« Le Medef est en mouvement » explique Pierre Gattaz, président du Medef. « Son rôle est de faire un constat et de proposer des solutions pragmatiques pour résoudre les problèmes observés ». Or, l’organisation patronale a bien l’intention de faire évoluer les politiques du Logement.
Son constat : en dépit d’interventions publiques de plus en plus fortes, les résultats ne sont pas au rendez-vous. Pourtant, favoriser l’accès au logement des salariés favorisera l’accès à l’emploi, expliquent les ténors du Medef.
Jacques Chanut*, président de la Fédération française du bâtiment (FFB), François Payelle, président de la Fédération des professionnels de l’immobilier (FPI) et Jean-François Buet, président de la Fédération nationale de l’immobilier (FNAIM), ont donc développé lors d'une réunion les propositions destinées à relance la croissance et l’emploi.
La première mesure concerne la libération du foncier constructible. « Du foncier, il y en a partout » s’étonne François Payelle qui ajoute : « il faut seulement le mobiliser ». Le responsable propose ainsi de définir un processus de cession claire et de recenser tous les terrains publics dans une base de données accessible à tous les opérateurs, privés y compris.
« Si l’on astreint les établissements fonciers publics à un délai maximal de détention et si l’on autorise les préfets de région à imposer la vente de terrains, la cession de terrains publics pourrait s’accélérer », explique le responsable.
Autre mesure proposée pour libérer du foncier privé : créer « un choc d’offres » via un régime transitoire exceptionnel pendant 3 ans, avec des abattements significatifs et dégressifs. Enfin, la généralisation des PLU intercommunaux et le soutien aux communes qui bâtissent (via la dotation globale de fonctionnement) pourrait encourager la disponibilité du foncier, estime l’organisation patronale.
Si l’évolution des normes de construction est jugée positive par le Medef (puisqu’elle a pour objectif d’améliorer la performance énergétique des logements), elle est aujourd’hui jugée trop abondante, astreignante et surtout coûteuse.
Cela reste à prouver mais il est certain que les professionnels et surtout les constructeurs n’ont pas eu le temps de s’approprier chaque nouvelle norme et règle technique publiée.
Le Medef demande donc un moratoire de trois ans et souhaite une revue des règles et normes obligatoires inutiles, excessives ou rendues prématurées par la stagnation du pouvoir d’achat des ménages.
De nombreux dispositifs d’aides à l’investissement locatif ont vu le jour, au fur et à mesure que les gouvernements changeaient. Or, seul un environnement juridique et fiscal adapté et pérenne peut relancer la confiance des investisseurs, estime le Medef
Enfin, il est nécessaire pour l’organisation patronale de relancer l’accession à la propriété en solvabilisant les primo-accédants modestes par un allongement des différés de remboursements du PTZ+ et par la sécurisation de l’accession sociale. Le Medef propose, en zone tendue, la mise en place d’un prêt de long terme en faveur de l’accession intermédiaire.
De récents dispositifs financiers incitatifs ont été mis en place afin de rénover le parc existant jugé vieillissant. « 70 % du parc existant est ancien (nldr : il a été construit avant 1982) et nécessite une réhabilitation » indique Jean-François Buet.
Or, si les outils ont été mis en place depuis peu (TVA à 5,5 % sur les travaux énergétiques, crédit d’impôt pour la transition énergétique), les ménages ne les connaissent pas encore. Le Medef prône une offre globale, plus simple et surtout plus compréhensible. Il demande aussi de veiller à leur pérennité dans le temps, afin d’éviter de perdre du temps (attente des ménages), entre chaque nouvelle mesure fiscale.
Il souhaite également des dispositifs avec des durées de validités plus longues, notamment pour les copropriétés (Eco-PTZ collectif) afin de tenir compte des processus de décision plus longs.
Certaines dispositions de la Loi Alur sont perçues de façon confuse et négative, estime le Medef. Et le pouvoir donné aux locataires peut être source d’insécurité pour les bailleurs, reprend l’organisation qui réclame l’abrogation des dispositions « des plus contreproductives », notamment l’encadrement des loyers.
L’organisation patronale souhaite également simplifier et raccourcir les procédures à l’encontre des locataires défaillants de mauvaise foi. Autre souhait : assouplir les conditions permettant aux propriétaire de retrouver l’usage de son bien en fin de bail.
Il appelle à la création d’un statut du bailleur privé doté d’un régime fiscal adapté et pérenne dans le temps et propose de favoriser la production d’une offre de logements intermédiaires en évitant d’imposer systématiquement 25 % de logement sociaux dans chaque programme.
Le Livre Blanc propose une longue série de mesures destinées à optimiser la production de logements sociaux dans un contexte budgétaire contraint. Son souhait : remettre à plat les modalités de fonctionnement du système en tenant compte des spécificités des territoires dont les besoins devront être identifiés.
Ainsi, les organismes HLM pourraient être amenés à construire partout où les besoins sont identifiés (en supprimant la limite de compétence territoriale). De même, ces organismes pourraient être regroupés afin d’optimiser leur mutualisation financière.
Quant à leur financement, avec les prêts de la Caisse des dépôts et consignation, il pourrait dépendre du niveau de tension foncière dans les territoires, selon le Medef. Autre mesure proposée : permettre aux organismes de vendre des logements afin de se constituer des fonds propres pour les réinvestir dans la production de logements supplémentaires.
Et pour faciliter la mobilité des locataires du parc, le Medef préconise de revoir les loyers plafonds dans les secteurs les plus tendus (Paris et première couronne principalement) et « expérimenter » la suppression du droit illimité au maintien dans les lieux, sous condition de ressources (pour les nouveaux entrants).
Il milite en outre pour la préservation de la mixité sociale et propose d’accorder une priorité de relogement aux ménages issus du parc social en mobilité professionnelle.
Là encore, le Medef réclame une vision à long terme concernant la stratégie d’Action Logement, afin d’assurer sa pérennité. Encore faudrait-que l’Etat respecte ses engagements et réduise ses prélèvements au profit du financement de politiques publiques, estime l’organisation patronale.
Action Logement pourrait ainsi s’engager dans la construction de logements sociaux et de logements intermédiaire, en particulier pour les jeunes salariés
Le Medef souhaite redéployer l’octroi de prêts aux salariés en vue de l’accession à la propriété (l’une des missions historiques d’Action Logement) et relancer les prêts travaux dans les logements existants afin de répondre aux problématiques d’efficacité énergétique, adaptation au handicap et au vieillissement. Une transformation du dispositif s’impose à l’horizon 2017 face à la dégradation du modèle financier, conclut le Medef.
Pour finir, le livre Blanc insiste sur trois défis majeurs à relever : la mixité sociale, l’aménagement du territoire (pour éviter la désertification rurale) et le vieillissement de la population. Soulignons que ce livre Blanc alimentera le livre Bleu d’ « une France qui gagne » : il regroupera l’ensemble des propositions du Medef et sera publié avant l’été.
* président de la commission Logement et mobilité professionnelle du Medef