ans au sein de l’INES (Institut National de l’Énergie Solaire). Cette technologie unique repose sur l’emploi d’un verre ultramince (< 1mm) et sur une pose par collage direct du panneau sur membrane d’étanchéité. Après une phase de qualification via de nombreux tests mécaniques et de vieillissements accélérés en interne au CEA-INES le concept a été validé en mai 2023 par une certification IEC651215/61730 indépendante.

 

Le panneau Stykon utilie la technologie PERC, affiche un poids de 4,9 kg/m², une puissance de 215 Wc, des dimensions de 1624 x 739 x 3 mm et une durabilité de 25 ans. © Heliup

 

 

 

Heliup développe un second panneau, baptisé Lighton pour les toitures inclinées. D’un poids de 6 kg/m², Lighton devrait apparaître en 2025 sur le marché.

Troisième bonne nouvelle, le rendement des panneaux PV est plus durable qu’on l’imaginait. Il y a 31 ans en 1992, l’association Hespul mettait en service la première installation PV raccordée au réseau en France. Hespul a démonté ces panneaux PV, les a testés en laboratoire et publié les résultats le 5 juin.

 

Les modules produisent en moyenne 79,5 % de leur puissance initiale, après 31 ans de fonctionnement. Cette même opération avait été réalisée aux 20 ans de l’installation ; les panneaux produisaient alors 91,7 % de leur puissance initiale. Ce résultat dépasse les engagements de performance des fabricants qui garantissent habituellement un maintien de la puissance du panneau de 80 % après 25 ans. © ISOWATT

 

 

 

Enfin, quatrième bonne nouvelle, le PEAC ("Plan d’épargne Avenir Climat"), créé par la loi Industrie Verte et organisé par l’Arrêté du 15 juin 2024 (NOR : ECOT2334676A ) relatif à la mise en œuvre du plan d’épargne avenir climat, sera accessible à compter du 1er juillet 2024. Le PEAC est réservé au moins de 21 ans et ressemble à un plan épargne actions (PEA) ou à un plan épargne retraite (PER) en donnant la possibilité aux souscripteurs d’investir leur épargne sur des supports variés (actions, obligations, etc.). Contrairement aux livrets d’épargne réglementés, le capital du PEAC n’est pas garanti, il est soumis aux fluctuations des marchés financiers. Le PEAC est automatiquement clôturé lorsque le titulaire atteint l’âge de 30 ans. Les fonds collectés par le PEAC sont destinés à financer la transition écologique. À compter du 1er juillet 2024 auprès :

– d’une banque ou de tout autre établissement de crédit ;

– D’une compagnie d’assurances ;

– D'une entreprise d'investissement ;

– D'une mutuelle ou d'une union de mutuelles ;

– D'une institution de prévoyance ou d'une union d’institutions de prévoyance.

 



Source : batirama.com / Pascal Poggi

L'auteur de cet article

photo auteur Pascal Poggi
Pascal Poggi, né en octobre 1956, est un ancien élève de l’ESSEC. Il a commencé sa carrière en vendant du gaz et de l’électricité dans un centre Edf-Gdf dans le sud de l’Île-de-France, a travaillé au marketing de Gaz de France, et a géré quelques années une entreprise de communication technique. Depuis trente ans, il écrit des articles dans la presse technique bâtiment. Il traite de tout le bâtiment, en construction neuve comme en rénovation, depuis les fondations jusqu’à la couverture, avec une prédilection pour les technologies de chauffage, de ventilation, de climatisation, les façades et les ouvrants, les protocoles de communication utilisés dans le bâtiment pour le pilotage des équipements – les nouveaux Matter et Thread, par exemple – et pour la production d’électricité photovoltaïque sur site.
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