La Directive Européenne sur l'Efficacité Energétique des Bâtiments (neufs) prévoit que les bâtiments publics neufs – c'est-à-dire propriétés d'une collectivité territoriale ou d'un organisme public – devront être Bepos ou Bâtiments à Energie Positive dès le 1er janvier 2019, suivis le 1er janvier 2020 de tous les bâtiments neufs. Il demeure pour l'instant un grand flou européen quand à savoir ce qu'est précisément un bâtiment Bepos.
On se rend bien compte, par exemple, qu'en l'état actuel des technologies, une tour de bureaux ne peut être à énergie positive. Même si elle consomme peu, et c'est très relatif, on ne sait pas pour l'instant produire suffisamment d'électricité photovoltaïque ou éolien sur site pour la rendre Bepos.
Il faut donc mettre au point une méthode qui sache prendre en compte tous les cas particuliers et ils seront nombreux. En France, Effinergie a eu l'idée de « l'écart autorisé » qui figure dans la définition du label Bepos Effinergie.
Cela consiste en gros, selon le type de bâtiment, à ne pas compter une partie de la consommation de manière à ce que le solde puisse être compensé et le bâtiment atteindre ainsi l'état ineffable du Bepos. Cet écart autorisé est par exemple nul dans le cas d'une maison individuelle, mais important dans le cas d'une tour de bureaux.
A l'inverse, Effinergie s'écarte de la règle des 5 usages consacrée par les RT françaises successives et tente de comptabiliser toutes les consommations d'énergie. On sent que les membres du Cstb qui ont imaginé l'approche Bepos Effinergie ont été éduqués chez les jésuites : rigueur, mais pragmatisme et souplesse quand même.
Toutes ? Toutes ! L'idée de l'écart autorisé semble hérétique dans ce cadre. Le Passivhaus compte tout. D'où sa prescription d'électroménager classe A++ en logement et sa promotion d'équipements informatique certifiés “Energy Star” en tertiaire. Pour l'instant, ce n'est qu'un vœux pieu.
Il n'existe pas encore de tour de bureaux Bepos au sens du Passivhaus Institut, ni même de tour nZEB ou “Near-Zero Energy Building” (bâtiment à énergie quasi nulle) selon le vocabulaire de la Directive sur l'Efficacité Energétique dans Bâtiments et pas davantage de tour Bepos au sens d'Effinergie.
Elithis se lance toutefois dans la construction à Strasbourg d'une tour de logements dont il promet qu'elle sera Bepos et livrée début 2016. Le Passivhaus Institut, pour sa part, pilote le programme européen PassReg (Passivhaus + énergie renouvelable, passreg.eu) pour justement parvenir à une définition et à de vraies réalisations de bâtiments nZEB.
PassReg est destiné à mettre en avant des réalisations passives accompagnées d'ENR (énergies renouvelables) à travers toute l'Europe et à inciter les collectivités territoriales à embrasser ce standard.
Deux opérations sont suivies pour la France au titre de ce programme : un immeuble de bureaux de 7 niveaux à Bordeaux Euratlantique, près de la gare, conçu par le cabinet d'architecture Nicolas Laisné Associés et réalisé par le groupe de promotion immobilière Pichet, une maison individuelle passive conçue par le BE Carbone 64 de Saint-Jean de Luz et construite à Arcangues (64).
Le bâtiment de bureaux de Bordeaux offre 4500 m² de surface habitable. Il est équipé de pompes à chaleur géothermiques et profite du géo-cooling en été : les pac son arrêtées et by-passées, un échangeur à plaques récupère le froid des capteurs enterrés chargés en eau glycolée et le distribue dans le bâtiment.
Les besoins de chauffage annuels sont évalués à 20,2 kWhEP/m².an. Les besoins totaux en énergie primaire ne devraient pas dépasser 51 kWhEP/m².an. La maison individuelle, quant à elle, dispose d'un blog qui lui est consacré. Construite en 2012, occupée en 2013, cette maison fait l'objet d'un monitoring qui devrait faire connaître sous peu son bilan énergétique des années 2013 et 2014.
Le Passivhaus Institut participe également au projet européen Sinfonia “Low Carbon Cities for Better Living” (http://www.sinfonia-smartcities.eu/en/project). Ce projet a pour but de développer des solutions aisément reproductibles pour réduire la consommation énergétique des villes, tout en accroissant la part des ENR dans leur bilan annuel.
Sinfonia est né de la collaboration entre Innsbrück (Autriche) et Bolzano (Italie). Ces deux villes ont depuis été rejointes par Pafos (Chypre), Rosenheim (Allemagne), Séville (Espagne), Borås (Suède) et La Rochelle (France). Toutes ces villes veulent développer leurs réseaux de chaleur et de froid urbains, les alimenter autant que possible par des ENR, tout en rénovant les bâtiments de plusieurs quartiers pilotes.
Séville est par exemple pionnière dans l'alimentation des réseaux urbains chaud et froid simultanément grâce à d'énormes pompes à chaleur à absorption fabriquées par Panasonic (ex-Sanyo) et distribuées en Europe par Carrier. La Rochelle dispose d'un réseau de chauffage urbain, partiellement alimenté par des ENR (bois et solaire thermique).
Le rôle moteur du Passivhaus Institut dans Sinfonia réside dans son expertise de la rénovation performante, d'une part, dans le fait que le second établissement de l'institut se trouve à l'Université d'Innsbrück, d'autre part.
Le Passivhaus Institut participe à d'autres programmes européens : EuroPhit pour la rénovation au standard Passivhaus, le programme PEP pour la promotion des constructions passives européennes, le projet Passive-On pour développer des bâtiments à très faibles consommations d'énergie dans le sud de l'Europe et 3encult pour la meilleure rénovation énergétique possible des bâtiments historiques classés. Tout cela vise à promouvoir le standard Passivhaus dans la perspective des bâtiment nZeb ou Bepos de 2018-2020.