Cette loi instaure un principe de "responsabilité solidaire" qui permet de poursuivre un donneur d'ordres pour des fraudes relevant d'un de ses sous-traitants ayant recours à des travailleurs détachés.
Saisi d'un recours de la Fédération des promoteurs immobiliers (FPI), qui contestait deux dispositions introduites dans le code du travail par cette loi, le Conseil d'Etat s'est prononcé le 23 octobre.
Il a transmis au Conseil constitutionnel l'une des deux questions prioritaires de constitutionnalité (QPC) posées par la FPI, celle portant sur l'article L.4231-1 du code du travail, et rejeté l'autre.
L'article transmis oblige le donneur d'ordre à "prendre à sa charge l'hébergement collectif des salariés" d'une entreprise sous-traitante, lorsque ceux-ci sont logés dans des conditions "incompatibles avec la dignité humaine" - quand il a été informé de la situation, et que son sous-traitant n'y a pas mis fin.
Les "Sages" devront dire, dans les trois mois, si cette disposition est compatible avec la Constitution. Un décret publié le 30 mars 2015 a précisé les obligations auxquelles les entreprises détachant des travailleurs en France et leurs donneurs d'ordre sont soumis.
Ces derniers peuvent être tenus, "solidairement" avec l'entreprise ayant détaché des salariés, "au paiement des rémunérations et indemnités dues à chaque salarié et des cotisations et contributions sociales y afférentes".
Ils peuvent aussi être punis d'une amende de 1.500 euros, 3.000 euros en cas de récidive, si leur sous-traitant enfreint la législation française du travail : libertés individuelles, discriminations, droit de grève, durée du travail, salaire minimum, etc.
Pour la FPI, la loi Savary "n'est ni équilibrée ni applicable car elle prévoit des responsabilités et des sanctions disproportionnées contre le maître d'ouvrage alors qu'il n'a pas les moyens d'effectuer quotidiennement les contrôles".
Le détachement des travailleurs est encadré par une directive européenne de 1996 : les cotisations sociales sont dues dans le pays d'origine, mais l'employeur doit respecter les règles de rémunération et de travail du pays d'accueil. Mais la directive a donné lieu à de nombreuses dérives qui ont obligé l'Etat français à dresser un plan de lutte contre la fraude.